L’Europe finance à ce jour 8 KIC (Knowledge and Innovation Communities). Objets européens peu connus du grand public, les EIT KIC contribuent pourtant à booster l’innovation européenne sur des sujets sociétaux majeurs comme le climat, l'énergie ou encore l’approvisionnement en matières premières. L’Université de Lorraine est membre fondateur de l’une d’elles : la KIC EIT RawMaterials. Notre établissement y est représenté par Clotilde Boulanger, Vice-présidente déléguée.
Et plus récemment, depuis janvier 2019, il est partenaire de la KIC Inno-Energy qui se positionne comme le moteur de l’innovation et de l’entrepreneuriat dans le domaine des énergies renouvelables.
Entretien croisé avec Cyrille RAYMOND - Directeur de la Délégation d’ingénierie de projets (DIPro) qui a participé au montage de cette KIC et accompagne les montages de projets ainsi que ceux en cours de financement et Fabrice LEMOINE - professeur à l’ENSEM (Ecole Nationale Supérieure d’Electricité et de Mécanique), chercheur au LEMTA (Laboratoire Energies, Mécanique Théorique et Appliquée) et responsable du défi « Energies du futur » de LUE.
Quelle est la genèse et quels sont les objectifs de ces KIC ?
Cyrille Raymond : L’Université de Lorraine a participé activement de 2013 à 2015 au montage de la KIC EIT RawMaterials, au côté notamment du CEA pour la partie française. Cette KIC répond à la problématique de l’Europe sur sa dépendance et l’approvisionnement en matières premières. Il s’agissait d’un choix politique fort, les KIC ayant été identifiées comme un des dispositifs européens prioritaires pour notre établissement par Karl Tombre, alors Vice-président en charge des partenariats socio-économiques et de l'international.
C’est ce fort investissement de notre établissement dans le montage de cette KIC, en particulier de Karl Tombre et de Frédéric Villiéras, qui a permis d’obtenir qu’un des six « centres de proximité » (appelés officiellement « Innovation Hubs ») soit localisé à Metz au plus proche de l’écosystème régional avec notamment l’IRT M2P ou encore le pôle Materalia.
Voici quelques éléments que l’on peut faire ressortir des objectifs et des caractéristiques de l’EIT RawMaterials :
- une réponse à la problématique sociétale d’approvisionnement en matières premières et à la dépendance de l’Europe ;
- un périmètre complet : exploration, extraction, recyclage, économie circulaire, substitution de matériaux critiques ou toxiques ;
- plus de 120 membres du monde académique, industriels et de la recherche ;
- une entité organisée en 6 centres dont celui basé à Metz ;
- des financements pour des projets notamment de formation et d’innovation sous forme d’appels à projets.
Fabrice Lemoine : Notre implication dans cette communauté date de janvier 2019. Elle se structure autour du défi « Energies du futur » de LUE. Les activités proposées par la KIC concernent le financement de projets d’innovation, la participation à une « master school » européenne, ainsi qu’à une « PHD school » (près de 50 doctorants actuellement). Des modules sur l’entrepreneuriat, l’innovation et le business dans le domaine de l’énergie, à destination des doctorants sont dispensés et une mobilité de 4 à 10 mois à l’étranger (entreprise, institution de recherche) peut être financée. Des jeunes start-up peuvent également être accompagnées sur un modèle d’actionnariat.
Quelle est la plus-value pour l’Université de Lorraine ?
C.R : Tout d’abord, l’engagement de l’établissement comme membre fondateur permet de contribuer à la visibilité de l’expertise scientifique et pédagogique du site lorrain sur les champs concernés. C’est aussi un large réseau sur lequel nos enseignants-chercheurs peuvent s’appuyer pour développer des coopérations européennes, notamment par le biais des réponses aux appels à projet de l’EIT RawMaterials. Enfin, les KIC constituent des organes d’influence sur les futures politiques européennes. L’enjeu est donc de peser sur elles et d’être au fait des politiques européennes de demain.
F.L : Outre une présence importante à Bruxelles afin d’influencer les politiques de l’Europe, nous envisageons de proposer des modules dans deux master KIC en cours de montage « Energy Storage et « Circular Economy » qui incluent les aspects portant sur les aspects cycle du carbones (capture, stockage, valorisation du CO2). Nous avons déposé en février dernier le projet de Master Erasmus MUNDUS «Decentralized Smart Energy SYstems » DENSYS, dans le cadre du projet Impact ULHyS, avec trois partenaires académiques de la KIC, la KIC étant elle-même partenaire associé. Ce master pourra, au terme de 5 ans, intégrer le giron de la KIC, ce qui permettrait d’assurer une certaine pérennité.
Pouvez-vous nous présenter des projets qui ont déjà été développés ou en cours de développement?
C.R : Eurocore (European Core sample training), coordonné par Anne-Sylvie André Mayer
Porté conjointement par le laboratoire GéoRessources, l’École nationale supérieure de géologie (ENSG) et le département Géosciences, ce projet pédagogique vise à former les étudiants se destinant à l’exploration minérale, aux outils portables de caractérisation des carottes de forage (chimie élémentaire, minéralogie, structure…) ainsi qu’à l’utilisation des bases de données générées. Les partenaires européens sont le GTK (un centre de compétences finlandais en ressources géologiques), Fraunhofer (un institut allemand spécialisé́ dans la recherche en sciences appliquées), l’Institut polytechnique de Madrid (Espagne) ainsi que l’Université́ de Tallin (Estonie).
MagNet, coordonné par Thomas Hauet
Porté par l’Institut Jean Lamour, il s’agit de mettre en place un réseau européen de plateformes de magnétométrie regroupant dès son démarrage des partenaires situés en France, Belgique, Italie, Espagne, Allemagne, Pologne et Pays-Pays. Sont notamment partenaires ArcelorMittal Maizières Research, le CEA, l’Institut polytechnique de Grenoble, KU Leuven (Université Catholique de Louvain), l’Université de Bordeaux et de Liège.
Le projet consiste à élaborer une offre de service commune, véritable vitrine pour valoriser les plateformes techniques et expertises du consortium. L’objectif est double : faire émerger des collaborations diverses (prestations de recherche, projets collaboratifs, etc.) et former une communauté R&D académique-privé autour du magnétisme et de la magnétométrie.
F.L : Dans le domaine de l’innovation, l’université va proposer des projets sur les capteurs solaires thermiques, porté par l’Institut Jean Lamour, en lien avec l’entreprise Viessmann. Un second projet porté par le LEMTA vise le développement d’une architecture de pile à combustible innovante (en maturation avec la SATT- SAYENS), ce sera une belle opération de coopération entre la SATT et la KIC, sur des niveaux de maturité complémentaire.
En matière de formation, dans le cadre du projet Impact ULHyS, une summer-school internationale sur l’Hydrogène a été organisée en juillet 2018, les prochaines éditions pourront bénéficier des apports du réseau Inno-Energy : diffusion sur une maille européenne, intervention d’industriels partenaires du réseau KIV, …
A venir, le 25 juin 2019, de 9h30 à 12h un séminaire Inno-Energy se tiendra à la présidence Léopold à Nancy. Il est ouvert à tous, sur inscription.
Nous vous communiquerons les détails très prochainement.