Les équipes d’accompagnement à la Science Ouverte (Publications Ouvertes, Données de la recherche et Codes et Logiciels) vous proposent de découvrir en 2024/2025 les portraits de chercheurs et chercheuses du site universitaire lorrain engagé·es en faveur de la Science Ouverte. Pour ce huitième portrait, nous sommes partis à la rencontre de deux chercheurs engagés dans l’édition de revues diamant (gratuites pour les lecteurs et pour les auteurs) : Jérôme Moritz (IJL), rédacteur en chef de la revue Open Plasma Sciences et Barbara Palli (IFG), rédactrice en chef de la Revue des Plateformes Numériques.
Vous avez lancé une nouvelle revue ouverte sur le modèle Diamant. Comment avez-vous été accompagné ?
Jérôme Moritz : Cette aventure a commencé en fait grâce aux services de science ouverte de l’Université de Lorraine. Étant référant HAL de mon équipe de recherche, j’ai pu échanger avec plusieurs personnes de ce service sur les problématiques liées à l’édition scientifique, notamment sur les frais de publications et leur implication sur nos contrats de recherche mais aussi sur les revues prédatrices, leur manière agressive de démarcher les chercheurs et les chercheuses et leur manque de déontologie. Cette digression dans la conversation a fait germer de mon côté l’idée de m’intéresser à la publication en mode diamant, gratuite pour les autrices et les auteurs ainsi que les lecteurs et les lectrices.
Après une petite recherche et ayant remarqué l’absence de ce mode de publication dans ma communauté – la science des plasmas – j’ai repris contact avec les services de science ouverte de l’UL afin d’explorer les différentes possibilités qui étaient offertes au niveau des plateformes supports à l’édition scientifique. J’ai finalement été accompagné dans le dépôt du dossier de candidature à Episciences qui est une plateforme d’édition cogérée par le CNRS, l’INRAE et l’INRIA et dans la création du projet éditorial. Aujourd’hui que la revue « Open Plasma Science » existe et a commencé de publier ses premiers articles, les services de l’UL m’accompagnent toujours – fort heureusement – depuis les aspects communication et site web jusqu’au copy editing.
Barbara Palli : Il ne suffit pas de vouloir s’engager dans une démarche de Science Ouverte, encore faut-il y être accompagnée de façon pertinente. J’ai eu pour ma part la chance d’y avoir été très bien accompagnée aussi bien par mon laboratoire de recherche, l’IFG que par la direction de la documentation et du numérique de l’UL. Tout d’abord, le laboratoire a mis à disposition du projet de revue un ingénieur spécialisé dans l’édition numérique à hauteur de 26% de son temps. Cet apport a été considérable, d’autant plus que Pierre Peraldi a fait preuve d’une compétence et d’un engagement à l’égard du projet hors normes.
Puis, la direction de la documentation nous a proposé un appui constant tout au long de la période de gestation du projet : entre fin 2023 et aujourd’hui. Trois personnels nous ont accompagnés d’abord dans la préparation de notre candidature en vue de l’obtention d’un financement FNSO, ensuite durant le processus d’évaluation de notre candidature par la plateforme d’hébergement proposée par l’Université de Bordeaux et enfin durant toute la période des tests et de mise en production de la Revue des Plateformes Numériques. Par ailleurs, l’Université de Lorraine a financé le coût de notre hébergement sur la plateforme OUJ et nous a accordé, encore récemment, une aide supplémentaire pour assurer la publicité de la Revue. On n’aurait jamais réussi sans cet accompagnement qui nous a véritablement portés.
En bref, que représente la science ouverte pour vous ?
Jérôme Moritz : La science ouverte représente pour moi un retour à une certaine forme de logique. La recherche publique étant financée par les états et donc par les contribuables, il est normal que les données qu’elle produit leur reviennent et leur soient pleinement accessibles sans être phagocytées par de gros éditeurs scientifiques cotés en bourse dont la contribution à la communication scientifique devient de plus en plus discutable.
Barbara Palli : La connaissance fait, à ne pas douter, partie du patrimoine commun de l’humanité. En tant qu’enseignant chercheur, j’estime que si la connaissance a une valeur – en principe inestimable - elle ne devrait pas avoir de prix. Il n’y a rien de plus frustrant pour un chercheur que d’identifier un article ou un chapitre d’ouvrage dont il aurait absolument besoin dans ses recherches et de constater qu’il doit payer ou attendre des semaines, au mieux, voire des mois pour obtenir l’accès à ces ressources. Rien de plus plaisant en revanche, lorsqu’on découvre que l’on peut accéder directement et gratuitement à ces ressources.
Je me suis engagée dans une démarche de Science ouverte avec la revue RPN pour pouvoir offrir cette accessibilité directe et gratuite à tous ceux et à toutes celles qui font confiance, comme moi, à la Science Ouverte et s’intéressent à la plateformisation de l’économie et au numérique. Mais ma démarche va plus loin, elle cherche à développer une vertu pédagogique à l’égard de ceux et celles qui ne sont pas encore convaincu·e·s par la Science Ouverte mais pourraient se laisser convaincre.
Mon engagement est à ne pas douter militant. J’avais envie de contribuer à mon niveau à un changement des pratiques dans le domaine juridique. En effet, la plupart des revues juridiques sont payantes (pas pour les auteurs mais pour les utilisateurs). Si les auteurs sont rétribués modestement pour leurs publications, celles-ci sont soumises à un embargo durant une année. De surcroît, la plupart des revues juridiques publient des articles sur commande et pratiquent assez peu - en tout cas pas systématiquement - l’évaluation par les pairs. Les revues de Science Ouverte modèle diamant assurent en revanche une totale gratuité et une évaluation systématique des publications. Elles contribuent ainsi à l’intégrité et à la qualité scientifique.