Le 6 juin dernier, Marina Julienne remportait le "Coup de cœur pour une recherche" et le Prix "Citoyen de la Métropole du Grand Nancy" et de l'édition 2018 du festival Sciences en Lumière.
Nous avons eu la chance de discuter de son travail quelques minutes après l'annonce du palmarès.
Qu’est ce que vous avez exploré durant ce film ?
Marina Julienne : Nous avons suivi, avec le co-réalisateur Raphaël Girardot, une équipe de chercheurs de l’ENS de Lyon qui est dirigée par le physicien Vance Bergeron. Il a eu un accident de vélo il y a quelques années, est devenu tétraplégique et il a réorienté l’activité de son laboratoire sur les aides technologiques pour les handicapés. Il a recruté 3 personnes tétraplégiques comme lui pour participer à la première compétition internationale pour athlètes handicapés équipés de prothèses bioniques, le Cybathlon, qui avait lieu à Zurich en 2016.. Nous sommes restés en immersion dans son laboratoire pendant 6 mois, le temps de la préparation et de l'entrainement pour cette compétition. Sachant que lui et son équipe s’entrainait surtout sur la stimulation électrique fonctionnelle : le principe est de placer des électrodes sur les jambes des personnes paralysées, puis d'envoyer des impulsions électriques qui leur permettent à nouveau de pédaler.
Quelles étaient vos attentes sur la participation à ce festival ?
Marina Julienne : L'objectif était de faire connaître ce film, qui montre les implications de la science dans les questions de société. C'est un film sur le travail d'une équipe de chercheurs, mais c'est aussi un film sur le handicap, et sur les questions que posent l'utilisation de ces nouvelles technologies. On voit que ces personnes handicapées évoluent dans une société qui ne s'adapte pas à eux, ils se demandent jusqu'où ils sont prêts à investir, en énergie physique, en force mentale et en argent, pour combler leurs différences avec les valides. Nous interrogeons aussi dans ce film la mince frontière entre « l'homme réparé », auquel ces chercheurs aspirent, et « l'homme augmenté » souhaité par une société de la performance et du dépassement de soi.
Vos impressions sur le fait d’avoir eu deux prix ?
Marina Julienne : J’étais franchement très étonnée et vraiment très heureuse car ce film , pourtant coproduit par France télévisions, n’a toujours pas été diffusé alors qu'il est terminé depuis un an. Sans doute le sujet effraie un peu, peut être que les diffuseurs se disent « cela parle des handicapés donc l'audience sera faible » … C’est une erreur car ce sujet de la réparation et de l'augmentation nous concerne tous : ces technologies sont entrain d'envahir nos vie sans que nous ayons le temps de réfléchir à leur utilisation et à leur impact. Donc j’espère que le fait d’avoir reçu deux prix va inciter à une diffusion du film sur France 2, comme cela était prévu au départ !
Prix citoyen de la Métropole du Grand Nancy
« Toujours debout » est aussi le prix « coup de coeur » pour une recherche – ex-aequo avec « Maître Feng : moine taoïste en Chine, aujourd’hui »
« Toujours debout », réalisé par Marina Julienne et Raphaël Girardot, d’après une recherche de Vance Bergeron, laboratoire de physique de l’ENS Lyon (Université Claude Bernard Lyon 1, CNRS, ENS Lyon)
61’/2017/France/Look at Sciences, CNRS Images
Toujours debout (teaser) from Look at Sciences on Vimeo.
Victimes d’accidents, des chercheurs tétraplégiques cherchent à retrouver leurs fonctions motrices en expérimentant stimulations électriques, exosquelettes… Ils découvrent la frontière entre « l’homme réparé » et « l’homme augmenté » souhaité par une société à la recherche de la performance et du dépassement de soi.