Tout au long de l’année, La Semaine et l’Université de Lorraine vous proposent de rencontrer chaque mois les jeunes talents scientifiques qui portent haut les couleurs de la Lorraine dans le monde entier. Huitième épisode de la série avec Frédérique Morel-Doridat du LOTERR, laboratoire de recherche en géographie de l’Université de Lorraine.
Les frontières n’ont aucun secret pour Frédérique Morel-Doridat. Parce qu’elle s’y intéresse souvent, les traverse parfois et les étudie tout le temps. Entretien avec une passionnée des territoires.
Aménagement et décroissance territoriale : vers une approche transfrontalière. « Je vends du rêve, non ? », plaisante Frédérique Morel-Doridat, messine pur sucre, actuellement en 4e année de thèse au LOTERR, laboratoire spécialisé dans l’étude de l’impact des changements économiques, politiques et environnementaux sur les territoires. Le sujet de celle qui officie actuellement en tant qu’attachée temporaire d’enseignement et de recherche (ATER), s’intéresse en priorité aux territoires locaux, c’est-à-dire communes et intercommunalités localisées le long de la frontière Nord-Est de la France, soit de Dunkerque à Genève. Histoire de prendre en compte l’ensemble des interactions transfrontalières. « Je cherche à identifier les territoires qui auraient pu perdre en populations au cours des trente dernières années. Ma thèse s’intéresse à l’identification de cette perte en population, sa compréhension et les différents effets que cela peut avoir. » Une réflexion qui engendre de nombreuses questions : a-t-on vraiment l’impression de vivre cette décroissance ? Est-ce que les populations le vivent négativement ? Est-ce qu’elles ont l’impression de vivre ce processus ? Est-ce que cela ne permet pas d’avoir une vision plus positive du territoire ? « Ce sont des espaces qui sont très proches géographiquement mais éloignés politiquement du fait de la présence de cette frontière : à titre d’exemple, on peut citer Forbach et Sarrebruck. Est-ce qu’on est capable pour un processus qui est partagé, d’avoir une réponse commune ? Cette thèse, je l’espère, pourra servir à un grand nombre d’acteurs socio-économiques, collectivités territoriales en tête », souligne Frédérique.
Metz, une ville qui bouge
La passion de Frédérique pour les territoires ne date pas d’hier. Ou plutôt pour LE territoire et plus particulièrement la Lorraine. « Je n’ai jamais eu cette vision d’une région en crise. De plus, la proximité frontalière a toujours été un atout à mes yeux. » Si elle a effectué toute sa scolarité à Metz, elle a aussi dépassé les frontières en s’engageant au sein d’une filière ERASMUS Junior, en relation avec deux lycées italiens et deux autres roumains sur la question de l’environnement et les conditions d’émergence de la ville européenne de demain. « Grâce aux échanges avec ces établissements, j’ai appris beaucoup sur l’autre. En effet, lorsque je suis arrivée en Roumanie, j’ai été traitée comme une reine. La France y est placée sur un piédestal. » Plus tard, dans le cadre de sa thèse, Frédérique a été amenée à résider à Kaiserslautern en Rhénanie-Palatinat. Ou l’art de goûter à une organisation très… allemande ! « C’est-à-dire que tout était préparé à l’avance. Les membres du laboratoire d’accueil à l’Université m’avaient prévu une visite de la ville, une sortie au restaurant, etc. C’était à la fois très cadré mais très ouvert. Alors que nous Français, on n’ouvre pas aussi facilement nos portes. Contrairement aux idées reçues. » Très attachée à sa famille, la doctorante ne se voit pas quitter la région quand nombre de doctorants n’aspirent qu’à un ailleurs. Puis il y a aussi Metz, sa ville natale qui a considérablement changé ces dernières années. « « À tel point que j’ai dû mal à me remémorer comment elle était avant les travaux liés à la mise en circulation du Mettis. Pour le quartier Patrotte où je réside, les travaux ont été synonymes de désenclavement complet. Metz est aussi devenue une ville cyclable. Je me suis donc découvert une passion pour la bicyclette ! J’aime bien pouvoir me dire que lorsque je sors de mon travail, j’ai la possibilité de faire un tour à vélo, sans me sentir bloquée dans la ville et la pollution, suivre le fil de la Moselle et à l’envi, traverser une frontière. Enfin, quand on est jeune, on voit aussi d’autres différences comme celles des horaires des bars : aujourd’hui, c’est une ville qui bouge, une cité joyeuse qui n’a rien à envier à ses voisines. ». Enfin, quand on est jeune, on voit aussi d’autres différences comme celles des horaires des bars : aujourd’hui, c’est une ville qui bouge, une cité joyeuse qui n’a rien à envier à ses voisines. »
Cet article a été publié dans La Semaine le jeudi 23 avril 2020.
Rendez-vous le jeudi 20 mai pour découvrir l'avant-dernier portrait de la série !