Laurence Canteri est vice-présidente en charge du conseil de la vie universitaire, Yves Cardellini est référent handicap de l'Université de Lorraine. Grâce au travail collégial entrepris depuis 2001 en Lorraine pour l'accès des étudiants en situation de handicap, le nombre d’étudiants accompagnés a été multiplié par 2,6 en 10 ans.
La loi du 11 février 2005 fixe clairement l’accès de droit pour les étudiants en situation de handicap. Dans ce cadre, le Ministère de l’Enseignement supérieur a incité à la signature d’une charte « Université/Handicap » avec la Conférence des Présidents d’Université (CPU), lancée en 2007 et renouvelée en 2012, prévoyant la mise en place de structures dédiées dans les établissements. Leur mission : analyser les besoins de chaque étudiant, définir les accompagnements nécessaires, veiller à leur mise en œuvre et assurer un suivi tout au long du parcours.
La création de ces lieux permet donc à l’étudiant de disposer d’une porte d’entrée unique et bien identifiée pour ses démarches. Reste que la décision de faire reconnaître sa situation appartient à chacun, ce qui ne peut effacer les phénomènes d’autocensure. Certains étudiants craignent en effet d’être stigmatisés. D’autres ont réussi dans le secondaire à compenser leur situation sans se déclarer. Mais, après quelques mois, beaucoup se rendent compte qu’un accompagnement leur est nécessaire. Dès lors qu’ils ont connaissance du dispositif de leur établissement, les démarches sont assez balisées.
À l’Université de Lorraine, où un travail collégial est entrepris depuis 2001, le nombre d’étudiants accompagnés a été multiplié par 2,6 en 10 ans. Ce qui représente, au cours de l’année universitaire 2017/2018, près de 800 étudiants, soit 1,2 % des promotions. En 2017/2018, 70 % des étudiants lorrains identifiés ont bénéficié d’un Plan d’accompagnement de l’étudiant handicapé (PAEH).
Un suivi concerté
Le lancement d’une procédure d’accompagnement passe par la rencontre avec deux acteurs clefs du dispositif : le référent handicap, véritable interlocuteur au quotidien de l’étudiant, et le médecin du service de santé universitaire, qui, quant à lui, va reconnaître la situation de handicap et formulera, notamment, des préconisations pour l’aménagement des examens. Les délais pour le traitement de la demande vont dépendre des situations individuelles à examiner.
L’accueil de ces étudiants, et par la suite leur accompagnement, relèvent dans tous les cas d’une action concertée, de la mission handicap à l’équipe pédagogique, en passant par le service d’aide à l’orientation et l’insertion professionnelle, ou encore les associations étudiantes de filières… Cette collaboration est indispensable à la mise en place d’un accueil de qualité.
Quelles formes les accompagnements proposés peuvent-ils prendre concrètement ? Pendant les cours, les étudiants peuvent bénéficier de la présence d’un preneur de notes ou échelonner leur cursus, par exemple en répartissant les enseignements d’une année universitaire sur deux ans. Ces aménagements sont consignés dans le PAEH qui suivra l’étudiant tout au long de ses études et qui sera revu régulièrement (généralement au moins une fois par an) pour s’adapter aux évolutions du cursus et, parfois, du handicap.
Pour les examens ils peuvent bénéficier d’un temps majoré pour les épreuves écrites et/ou orales, de l’appui d’un secrétaire qui rédige la copie sous leur dictée ou d’un ordinateur pour composer à l’aide de logiciels dédiés comme pour les troubles Dys par exemple… Certains étudiants peuvent également disposer d’une salle individuelle pour passer leurs examens. Ces aménagements peuvent, bien évidemment, se cumuler suivant les situations.
En Lorraine, au regard des arrêtés d’examens établis lors de l’année universitaire 2017/2018, 25 % des étudiants accompagnés pour les examens composent en présence d’une aide humaine.
Communiquer avec les lycées
Pour les bacheliers et les nouveaux inscrits, il est très important de débuter les démarches dès l’admission dans une formation, et ce sans attendre la rentrée.
Afin que l’accompagnement soit rapidement efficient dès l’arrivée à l’université, il est nécessaire d’établir des contacts avec l’enseignement secondaire pour faciliter la transition vers l’enseignement supérieur. Ainsi, suivant les régions et/ou les universités, des initiatives spécifiques peuvent être organisées sous différentes formes – forum des formations et des métiers avec les entreprises et les établissements d’un territoire ; interventions dans les lycées ; présentation des conditions d’accompagnement à l’université ; rencontre avec les enseignants référents handicap des lycées…
À ce titre, les collaborations entre le Rectorat de l’Académie Nancy-Metz et l’université de Lorraine existent depuis plus de dix ans et font l’objet aujourd’hui d’une convention de partenariat qui s’appuie notamment sur la co-organisation d’une manifestation phare : « Handicap et Études supérieures ». Au cours de cet événement, chaque année, sont présentées aux lycéens en situation de handicap les modalités d’accompagnement qui sont proposées dans les établissements d’enseignement supérieur et les démarches à entreprendre pour en bénéficier. Ainsi, 60 lycéens, souvent accompagnés de leurs parents, ont été informés lors de l’édition 2018.
Par ailleurs, au plan national et dans une volonté d’harmoniser et d’échanger sur les pratiques, l’Association des professionnels de l’accompagnement du handicap dans l’Enseignement supérieur (APACHES) a été créée en novembre 2012. Elle a vocation à fédérer l’ensemble des structures d’accompagnement des étudiants et des personnels handicapés de l’enseignement supérieur afin de permettre à celles-ci, au sein de leurs établissements, de mieux répondre aux obligations de la loi du 11 février 2005 sur « l’égalité des droits et des chances des personnes handicapées ». Elle facilite le dialogue avec les tutelles et les instances pour élaborer des préconisations répondant à la mise en œuvre de nouvelles politiques.
Laurence Canteri, Vice-présidente en charge du conseil de la vie universitaire, Université de Lorraine et Yves Cardellini, Référent Handicap, Université de Lorraine
La version originale de cet article a été publiée sur The Conversation.