A la découverte du métier de technicien en anatomie…

 
Publié le 28/04/2015 - Mis à jour le 5/05/2023

Dans la famille « emplois singuliers », je voudrais le technicien en anatomie ! Marine Krebs et son compère Jean-Michel Arnoux nous ont ouvert les portes du département d’anatomie - situé dans le bâtiment AB de la Fac de médecine de Nancy - où ils exercent avec passion leur métier plutôt singulier de technicien en anatomie. Du haut de ses 28 printemps à peine, Marine, une jeune femme souriante et dynamique nous explique les différentes missions qui rythment son quotidien :

  • Gestion des dons du corps à la science

Le don du corps à la science est une démarche personnelle et volontaire. Il consiste à donner son corps au moment du décès à des fins d'enseignement et de recherche. La personne doit être majeure et en faire la demande manuscrite auprès de la faculté de médecine de son choix.
La situation peut paraître un peu étrange : quand Marine décroche le téléphone, elle se retrouve à discuter avec un interlocuteur qu’elle rencontrera seulement après son décès.

  • La réception des corps et la préparation des pièces anatomiques

En moyenne, Marine et Jean-Michel réceptionnent une cinquantaine de corps chaque année. Ces hommes et ces femmes qui font ce geste pour la science ont déjà un âge avancé (plus de 60 ans en moyenne) et la démarche concerne souvent des couples.
Anonymes, les corps font ensuite l’objet d’une préparation spécifique pour permettre :

  • aux futurs chirurgiens formés à l’Université de Lorraine d’apprendre l’anatomie et la physiologie, de manipuler des outils chirurgicaux et d’appréhender le ressenti lors d’une intervention. Le corps devient alors un véritable outil pédagogique indispensable à la formation des étudiants et des professionnels. Ces exercices sont intégrés au sommet de la pyramide de formation dont les premiers stades sont assurés par les équipes chirurgicales et médicales de l’Hôpital Virtuel de Lorraine. Les travaux de dissections sont animés par les professeurs d’anatomie ou de clinique et encadrés par Marine et Jean-Michel qui n’hésitent pas à aider et rassurer les étudiants pas toujours à l’aise.
  • aux chercheurs de tester leur recherche : nouveau protocole médical, nouveaux matériels (prothèses diverses, implants, outillage médical, etc.). Ils peuvent également répéter des interventions à risques ou améliorer le protocole d’une intervention. Beaucoup d’entre eux réalisent des injections de produits de contraste pour étudier la vascularisation des organes et ainsi éviter des nécroses.

Après les travaux anatomiques, les corps sont incinérés anonymement et leurs cendres sont dispersées dans un jardin du souvenir.

  • L’entretien du musée d’anatomie

Depuis toujours, la Faculté de Médecine possède et entretien un musée qui accueille plusieurs collections surprenantes de pièces anatomiques destinées à la formation des étudiants en médecine. Les magnifiques meubles d’époque (fin XIXe siècle) accueillent des pièces d’origines humaines et animales conservées sous différentes formes et notamment grâce à la plastination, une méthode de conservation que maîtrise parfaitement Jean-Michel Arnoux. Inventée par le professeur Gunther von Hagens, anatomiste allemand né en 1945, cette technique éternise le corps en remplaçant les liquides organiques par du silicone. Formé par ce dernier,  Jean-Michel Arnoux est une référence en la matière. Il est d’ailleurs très souvent sollicité par ses homologues francophones pour transmettre son savoir-faire. Marine profite au quotidien de l’expérience de son collègue. Une aubaine !

Marine exerce ce métier aux côtés de Jean-Michel depuis 4 ans. Nous avons souhaité en savoir plus sur son parcours et ses motivations.

Après un DUT et une licence professionnelle en chimie, Marine ne trouve pas d’emploi qui lui convienne. Elle tourne en rond. Finalement, c’est le Pôle emploi qui lui propose cet emploi peu commun avec une description du poste plutôt approximative… Attirée par l’univers de la recherche et dotée d’une curiosité scientifique, elle postule et accède rapidement au poste pour lequel aucune formation spécifique n’est requise. Marine apprend sur le terrain et au fil des années, elle se passionne pour ce métier.

Ma mère l’a très bien pris car elle a comme moi une curiosité scientifique, mais mon père ne réagit pas pareil, il ne veut pas en parler.

Pour exercer ce métier, certaines qualités sont requises. L’Ethique est selon elle indispensable, tout comme l’écoute des personnes qui font don de leurs corps, des familles en deuil, des étudiants qui apprennent et des professeurs et chercheurs qui ont des exigences particulières pour leurs travaux. Jean-Michel Arnoux ajoute aussi la précision, la minutie et la patience.

C’est dans une ambiance conviviale et décontractée que nous avons laissé nos deux collègues poursuivent leur activité sans doute insoupçonnée jusque-là…