Sentier Ergonomie : pour une plus grande considération de l’humain dans les projets de transition écologique

 
Publié le 26/04/2022
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Sentier Ergonomie est une agence-conseil qui utilise les méthodes de l’ergonomie et de la psychologie cognitive pour aider les organisations à prendre en compte l’humain dans toutes les phases de conception d’un produit ou d'un service. Rencontre avec ses deux créateurs, Antoine Martin, docteur 2021, et Clément Colin, doctorant, de l'Université de Lorraine.

Antoine Martin et Clément Colin se sont rencontrés lors de leur thèse en ergonomie au laboratoire PErSEUs (Psychologie ergonomique et sociale pour l'expérience utilisateurs) autour d’une préoccupation commune pour une plus grande considération de l’humain dans les projets de transition écologique.

Comment est né Sentier Ergonomie ?

Application de méthodes de changements de comportement à un objet du quotidien.Nous avons commencé à travailler ensemble en 2018 sur un sujet commun à nos deux thèses : la prise en compte de la cognition dans les méthodes de prospective. Cette collaboration a été fructueuse et nous avons choisi de la renouveler en 2020, sous forme d’une recherche pour le Low-tech Lab (une association qui promeut le développement des low-tech, des technologies moins consommatrices de ressources et qui prennent davantage en compte l’impact sur l’humain et l’environnement). C’est à ce moment que nous avons réalisé que le facteur humain (représentations, biais cognitifs, utilisabilité, etc.) était trop souvent secondaire dans les projets liés à la transition écologique et, plus précisément, que l’ergonomie était relativement absente des sujets les plus porteurs de solutions (services partagés, low-tech, etc.). En octobre 2021, nous avons choisi de pérenniser nos collaborations sous la forme d’une entreprise commune.

Pourquoi avoir choisi ce nom, Sentier Ergonomie ?

D’après le dictionnaire, un sentier c’est un « chemin étroit dans la nature » ou « une voie que l’on suit pour atteindre un but ». Nous avons donc choisi le nom « Sentier Ergonomie » pour évoquer deux choses :

  • la trace de comportements répétés qui peuvent être nocifs ou bénéfiques. Il s’agit donc de réfléchir aux « sentiers » à abandonner et à ceux qu’il faut ouvrir ou baliser, en agissant, avec l’ergonomie, sur les organisations et les objets qui influencent nos comportements.
  • une volonté de sortir des « sentiers battus » de l’ergonomie, du design et de l’innovation pour être en phase avec le maintien et la restauration des écosystèmes.

On associe rarement ergonomie et environnement. Comment cette science peut-elle participer à la transition écologique ?

Atelier prospectif sur l'amélioration des méthodes de ramassage des déchets.Effectivement, nous avons fait le même constat. Des travaux existent mais ils sont peu visibles. Il faut peut-être commencer par définir l’ergonomie… L’ergonomie est une science appliquée, c’est une « discipline du génie ». L’ergonome est en quelque sorte un ingénieur humaniste, comme il y a des ingénieurs chimistes (spécialistes de la chimie). Il ou elle cherche à améliorer les interactions entre les humains et les objets en appliquant les connaissances issues de la psychologie, sociologie, anthropologie… et de ses propres recherches ! L’objectif de l’ergonome est que les interactions soient performantes et génèrent le moins d’externalités négatives possibles pour l’humain (mal-être physique et psychologique) et son milieu. Avec nos mots, « notre » ergonomie a pour objectif de concevoir des artefacts utilisables, qui prennent soin des utilisateurs et qui respectent les limites planétaires.

Dans la perspective de la transition écologique, notre vision est la suivante : une « bonne » solution technique (par exemple, l’isolation thermique) peut devenir une « mauvaise » solution à l’épreuve des usages (voir, par exemple, l’article écrit par Antoine sur l’isolation des bâtiments) : effets rebonds, détournement, incompréhension, erreur, accident etc. Bref, il faut étudier l’activité humaine (entretiens, tests utilisateurs, questionnaires, observations etc.) en amont du projet pour informer les actions du concepteur/ingénieur afin d’éviter ces problèmes.

Mais cette approche seule est insuffisante, nous pensons qu’il faut aller plus loin en faisant intervenir l’ergonomie à un niveau plus stratégique et donc plus juste et efficace (ce que certains appellent la « redirection écologique »). Par exemple, la sobriété est une approche de plus en plus considérée dans les efforts de mitigation du changement climatique. Mais comment mettre en place une stratégie de sobriété sans connaître les besoins psychologiques fondamentaux ou les conditions qui rendront une action de sobriété acceptable ? Pour beaucoup d’entreprises, c’est une question difficile ! Grâce aux théories issues des sciences humaines, l’ergonomie, en tant que science appliquée, peut intervenir de façon pertinente. Ainsi, nous développons une méthodologie dite de « négociation des besoins ». Elle a pour objectif d’aider une entreprise à mettre en place une stratégie de sobriété acceptable (à l’interne et à l’externe) sur un produit donné. Dans ces ateliers nous identifions notamment les besoins prioritaires, auxquels répondre, et ceux qui n’amèneront qu’un confort marginal, à abandonner. Des exemples concrets, comme la Convention Citoyenne pour le Climat, nous montrent que c’est la voie à suivre.

Comment accompagnez-vous les acteurs socio-économiques dans leur démarche ?

Nous proposons trois types d’accompagnements.

D’abord, des interventions de conseil : nous allons sur le terrain pour apporter une solution concrète (par exemple, collecter et classifier des problèmes rencontrés par les utilisateurs d’un service d’autopartage afin d’améliorer son utilisabilité).

Nous offrons également un panel de formations à destination des professionnels en prise avec les questions de transition écologique et qui souhaiteraient travailler sur le facteur humain (éco-conception comportementale, développement de produits low-tech, biais cognitifs etc.). Nous portons une attention particulière à la formation des jeunes générations d’ergonomes, designers et ingénieurs en intervenant en universités/écoles pour leur transmettre notre approche.

Enfin, nous proposons aux entreprises des prestations de recherche et développement « à façon » sur nos sujets de spécialité. Cette activité de R&D nous amène également à prendre part à des recherches participatives ou indépendantes (par exemple, l’année dernière nous avons mené une étude auprès de personnes expertes du low-tech afin de cartographier et de définir ce domaine méconnu) et à développer de nouveaux outils.

En termes de champs d’intervention, nous sommes spécialisés dans les domaines qui nous semblent les plus porteurs de solutions vis-à-vis de la transition : les services partagés, la redirection et la maitrise des usages, les stratégies de sobriété, le design comportemental, les low-tech et les systèmes critiques.

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