Quidam.e.s : le féminisme pour tout.e.s - Rencontre avec Liza Hammar [VOS ASSOS #13]

 
Publié le 27/11/2018 - Mis à jour le 4/01/2023

Rencontre avec Liza Hammar, membre de Quidam.e.s qui nous explique ce qu'est le féminisme intersectionnel et nous présente les futures actions de son association.

Quel est ton parcours au sein de l’université ?

Je suis étudiante en lettres modernes, j’ai fait ma première année  à Nancy et ensuite j’ai continué à Metz, actuellement, je suis en Master 1 Littératures et médiations, parcours recherche.
L’association est plutôt basée à Nancy mais compte aussi des membres à Metz, les actions peuvent d’ailleurs être organisées dans les deux villes.
 

Comment est née l’association ?

A l’origine, une jeune fille recherchait une association féministe intersectionnelle dans la région, à Nancy. C’était l’année dernière, dans le contexte d’une polémique autour d’agressions sexuelles. Il y avait beaucoup de harcèlement, avec des descriptions d’individus qui laissaient penser qu’il s’agissait des mêmes. Ça devenait un peu dangereux pour les étudiantes de rentrer à la résidence à côté du campus. De là, une jeune fille a publié son souhait de trouver une association féministe sur facebook.
 

Et pourquoi intersectionnelle ?

On sait qu’il y avait déjà des associations féministes à Nancy mais elles ne répondaient pas aux critères de la jeune fille. C’est à ce moment-là qu’on s’est dit qu’on allait la créer.
« Intersectionnelle » parce que on voulait que toutes les femmes et minorités de genre se sentent représentées, qu’elles se sentent à l’aise. L’Intersectionnalité a envie de reconnaître les croisements entre différentes discriminations pour rendre compte d’une réalité sociale et répondre à la complexité du terrain : les femmes et minorités de genre sont divers et diverses et ont des trajectoires diverses. 

 

Et au sein de l’association tu as quel rôle ? 

Nous avons un système collégial. Le collège est composé de 6 personnes élues pour 6 comités. Mais tous les membres sont aussi impliqués, en dehors de cette attribution administrative.
Les comités sont répartis entre type de discrimination. L’idée c’est que l’ensemble de l’association est féministe, la base c’est bien le féminisme, et les comités représentent des branches qui s’intéressent à diverses questions, avec notamment : l’islamophobie (c’est là mon principal rôle, à titre personnel), le décolonialisme et le racisme, le validisme (discrimination envers les personnes en situation de handicap), les questions LGBTI et la transphobie – qui se différencie de la question globale LGBTI+.
 

Depuis la création de l’association l’année dernière, quelles ont été vos actions ?

On a mis du temps à mettre en place une équipe stable. La première action a été la participation à une journée de solidarité avec l’asssociation SEER – avec une collecte d’objets, vêtements, en tenant en compte les besoins spécifiques des femmes.
Ensuite on a organisé des cafés-débats, avec une cinquantaine de personnes, et différents thèmes : l’appropriation culturelle, voile et féminisme, les questions LGBTI et il y en a un en préparation sur l’hypersexualisation des femmes racisées (ségrégation autour du corps des femmes non blanches)
Et nous organisons aussi des conférences. La première était avec Françoise Vergès, le mois dernier, sur la nécessité d’un féminisme intersectionnel justement. Ca rejoint notre volonté de mettre en lumière quelque chose de neuf plutôt que de se baser sur une tradition féministe classique.
Courant février, on prépare une table ronde, avec comme idée de réunir des féminismes décoloniaux, et voir leurs points d’accords et de divergences.
Courant avril, mai,  le thème sera plutôt sur les questions LGBTI et la difficulté à les conjuguer avec les questions de racisme. Il faudra aussi revenir sur la construction du genre, en Occident ou ailleurs, pour montrer que notre conception du genre actuel n’est pas inée. Il s’agira, pour boucler le cycle de conférences, d’articuler bon nombre de questions : celle du genre, de la race mais aussi celle de l’orientation sexuelle et des imaginaires autour de ces différentes identités.
 

Pour quelles raisons tu t’es engagée ?

Je me situais déjà dans un féminisme intersectionnel. Le féminisme « mainstream » est plutôt dans le rejet de ce que je suis. On m’a très vite fait remarquer que mon voile ne serait pas féministe… Or, je suis profondément féministe et je tiens à défendre les droits et la dignité de chacun et chacune pour une société plus juste.
 

Quels sont les objectifs de l’association ?

Comme on s’adresse d’abord aux étudiants, il y a un aspect éducatif, le but est d’ouvrir le dialogue. On se rend compte lorsqu’on aborde ces sujets que les gens ne savent pas de quoi il s’agit. Généralement, on me demande déjà ce que c’est que le féminisme intersectionnel.
Alors il faut populariser toutes ces notions, ouvrir le débat, tout simplement. Et apporter aussi des connaissances historiques et sociologiques. C’est pour ça qu’on a jugé intéressant d’inviter Françoise Vergès qui est historienne, pour qu’elle fasse un panorama de toutes ces questions et que les gens puissent comprendre pourquoi on se situe dans ce féminisme actuellement.

 

L’idée du féminisme intersectionnel est donc de montrer qu’il y a des différences mais qu’on peut se rejoindre sur la question du féminisme ?

C’est une volonté de s’ouvrir. L’Intersectionnalité vise à reconnaître les discriminations dans leur ensemble et à tenir compte de toutes les discriminations pour mener à bien la lutte contre celles-ci. Il s’agit de se battre pour toutes les personnes victime de misogynie, sans exclusion et sans paternalisme.