Le « jumeau virtuel », un outil en plein essor dans l'industrie de demain

 
Publié le 3/07/2018 - Mis à jour le 10/05/2023

L’industrie se trouve aujourd’hui au cœur d’une révolution numérique et humaine dont un des enjeux majeurs est la connectivité entre les systèmes. Cette connexion entre le monde réel et le monde digital contraint désormais tout le secteur industriel à préparer sa transition vers le modèle de l’usine connectée.

Représentation numérique de la conception, de la fabrication ou de l’utilisation d’un produit, le « jumeau virtuel » se servira du big data ; et à travers la communication entre machines, il pourra s'auto-instruire, et peut être même un jour réussir à s'auto-réparer ! Le jumeau virtuel est aujourd'hui peu utilisé  mais cette technologie tend à se démocratiser d'ici une dizaine d’années.

Le 17 mai dernier, le Brunch « Virtual Twin » a réuni plus de 50 personnes dans les tout nouveaux locaux de l'UFR MIM et de l’UP&S Ditex de l’Université de Lorraine sur le campus Metz Technopole, pour répondre à la question « En quoi le jumeau numérique bouleverse-t-il l’Industrie du Futur ? ». Il s'est déroulé dans le cadre de la journée « Cobotique et Virtual Twin dans l’Industrie du Futur », une journée d’échanges entre entreprises et chercheurs co-organisée par l'UP&S DITEX et l'UFR-MIM.

Par leurs présences et leurs interventions, les participants du Brunch ont contribué à la richesse des échanges et ont notamment abordé les nombreux enjeux qui découlent du développement des technologies numériques dans l'industrie.

Travailler, tester de vrais objets peut coûter très cher ! Qui ne rêve pas de pouvoir créer la version dématérialisée d'une technologie en deux clics et de pouvoir reproduire les conditions réelles et ainsi connaître à l'avance les conséquences de telle ou telle utilisation, de prévenir la panne ou de prévoir l'usure de son objet ? Ancré dans le réel, le jumeau virtuel permet d'améliorer les performances d'un produit.

Une problématique importante a été à plusieurs reprises soulevée par les intervenants de la table ronde au sujet d’une autre application importante de cet outil qu’est la formation. 85% des métiers en 2030 n’ont pas encore été inventés (Source Institute of the Future “The next era of Human-Machine - PARTNERSHIPS”) alors comment les enseignants doivent-ils former les étudiants ? Un panorama des projets d’innovation pédagogique réalisés en collaboration avec des universités du monde entier a été évoqué.  Nos étudiants du futur devront savoir « apprendre à apprendre » pour se former tout au long de leur vie ce qui va impliquer que les enseignants revoient également leurs méthodologies d’apprentissage comme par exemple l’enseignement en mode projet qui utilise le cours au service du projet et non l’inverse. L’appropriation du jumeau virtuel va bouleverser et faciliter la façon d’enseigner, les nouvelles pratiques numériques au sein des universités et les écoles d’ingénieurs

L'enjeu du jumeau est triple. Il peut être très utile pour travailler sur le handicap. De nombreux projets sont développés, notamment par les Universités du Grand Est, comme la conception d’un simulateur de conduite pour améliorer l’autonomie des patients victimes d’un AVC.

Ce rendez-vous gourmand a permis à Freddy HAGEN, gérant de la société TECH 3D spécialisée dans la fabrication de machines spéciales et intégrateur de robots, d’apporter son analyse du marché sur cette thématique. Selon lui, le jumeau virtuel est un outil qui pourra être déployé sur certains projets mais il lui paraît difficile de défendre son application sur les projets industriels où les clients recherchent un retour sur investissement rapide. Le chef d’entreprise intègre le jumeau virtuel pour chaque projet dans le domaine de la machine spéciale et de la robotique, mais constate qu’il n’est pas valorisé par manque de moyens à la livraison de la machine.

Pour le professeur Gérôme GAUCHARD de la Faculté des Sciences du Sport de Nancy (MéMoSim’S - HVL), l’introduction de dispositifs intelligents collaboratifs dans le monde du travail est un des enjeux majeurs de l’industrie du futur. Qu’ils entrent en symbiose avec l’opérateur (exosquelette) ou qu’ils collaborent avec lui (cobot), la nécessité d’utiliser ces dispositifs ne doit pas faire oublier que le travail est une activité humaine et qu’à ce titre l’individu en est le point central. Si, dans la représentation générale, ces dispositifs ont pour vocation une amélioration des performances au travail, ils permettent aussi d’assister l’homme dans des tâches difficiles ou pénibles, ou répétitives à faible valeur ajoutée, l’objectif étant une forme de prévention des troubles musculo-squelettiques (TMS). Cet objectif est évidemment louable, encore faut-il mettre en place les méthodes et les moyens de vérifier l’impact de cette interaction homme-machine en termes de santé. Quels sont les effets de cette nouvelle relation au travail ? Comment les salariés peuvent-ils s’approprier ces dispositifs ? N’introduit-on pas de nouveaux TMS ? Ne déplace-t-on pas les TMS ? L’analyse ergonomique permet actuellement de mieux comprendre la nature de ces interactions et ses effets ; ainsi, la métrologie bio-psycho-sociale de l’activité humaine en situation de travail, sa modélisation dans l’environnement et la simulation des interactions homme-machine visent à adapter de manière la plus personnalisée possible le travail à l’individu dans le cadre d’un triple objectif, celui de la performance, de la prévention des TMS et du bien-être au travail. M. GAUCHARD rappelle que le jumeau virtuel ne doit ni masquer, ni faire oublier l'humain !

Zouhour GUIRAS, doctorante en 3ème année au sein du Laboratoire LGIPM, se réfère à une étude réalisé par le cabinet Gartner en février 2017 dans le domaine de l’Internet of Things. Le cabinet américain dévoile que des centaines de millions d’objets connectés auront leur jumeau numérique d’ici cinq ans. Mme GUIRAS souligne que cette évolution virtuelle et numérique jouera certainement un rôle bénéfique dans le monde réel. De plus ces nouvelles pratiques numériques et les savoirs de l’industrie du futur s'intégreront parfaitement dans les formations.

Xavier FOUGER, directeur des programmes académiques de Dassault Systèmes, et M. GAUCKLER, chargé de mission pour le suivi du schéma et directeur numérique de l’Université de Strasbourg, ont rappelé l’importance de  transférer dans le monde de l’éducation les nouvelles pratiques numériques et les savoirs de l’Industrie du futur.

Cette table ronde a été une opportunité de rassembler des professionnels et des spécialistes du digital, du monde industriel et des acteurs institutionnels. Outre les perspectives et les exemples d’applications de la cobotique, les participants ont pu découvrir la qualité des locaux et des plateformes de la composante UFR-MIM et de l’UP&S DITEX dans lesquels les étudiants peuvent désormais évolués.

Pour tout renseignement complémentaire ou recevoir le calendrier des prochains Brunchs, envoyez un e-mail à l'adresse suivante : lebrunch-contact@univ-lorraine.fr

Article rédigé à plusieurs mains. Dessins réalisés par Catherine CRÉHANGE, Illustratrice de propos. Photos prises par Morgane STEFAN, Assistante Brunch