[3 questions à] Laetitia Bracco, cheffe de projet Baromètre français de la Science Ouverte données et codes

 
Publié le 15/02/2024 - Mis à jour le 26/02/2024

Laetitia Bracco, cheffe de projet Baromètre français de la Science Ouverte, données et codes a organisé dernièrement une rencontre internationale à l'UNESCO pour réfléchir à la mise en œuvre de principes communs de suivi de la Science Ouverte. Factuel est allé à sa rencontre pour qu'elle nous en dise plus sur ce qu'est devenu le baromètre lorrain de la Science Ouverte, sur son expérience en tant que cheffe de projet pour la troisième édition du baromètre national auprès du Ministère de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche et sur l'enjeu de cet atelier multinational à l'UNESCO.

Factuel : Le baromètre lorrain de la Science Ouverte a été le premier baromètre régional. Pouvez-vous nous expliquer comment et pourquoi il a été conçu, à quoi il a servi, et ce qu'il est devenu ?

Laetitia Bracco : "En décembre 2018, le Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche a publié la toute première édition du Baromètre français de la Science Ouverte, outil de mesure conçu pour évaluer l’impact du Plan National pour la Science Ouverte sur l’ouverture concrète des publications scientifiques. Il était alors composé de graphiques présentant la proportion de publications françaises en accès ouvert par année, discipline, éditeur… Il nous est tout de suite apparu, au sein des bibliothèques universitaires lorraines, qu’il serait très intéressant de disposer des mêmes indicateurs à l’échelle de l’établissement pour que nous puissions, nous aussi, mesurer la progression de l’ouverture des publications et identifier les communautés disciplinaires qui avaient le plus besoin de soutien. Après m’être formée à la programmation avec Python, j’ai développé la première version locale du Baromètre national et l’ai mise à disposition de la communauté en juin 2020 en plaçant mon code sous licence libre. Très rapidement, de nombreuses universités et organismes de recherche ont adopté cet outil en utilisant la méthodologie lorraine, ce qui m’a amenée à accompagner et former de nombreux collègues partout en France. En 2021, le Ministère a considérablement amélioré le Baromètre avec de nouveaux indicateurs et une interface permettant de générer simplement son Baromètre local, qui est à présent également utilisée pour l’Université de Lorraine. Le Baromètre est maintenant incontournable pour tout établissement menant des actions en faveur de la Science Ouverte."

 

Factuel : Vous êtes cheffe de projet pour la troisième édition du baromètre national auprès du Ministère de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche. Pouvez-vous nous décrire cette expérience ?

Laetitia Bracco : "Après avoir lancé l’aventure des Baromètres locaux, le Ministère m’a demandé d’être cheffe de projet au nom de l’Université de Lorraine pour l’extension du Baromètre français à de nouvelles productions scientifiques, les données de la recherche et les logiciels. En effet, les publications ne sont qu’une partie de la Science Ouverte. Pour ce projet, je travaille bien sûr étroitement avec l’équipe du Baromètre au sein du Ministère mais également avec Inria. Nous avons obtenu ensemble un important financement du plan de relance en 2021 pour le projet qui nous a permis de publier de nouveaux indicateurs en 2023. C’est une expérience extrêmement enrichissante pour moi et pour l’établissement. Il s’agit en effet d’un projet complexe, car les données et logiciels de la recherche sont plus difficiles à trouver que des publications. Il est également sensible : quels indicateurs faut-il retenir pour mesurer l’ouverture des données et des codes ? En tant que cheffe de projet je dois à la fois comprendre les développements techniques réalisés pour obtenir ces indicateurs, animer et coordonner l’équipe projet, tout en veillant à ce que les établissements soient associés à l’évolution du Baromètre."

 

Factuel : Vous avez coordonné un atelier multinational à l'Unesco "Construire un cadre de suivi de la Science Ouverte avec des technologies ouvertes". Quelles sont ces technologies ? Qui faut-il coordonner ?

Laetitia Bracco : "L’expérience de la France en matière de suivi de la Science Ouverte via le Baromètre est reconnue internationalement. Ainsi, de nombreux liens se sont noués au cours du développement du projet avec d’autres institutions en Europe et dans le monde, qui souhaitent également mesurer la progression de la Science Ouverte dans leur périmètre. Les technologies employées au sein du Baromètre sont en effet entièrement sous licence libre, c’est-à-dire que les données utilisées pour réaliser les mesures comme les logiciels développés pour produire les indicateurs sont ouverts et réutilisables par d’autres. L’avenir du suivi de la Science Ouverte repose aussi sur l’utilisation de sources libres, comme OpenAlex, base de données bibliographique et bibliométrique ouverte, dont la couverture est par exemple bien supérieure à celle du Web of Science.

J’ai coordonné avec le Ministère, Inria et l’Unesco une journée d’étude à ce sujet le 19 décembre 2023 au siège de l’Unesco à Paris pour faire se rencontrer ces acteurs. Mettre en commun l’expérience française et celles d’autres pays ou institutions également avancés en la matière est en effet très important pour définir un cadre commun de suivi de la Science Ouverte, l’idée étant de réfléchir à des indicateurs qui pourraient être partagés au niveau mondial pour stimuler son développement. La coordination doit ainsi se faire entre les acteurs incontournables du domaine, tels que le Cern, la NASA, le CWTS, l’OCDE... L’étape suivante est à présent de maintenir cette dynamique en créant une initiative internationale sur le sujet."