Un financement ERC Proof of Concept pour Silvia Lasala avec le projet CREATIVE

 
Publié le 3/02/2025

Silvia Lasala est maîtresse de conférences au LRGP (CNRS – Université de Lorraine) et enseignante à l’ENSIC. Avec son équipe, elle consacre son activité de recherche au développement d’une nouvelle génération de centrales électriques et de pompes à chaleur utilisant un fluide de travail réactif.

Il y a trois ans, son projet de recherche REACHER (Reactive fluids for intensified thermal energy conversion) avait été gratifié d’un ERC Starting Grant. Une bourse d’excellence destinée à accompagner et financer des chercheurs au parcours remarquable, au début de leur carrière. En ce début d’année 2025, Silvia Lasala vient d’obtenir un nouvel ERC, Proof of Concept cette fois, pour explorer le potentiel sociétal de son nouveau projet : CREATIVE (Carboxylic acids as REAcTIVE refrigerants to make heat pumps efficient).

En 2022, vous aviez obtenu un premier ERC pour le projet de recherche REACHER. Rétrospectivement, avez-vous atteint les objectifs que vous vous étiez fixés ? 

Silvia Lasala : « Nous sommes à la moitié du projet REACHER qui procède comme prévu : j'ai pu recruter un certain nombre de personnes pour l'équipe et un dernier postdoc devrait arriver bientôt. En termes d’équipement, nous avons pu faire l’acquisition d’un spectromètre Raman et financer la réalisation d’un pilote. Scientifiquement, une partie des objectifs ont aussi évolué en cours de route : à l’origine, nous avions pensé à une famille de fluides où l’on casse ou forme (selon la direction de la réaction) une liaison covalente. Toutefois, lors de ces recherches, nous avons trouvé une deuxième famille de fluides réactifs qui nous intéressait : les acides carboxyliques. Dans ces acides, une réaction similaire de dimérisation a lieu mais, les liaisons impliquées dans la réaction sont de type hydrogène. Nous ne pensions pas nous concentrer sur cette dernière famille de fluides et malgré tout, nous avons aussi commencé à travailler dessus. »

Qu’est-ce qui vous a amené à vous orienter vers cette famille de fluides ?

S.L. : « Un point d’intérêt est que ces fluides réactifs sont produits actuellement. Cela les distingue des autres fluides réactifs que nous avons conçu -sur papier- toujours dans le cadre de REACHER et qu’il nous faut encore trier pour déterminer lesquels pourront être produits ou non. Pour cela, nous travaillons avec des industriels. »

CREATIVE vient donc d’être gratifié de l’ERC Proof of Concept. Ce projet s’inscrit-il dans la continuité de REACHER ?

S.L. : « REACHER est le projet de base qui a fourni les fluides réactifs, les outils pour caractériser leurs propriétés thermodynamiques, définir les architectures optimales des cycles de puissance, et réaliser un pilote permettant d'effectuer les premières observations. CREATIVE, c'est la première étape pour aller vers un pilote de pompe à chaleur.Son objectif est d’apporter la preuve de la faisabilité du projet et de monter en TRL*. L’une des difficultés notables que j’ai pu remarquer avec REACHER, c’est que pour prouver des concepts nouveaux (par exemple, une centrale électrique à fluide réactif), j’ai dû utiliser des technologies de turbine et de compresseur adaptées aux fluides de l’état de l’art, c’est-à-dire à des fluides inertes. Grâce à CREATIVE, qui est exclusivement centré sur les pompes à chaleur résidentielles, nous pourrons adapter un compresseur du commerce pour qu'il puisse utiliser des acides carboxyliques. Cette étape est nécessaire pour la suite. »

Pouvez-vous nous en dire plus sur CREATIVE et quels vont être les jalons de ce nouveau projet ?

S.L. : « Pour CREATIVE, l’analyse thermodynamique de base est effectuée afin d’évaluer l'impact de l'utilisation des fluides dans les cycles thermodynamiques résidentiels, grâce à des modèles qui viennent de REACHER. Il y a ensuite une partie expérimentale lors de laquelle nous achetons des compresseurs et les modifions avec un collaborateur. L'objectif est aussi d'adapter ces compresseurs à l'usage des acides comme l'acide formique et l'acide acétique. Pour ce faire, il faut qu’ils puissent être utilisés à de pressions sous-atmosphériques, avec des fluides qui peuvent être corrosifs pour certains matériaux. Au cours de ce projet, SATT Sayens définira une stratégie de propriété intellectuelle et une démarche de valorisation de nos résultats. »

Quels seraient vos conseils pour un·e candidat·e à l’ERC ?

S.L. : « Quand l’on décide de demander un ERC, il faut le faire avant tout dans l’intérêt de la construction du projet, de façon à ce que l’on puisse, même si le projet n’est pas retenu, le développer d’une autre manière. Que l’on ait le financement ou non, ce qui change au final, c’est le temps que cela prendra à se développer et à créer l’équipe autour de cette thématique. Deux derniers conseils : être le plus quantitatif possible dans l’estimation de l'impact du projet et, surtout, vivre cette aventure en s’amusant. »


*Technology readiness level

En 2022, Silvia Lasala avait répondu aux questions de Factuel quant à l’obtention de son premier ERC Starting Grant. Retrouvez l’article dans son intégralité.