La transition énergétique est actée à l’Université de Lorraine depuis 2009, avec l’engagement d’un manager Energie, Pierre-Jean Mougel. Retour sur 10 ans de travaux qui correspondent aux 10 ans de la publication de la loi Grenelle I de l’environnement avec Pierre-Jean Mougel et Vincent Huault, vice-président Immobilier et transition écologique.
Il y a 10 ans, les universités de Lorraine s’engageaient dans la maîtrise des dépenses énergétiques en se dotant de vos compétences de manager Energie. En quoi cette démarche était-elle novatrice ?
Pierre-Jean Mougel : Novatrice, je ne sais pas, mais en tout cas, nécessaire. Les quatre universités réunies, on obtenait un parc de 250 bâtiments à éclairer, à chauffer... Ce qui représentait tout de même 10 M€ de fourniture d’énergie…
Quelle est le rôle d’un ingénieur thermicien/manager énergies ?
Pierre-Jean Mougel : Mon action consiste à optimiser la facture énergétique de l’université. Je participe à l’élaboration et à la mise en œuvre de la stratégie d’amélioration énergétique du patrimoine. Plusieurs axes ont guidé notre action. Nous avons déjà beaucoup avancé. Par exemple, la part d’énergies renouvelables pour le chauffage est passée de 30% à 60%. Ce sont aussi 42 000 m2 de bâtiments chauffés au fioul qui sont passé à l’énergie propre !
Vincent Huault : C’est une mission assez compliquée car la transition énergétique occupe plusieurs terrains ! Pour le chauffage par exemple, Pierre-Jean vous a parlé de la suppression du fioul, mais nous prenons aussi garde d’avoir une politique volontariste en fixant des niveaux de performance énergétiques plus ambitieux que la réglementation thermique en vigueur sur les opérations immobilières.
Nous menons également une politique d’exploitation du parc immobilier ambitieuse, avec le double objectif de concilier confort, qualité d’air et maitrise des consommations. Pour cela, nous nous appuyons fortement sur des marchés de performance énergétique.
Côté achats, nous valorisons également les énergies vertes dans nos marchés de fourniture d’énergie.
Dix ans après, quelles ont été les économies réalisées ?
P.-J. M. : Il est difficile de parler en termes d’économie financières, je préfère parler en baisse de consommation pour s’affranchir de la volatilité des cours énergétiques. En effet, le coût d’achat de l’énergie électrique a augmenté de 40% depuis ma prise de poste, même en l’ayant optimisé au maximum !
Le parc immobilier a aussi pris du volume (+ 100 000 m²) et les nouveaux usages sont plus gourmands en électricité. La stabilisation des consommations électriques de l’université à isopérimètre est donc un résultat très honorable.
Pour le chauffage, les résultats sont plus parlants, on est sur une baisse de quasiment 15% des consommations et le coût de fourniture n’a pas subi d’augmentation malgré le doublement de la part issue d’énergies renouvelables.
Sans les travaux menés, le budget énergie annuel de l’Université de Lorraine se serait alourdi de plus d’1,5M€ par rapport à ce qu’il est aujourd’hui !
V. H. : Au-delà des économies, ce que nous recherchons c’est un meilleur rendement pour améliorer la qualité de travail de nos collègues et de nos étudiants.
P.-J. M. : Oui, nous ne cherchons pas à faire des économies aux dépends du bien-être des personnels. Par exemple, le chauffage est programmé à 20 ou 21°, alors que les textes le fixent à 19°. Vincent a évoqué la qualité de l’air… Cela ne va également pas dans le sens des économies, mais c’est pourtant bien un axe fort de notre action qui vise à améliorer la qualité d’usage de nos bâtiments. Aujourd’hui, quasiment tous les amphis sont équipés de sonde de qualité d’air.
Et les projets d’avenir ?
P.-J. M. : On a encore beaucoup de chose à améliorer ! Par exemple pour la consommation électrique, l’optimisation de l’éclairage avec les nouvelles technologies ou les dépenses liées aux usages du numérique pour réduire les dépenses en froid et ventilation. Ou encore l’automatisation des programmations de chauffage des salles de cours couplée au logiciel de réservation de salles, ADE. On a aussi un énorme chantier sur le traitement de la performance du clos-couvert des bâtiments qui constitue un des enjeux majeurs du projet PEEC 2030 (Programme Efficacité énergétique des campus à 2030).
V. H. : Un autre chantier concerne la sensibilisation de notre communauté aux gestes économes : éteindre les lumières et son ordinateur, ne pas couvrir ses radiateurs… Les aménagements matériels ne feront pas tout si nous ne les accompagnons pas de changements de comportements.