Un projet récompensé par l’Institut Universitaire de France [LEMTA 4/4]

 
Publié le 25/06/2019 - Mis à jour le 27/06/2019

Laurent Chaput a obtenu une reconnaissance de l’Institut Universitaire de France (IUF) pour ses travaux sur le calcul « ab initio » des propriétés de transport des matériaux. Ses objectifs sont maintenant de rationnaliser et d’automatiser ces calculs en les couplant à des algorithmes intelligents, afin de trouver de nouveaux matériaux, et également de les perfectionner afin de décrire les matériaux complexes s’organisant au seuil de la méso-échelle.

 

Recours à l’intelligence artificielle

Des matériaux nouveaux sont étudiés soit pour découvrir des comportements ou des effets physiques encore inconnus, et pouvant ainsi être à l’origine de nouveaux procédés industriels, soit pour améliorer une propriété physique choisie. Jusque récemment les nouveaux matériaux ont souvent été découvert grâce à l’intuition des chimistes, ou par chance, mais assez rarement grâce à une approche systématique ou rationnelle.

Une approche systématique est difficile pour plusieurs raisons. Tout d’abord il est important de remarquer que des matériaux peuvent avoir des comportements macroscopiques très différents, tout en étant très semblables microscopiquement. C’est ce qui rend la modélisation difficile : elle doit permettre de déceler ces petites différences. En d’autres termes, elle doit être suffisamment précise. A l’heure actuelle, seuls les calculs quantiques permettent d’atteindre une précision suffisante. C’est ce qui contraint les chercheurs à démarrer leur modélisation à l’échelle atomique. Ensuite, pour atteindre l’échelle du micron, qui est intéressante technologiquement et expérimentalement, il leurs faut petit à petit remonter les échelles de distances depuis l’échelle atomique. Ce passage de l’échelle microscopique à l’échelle macroscopique est aussi délicate techniquement qu’intellectuellement. C’est peut-être une des raisons pour lesquelles l’intuition est souvent mauvaise conseillère pour guider la découverte de nouveaux matériaux. Le couplage des calculs quantiques à des algorithmes intelligents permet une approche plus systématique, par exemple en s’intéressant à des matériaux que le bon sens aurait exclu.

 

L’intérêt des matériaux complexes

Les matériaux cristallographiquement complexes, les verres, ou plus généralement les matériaux présentant un désordre chimique ou structural appartiennent à cette catégorie.

En effet, il est bien connu que le désordre dégrade de nombreuses propriétés physiques, comme la conductivité électrique ou thermique. Pour certaines applications, comme en thermoélectricité avec la conductivité thermique, cela peut être bénéfique, mais la plupart du temps il est admis que, puisqu’ils ne sont pas parfaits, les matériaux désordonnés sont moins intéressants pour les applications.

Des progrès expérimentaux récents, en particulier sur les batteries, montrent que la situation est plus complexe, et qu’il est plus exact de se demander quel est l’état désordonné (expérimentalement reproductible) le plus compatible avec un matériau et une application. En d’autres termes, est-il possible d’utiliser le désordre présent dans un matériau pour dépasser les contraintes de la physique régissant les matériaux parfaits (les cristaux) afin d’en améliorer les propriétés ?

C’est à cette question que Laurent Chaput souhaite répondre avec son projet de recherche, notamment pour les matériaux thermoélectriques. Cette approche contre intuitive sera mise en œuvre par des algorithmes intelligents. La structure atomique des matériaux désordonnés étant extrêmement complexe, il devra également améliorer les méthodes de calculs des propriétés de transport connues à ce jour.

 

Un impact écologique fort

L’une des solutions aux défis environnementaux auxquels nous faisons face est l’utilisation de matériaux intelligents et moins gourmands en énergie. Les projets de recherches des équipes du LEMTA s’inscrivent pleinement dans cette démarche. Les modélisations discutées précédemment sont utilisées pour améliorer les rendements des dispositifs thermoélectriques, photovoltaïques, et les matériaux servant à la gestion de l’énergie. Ainsi, à l’Université de Lorraine, deux des solutions aux défis technologiques des prochaines années, les algorithmes intelligents, et les matériaux économes en énergie, s’élaborent mutuellement.