2020-2021 : nous préparer en pariant sur l’avenir

 
Publié le 7/07/2020 - Mis à jour le 8/07/2020
Hélène Boulanger et Pierre Mutzenhardt

Rentrée 2020, moyens déployés par l’Université de Lorraine pour cette rentrée particulière, projections économiques de l’établissement pour 2021 : Factuel est allé à la rencontre du président Pierre Mutzenhardt et d’Hélène Boulanger, 1ère vice-présidente et vice-présidente du Conseil d’Administration pour en savoir plus. Entretien croisé.

Factuel : comment va se passer la rentrée en septembre 2020 ?

Pierre Mutzenhardt : L’université est un lieu de brassage et d’essaimage. Nous accueillons des publics de tous horizons et de toutes origines géographiques. C’est une fierté et c’est indispensable pour produire et partager des connaissances. Mais en période de pandémie, une université a un pouvoir d’essaimage sur des territoires très étendus. Ce qui fait notre fierté en temps normal nous oblige à prendre des précautions pour faire en sorte que le premier semestre se passe au mieux.

Nous avons beaucoup échangé avec les directeurs de composantes et les élus des conseils et comités. Nous avons choisi d’accueillir le plus possible les étudiants en présentiel, mais tout en respectant les gestes barrières et la distanciation sociale. Je sais que cela complique beaucoup l’organisation des enseignements et je remercie tous les collègues, enseignants, enseignants-chercheurs et personnels BIATSS, pour leur engagement dans la préparation de cette rentrée. Bien sûr, nous souhaitons tous et toutes revenir au plus vite à une situation normale de fonctionnement mais tout ce qui se passe autour de nous aujourd’hui nous dit que cette pandémie n’est pas encore terminée et qu’il faut apprendre à vivre avec, probablement au moins pendant quelques mois encore. Pour cela, il n’y a pas de recette miracle autre que le respect par chacun et chacune d’entre nous des gestes barrières et de la distanciation sociale.

Factuel : quels sont les moyens déployés par l’université pour cette rentrée particulière ?

Hélène Boulanger : Nous pensons en premier lieu à la protection des personnels et des étudiants. Tous les bâtiments de l’établissement sont en cours d’aménagement (Plexiglas pour les espaces d’accueil, signalétique spécifique…) et tous les personnels et étudiants de l’université auront une dotation en équipements de protection individuelle d’ici la rentrée.

Le respect de la distanciation sociale a aussi un effet sur les capacités d’accueil de nos salles, même si nous essayons de l’améliorer en renforçant les opérations de nettoyage quotidien. Nous accueillerons le plus possible les étudiants sur nos campus mais il nous faut aussi augmenter nos capacités de captation vidéo et de virtualisation pour les Travaux Pratiques en salle machine. Nous agissons également pour augmenter le parc des ordinateurs en prêt aux étudiants et travaillons à la mise en place d’une filière plus organisée de don d’ordinateurs reconditionnés. Le Conseil de la vie universitaire a pris aussi des dispositions pour augmenter les fonds d’aide sociale et mis en place de nouveaux contrats-étudiants pour renforcer l’accueil à la rentrée.

Tout cela représente des investissements importants que nous parvenons à financer par une réaffectation de nos crédits. Nous avons en effet économisé sur certains postes (chauffage, déplacements…) du fait du confinement et nous pouvons utiliser ces économies pour financer le coût de la crise sanitaire en 2020. Tout cela est possible par la solidarité de tout l’établissement qui se mobilise pour constituer un fonds de solidarité de 4,8 M€. La solidarité est une des valeurs fortes de notre université et nous avons montré ces derniers mois que ce n’était pas qu’un mot mais une vraie façon de travailler tous ensemble pour le bien commun.

Factuel : la situation est donc bien posée pour 2020 mais qu’en sera-t-il pour 2021 ?

Hélène Boulanger : Nous avons beaucoup d’incertitudes pour 2021. Par exemple, si la situation de pandémie devait se prolonger en 2021, nous aurions alors des dépenses nouvelles et plus forcément d’économies pour les couvrir. Nous ne connaissons pas encore la manière dont l’Etat accompagnera les universités dans cette période compliquée. Et il faut aussi intégrer dès maintenant l’idée que la crise sanitaire est aussi une crise économique. Nos recettes vont forcément baisser parce que nos partenaires, que ce soient les entreprises ou les collectivités, vont subir les conséquences de cette crise économique.

Tout cela vient s’ajouter à une situation financière qui est déjà problématique pour notre université. Depuis l’arrêt de la prise en charge du Glissement Vieillesse Technicité (2,6 M€ qui viennent s’ajouter tous les ans à notre masse salariale du simple fait des changements d’échelon et des promotions) par l’Etat dès 2019, même si nous avons trouvé jusque-là des solutions pour faire face, à un moment donné, « cela coince ».

Quand on fait ces constats, avec tous ces risques et ces points d’interrogation, on a deux solutions :

  • Soit on adopte une posture prudente et on fait des économies par précaution, ce qui conduirait l’établissement à mettre moins de moyen dans les composantes de formation et les unités de recherche ;
  • Soit on s’appuie sur nos réserves pour parier sur l’avenir et soutenir par la dotation de l’établissement nos activités de recherche et de formation.

Nous faisons le choix de parier sur l’avenir en soutenant nos activités de recherche et de formation

Pierre Mutzenhardt : Et nous faisons le choix de parier sur l’avenir en soutenant nos activités de recherche et de formation. Nous maintiendrons les dotations aux pôles scientifiques et aux collégiums en 2021 en fonctionnement et nous continuerons à porter une politique volontariste d’investissement. Nous pouvons le faire en étant rigoureux sur la campagne d’emploi (peut-être que nous aurons des décalages de publication mais nous le ferons au minimum nécessaire d’après ce que nous pourrons analyser de 2021 avec davantage d’information, au CA de décembre 2020). Mais notre volonté est bien de soutenir de toutes nos forces nos activités de recherche et de formation. C’est nécessaire pour l’université parce que nous devons préserver nos compétences et nos équipements. C’est indispensable pour les territoires lorrains parce que la crise économique et sociale nous donne une responsabilité accrue en matière d’innovation et de formation.

En faisant cela, nous prenons un risque fort d’avoir un exercice déficitaire en 2021. J’assume ce risque parce qu’il me semble négligeable à côté de l’enjeu qui est celui d’une université vis-à-vis de la société, vis-à-vis de nos partenaires, vis-à-vis de nos étudiants. Nous choisissons de parier sur l’avenir, de croire en la force motrice de notre université, de ses personnels et de ses étudiants, pour nos territoires, notre région et au-delà pour l’ensemble de la société.