PlaceS des femmes dans l’univers sportif : réalitéS et perspectiveS

 
Publié le 6/03/2015 - Mis à jour le 16/03/2015
Affiche du colloque "PlaceS des femmes dans l’univers sportif : réalitéS et perspectiveS"

Les 13 et 14 mars 2015 s'est tenu le colloque PlaceS des femmes dans l’univers sportif : réalitéS et perspectiveS à l'IRTS de Lorraine à Ban Saint Martin.
Sabrina Sinigaglia-Amadio, maîtresse de conférences en sociologie au sein du département de sociologie de l'UFR Sciences humaines et sociales - Metz et chercheuse au Laboratoire lorrain de sciences sociales (2L2S) nous présente les enjeux et les objectifs de cette étude.

Sabrina Sinigaglia-Amadio : Ce colloque a vu le jour parce que certains travaux du laboratoire dans lequel je développe mes recherches,le 2L2S, ont rencontré les intérêts et les préoccupations du comité départemental olympique et sportif et de la délégation départementale aux droits des femmes et à l'égalité de la Moselle ainsi que du service sport de la direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale. Ses enjeux et objectifs sont essentiellement de permettre la rencontre de chercheurs, de professionnels et d’amateurs des mondes sportifs (entraineurs, arbitres, responsables de fédération, sportifs et sportives, bénévoles, etc.) et de responsables de la question sportive au sein de collectivités territoriales pour les faire débattre de “questions de terrain” et de résultats de recherche pensant la/les place/s des femmes dans les mondes du sport. 

Quelles thématiques ont été abordées au cours du colloque ?
S. S.-A. : Quatre thématiques principales ont été abordées (chacune traitée sur une demi-journée). Nous pouvons les résumer rapidement de la manière suivante :
1) les freins et leviers politiques concernant la reconnaissance et la légitimité des femmes dans l’univers sportif, avec une focale sur l’accès des femmes aux responsabilités dans ces espaces sociaux ;
2) les contraintes socio-spatiales et temporelles qui peuvent freiner/favoriser la pratique sportive des femmes ;
3) la question des corps sportifs et de leur construction sociale et biologique pour précisément penser l’articulation fondamentale de ces deux dimensions (l’une ne suivant pas l’autre, mais étant intrinsèquement articulée à l’autre) ;
enfin, 4) la dernière thématique vise à questionner la division genrée des mondes sportifs, filles et garçons, femmes et hommes n’évoluant que très rarement dans les mêmes sphères, tant concernant les modalités ou objectifs de pratiques (sport santé, sport loisir, pratique compétitive et de haut niveau) que dans les sports pratiqués (équitation, gymnastique, football, rugby, boxe …).

Sur quoi porte votre intervention ?
S. S.-A. :
Mon intervention a introduit la dernière demi-journée, consacrée à la division genrée des mondes sportifs. Pour expliciter ce constat, j’analyserai le processus de construction sociale du goût pour le sport. Nous verrons qu'il n’est pas plus inné que celui pour la littérature, le vin ou les jeux vidéo. Il se construit dans la fréquentation plus ou moins régulière, intense et familière de ce monde sportif mais aussi dans les autres espaces et groupes sociaux qui participent à notre socialisation : la famille, l’école, les groupes de pairs, l’environnement médiatique, socioculturel et politique. Nous verrons dès lors que ce goût pour le sport n’est pas exactement construit de la même façon en direction des filles et garçons. Et ce traitement différencié contribue à la légitimation de la division genrée des pratiques sportives.

Quelle est aujourd’hui la place des femmes dans le monde sportif et comment évolue-t-elle ?
S. S.-A. :
C’est toute la question du colloque ! Si nous avons choisi de lui donner le titre suivant : PlaceS des femmes dans l’univers sportif : réalitéS et perspectiveS avec des « S » majuscules, c’est précisément pour souligner la pluralité des places, des réalités et des perspectives en la matière. Il n’y a donc pas une seule réponse à cette question. Si l’on s’intéresse à la visibilité et la médiatisation du sport au féminin, par exemple, on fait le constat d’une faible place relativement au sport au masculin ; bien que l’on ait un nombre croissant de femmes journalistes sportifs. Qui plus est, régulièrement, les médias relaient (ou alimentent) des cas de sexisme dans le sport, érotisant le corps des sportives, s’offusquant que l’on confie l’entrainement d’une équipe de football masculin à une femme ou, comme Bernard Lacombe (dirigeant de l’Olympique lyonnais) en mars 2013, refusant de « parler de foot avec les femmes » (« Je ne parle pas de foot avec les femmes, c’est ma vision des choses. Qu’elles retournent à leurs casseroles »). Si l’on observe maintenant qui occupe les postes à responsabilités au sein des fédérations sportives, on voit là encore que les femmes sont en minorité – même dans les fédérations où les pratiquantes sont nombreuses (c’est ce fameux plafond de verre qui existe dans d’autres espaces sociaux – politiques, économiques, scientifiques – qui empêche les femmes d’accéder aux plus hauts niveaux de responsabilité) : 11% des présidents de fédération sportive et 11% des entraineurs nationaux, 8% des directeurs techniques nationaux et 19% des conseillers techniques régionaux sont des femmes. Pour prendre un dernier exemple dans le champ des pratiques sportives, on constate ici une grande variabilité des rapports femmes/hommes avec des sports qui continuent d’être associés au masculin, au féminin ou vus comme relativement mixtes mais on observe également certaines transformations, certaines lignes bougent… Par exemple, la fédération française de football indique une évolution assez spectaculaire de ses effectifs féminins : au lendemain de la reconnaissance de la section féminine de football, on recense un peu plus de 2000 licenciées en 1970, 30 000 en 2011 et en 2014, on atteint 75 000 (la FFF espère passer la barre des 100 000 licenciées en 2015). Beaucoup d’autres aspects seraient également à considérer. Donc, on ne peut pas conclure à une évolution unique, allant vers une égalité de traitement entre les sexes ou confortant plutôt les inégalités. L’univers sportif n’est définitivement pas un monde à part, il rassemble les mêmes tensions et paradoxes que les autres espaces sociaux.

Programme du colloque

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