Une découverte rare : des vestiges textiles d’époque médiévale mis au jour par les archéologues

 
Publié le 6/12/2023 - Mis à jour le 11/12/2023
Textile médiéval - Vue à la loupe binoculaire

Les recherches archéologiques en cours sur le site des mines de la Grande Montagne dans le cadre d'une opération de sauvetage ont mis au jour plusieurs fragments de textile encore parfaitement conservés dans la gangue argileuse, en dégageant un niveau d’occupation daté de la fin du Moyen Age. Une découverte rare.

A la limite de la Lorraine et de la Franche-Comté, le sous-sol du hameau de Château-Lambert en Haute-Saône, n’en finit pas de révéler de nouvelles découvertes. Attestées au XVe siècle à travers les sources, les mines étaient en pleine activité au début du XVIIe siècle. On en tirait alors des minerais de cuivre que l'on fondait pour la chaudronnerie. D’après les vestiges, l’activité minière s’échelonnerait de la Protohistoire jusqu’à l’époque contemporaine marquée par des épisodes de reprises plus ou moins importants au cours des XVIe, XVIIe et XVIIIe siècle. 

Les recherches archéologiques en cours sur le site des mines de la Grande Montagne, dans le cadre d'une opération de sauvetage, ont mis au jour un niveau d’occupation daté de la fin du Moyen Age caractérisé par la présence de céramique culinaire, d’ossements et de nombreux fragments de bois et de charbons de bois. Selon les archéologues, il pourrait s’agir là d’un habitat temporaire de mineur. Pour autant, c’est une découverte inattendue que les archéologues viennent de mettre au jour : plusieurs fragments de textile conservés dans la gangue argileuse et détrempée des cônes de déjection issus de la mine ou haldes.  

Les textiles anciens, du fait de leur nature organique, sont en effet des matériaux particulièrement vulnérables et constituent des trouvailles exceptionnelles. Il est rare en effet de mettre au jour des vestiges de ce type en aussi bon état. D’après les premières observations il s'agit de pièces textiles issues d'une production professionnelle. Tout indique en effet qu’il s’agit là de tisserands expérimentés. Les analyses en cours devront s’attacher à identifier le type de fil utilisé, l’armure des tissus, ainsi que la qualité du filage et du tissage.

La conservation de ce type de vestige s’explique par la nature du contexte : un environnement acide et particulièrement détrempé par l'infiltration des eaux d'exhaure qui s'écoulent en continu, ce qui est le cas à Château Lambert. La minéralisation par des matériaux de corrosion métallique constitue le mode de conservation le plus couramment observé pour ce type de vestiges. Elle suppose un contact étroit entre un contexte métallique et le matériau organique qui est alors soit imprégné, soit recouvert de composés produits lors de la corrosion. Il s’agit d’un phénomène similaire au processus de fossilisation : le métal piège, dans sa gangue de corrosion, par migration des ions métalliques, les éléments organiques avec lesquels il est en contact.

Cette découverte confirme la richesse du site mais aussi l’ampleur des destructions occasionnées par des travaux de terrassements visant à l'installation d'un pylône.

Des recherches pluridisciplinaires

Les recherches sur le site des mines de la Grande Montagne entreprises sous l’égide du Service Régional de l’Archéologie de Bourgogne Franche-Comté avec le soutien financier du Conseil Départemental de Haute-Saône, sont dirigées par Denis Morin, archéologue et enseignant chercheur émérite à l’Université de Lorraine (ER 1132 - Sciences de l'Antiquité et du Moyen-Age).  L’équipe pluridisciplinaire qui opère sur le site est composée de plusieurs chercheurs : Catherine Lavier, archéodendromètre au Centre de recherche et de restauration des musées de France - C2RMF, Jean Sainty, ethno archéologue préhistorien, (SRA Grand-Est), Michel Cuney, géologue et directeur de recherche au CNRS – Georessources (Université de Lorraine), Hélène Morin-Hamon, archéologue (Travaux et Recherches Archéologiques sur les Cultures, les Espaces et les Sociétés - TRACES. UMR 5608 (Université de Toulouse), Ursule Babey, archéologue (Archéologie cantonale du Jura Suisse), assistée de plusieurs archéologues bénévoles : M. Courgey, P. Lacoste, M. Zimmerman, D. Dieudonné, M. Atton, rattachés à l’Équipe interdisciplinaire d’Études et de Recherches archéologiques sur les Mines Anciennes et le Patrimoine Industriel (https://www.ermina.fr/).