Vingt enseignant·es de l’Université de Lorraine au Campus de la Transition : une expérience hors-du-commun

 
Publié le 30/05/2024
Le groupe d'enseignantes et d'enseignants participant au campus de la Transition

Du 22 au 24 mai 2024, 20 enseignantes et enseignants se sont rendus au « Campus de la Transition» à Forges (77), un lieu qui se veut un espace de formation et d’échanges, un laboratoire d’expérimentation sur la transition écologique. Retours sur l’expérience par Guillain Mauviel, vice-président Transition écologique (TE), et les participantes et participants.

« Cette formation avait débuté par 2 journées à Nancy en avril. Son objectif est de nous permettre de faire évoluer nos enseignements pour qu'ils soient davantage en phase avec les enjeux écologiques et sociaux. Cela porte d’abord sur les contenus. Dans ce sens, nous avons assisté à  des cours éclairants dans différents domaines liés à la transition écologique dont Érosion de la biodiversité avec Luc Abbadie, Redirection écologique avec Alexandre Monnin, Inégalités sociales, discriminations et dérèglement climatique : décloisonner les approches avec Noémie Paté, parmi d’autres. Mais l’approche pédagogique  revendiquée par le Campus va au-delà de la seule cognition, pour faire appel également à des dimensions émotionnelles et corporelles (approche « tête-corps-coeur »). Dans ce sens, nous avons aussi eu le droit à des petits jeux sérieux (réutilisables avec nos étudiants…), à une visite du grand potager en permaculture, à une explication sur le fonctionnement des douches solaires et de la nouvelle chaudière à bois-bûches, à des échanges avec des habitants permanents de l’écolieu et à des moments de vaisselle collective…

Via leurs activités de formation, de participation à des projets de recherche et de publications d’ouvrages, différentes facettes de la transition écologique sont testées et vécues grandeur nature dans cet écolieu (fondée entre autres par des enseignants-chercheurs en 2018). Tout cela avec l’humilité de reconnaître que ce n’est pas toujours simple et la volonté de ne pas se marginaliser du reste de la société. A titre d’exemples, les habitants ont renoncé à la cuisine solaire qui ne permettait pas de cuisiner de manière satisfaisante pour l’ensemble des personnes accueillies (résidents et groupes de formation en même temps). Par contre, toutes les recettes sont végétariennes (et succulentes !), tandis que la sobriété énergétique fait l’objet de différentes actions permettant une consommation assez faible d’électricité et de bois de chauffage, alors que la rénovation thermique du château et des autres bâtiments est loin d’être terminée.

Voici quelques témoignages des participants, qui, je l’espère, vous donneront envie de suivre ce type de formation. Pour vous tenir informé, n’hésitez pas à demander votre inscription à la communauté "Formation RSE" de l’Université de Lorraine en écrivant à francoise.bronkart@univ-lorraine.fr

Helmut Meiss, IUT Nancy-Brabois (agronomie, écologie, pédologie)

« Les personnes que nous avons pu rencontrer nous ont donné l’impression qu’elles sont sur un bon chemin avec leurs approches mélangeant réflexions théoriques et applications pratiques dans un esprit ouvert, évitant des pièges possibles tels que l’ésotérisme ou le greenwashing (stratégie marketing abusive). Leur volonté d’être à la fois radical (dans le sens d’attaquer des problèmes à leurs racines, en cherchant et mettant en œuvre des solutions techniques et sociales alternatives) tout en restant non-marginale, donc « accessible » par la société majoritaire nous semble bien réussi . N’hésitez pas à faire un (dé-)tour sur le site, à Forges ou sur internet. »

Emmanuelle Simon, IUT Thionville-Yutz (sciences de l’information et de la communication)

 « Une formation, qui permet d’engager un dialogue avec d’autres disciplines, aussi bien celles de mes collègues présent·es (à table ou en faisant la vaisselle ;) qu’au regard des conférences suivies. Je pense en particulier à celle de Luc Abbadie qui, en bon vulgarisateur, m’a amené à (presque) tout comprendre sur la biodiversité et en quoi elle est une assurance pour la vie. Cette formation dans un tiers-lieux, loin des urgences universitaires, avec le temps donné au dialogue, est ce dont nous avons besoin pour accompagner autrement nos étudiant.e.s dans la compréhension des enjeux systémiques du changement climatique.»

Aramis Marin, IAE Metz School of Management (sciences de gestion)

« Cette formation a été une expérience très enrichissante pour moi. Cette opportunité m’a permis de sortir de mes routines habituelles et d’expérimenter un mode de vie plus sobre. J’ai pu remettre en perspective mon rôle de chercheur et d’enseignant, ce qui m’a permis de voir mon travail sous un nouvel angle. J’ai été profondément inspiré par cette expérience et je suis déterminé à continuer à contribuer à cette petite communauté d’enseignants qui aspire à faire les choses différemment. Nous cherchons à agir simplement, de manière responsable, pour le bien de nos étudiants et de notre planète, la seule et unique que nous connaissons à ce jour comme habitable. Cette expérience m’a rappelé l’importance de notre mission et m’a donné une nouvelle énergie pour poursuivre ce travail essentiel. »

Cédric Laurent, ENSEM (mécanique)

 « Une occasion unique de faire un pas de côté pour donner un peu d’oxygène à nos pratiques et les structurer autour des enjeux VRAIMENT prioritaires. Tout dans le campus peut devenir l’objet d’une question scientifique et un enjeu de société, ce qui redonne du sens à nos missions d’enseignants-chercheurs et au rôle de l’Université dans la société. »

Aurélie Pirat, IUT de Metz (commerce)

« Cette formation, unique en son genre, m’a permis de mieux comprendre ce que signifie la transition écologique : une compréhension fine et globale des enjeux et des défis pour notre planète, un engagement individuel qui doit trouver tout son sens dans l’action collective et dont l’objectif est de réussir la « redirection écologique » théorisée par Alexandre Monnin. Le Campus de la Transition, dans ce qu’il propose comme enseignements pratique et théorique, nous forme à devenir des acteurs de cette redirection écologique, laquelle tente de « réencastrer les activités dans les limites planétaires ».  L’immersion dans le Campus de la Transition, dans son mode vie, son souci de penser chacune de ses actions au regard de l’impact négatif ou positif que celles-ci pourront avoir sur le Vivant, nous invite à vivre de l’intérieur ce que signifie vraiment évoluer dans un espace socialement juste et écologiquement sûr pour tous (Théorie du donut de Kate Raworth). Ce que je retiens des contenus très riches des conférenciers :

  • la transition écologique n’est pas qu’un phénomène d’ordre physique et géo-biologique. Pour être réussie, elle doit relier les enjeux environnementaux et climatiques aux enjeux sociaux (principalement d’égalité au sens large). Toute crise écologique est aussi une crise sociale. Penser une transition écologique juste est une garantie de réussite et d’acceptabilité par les populations. (Noémie Paté, Julien Bueb)
  • l’histoire de l’atmosphère est intimement liée à celle du vivant, laquelle est d’une extrême complexité. Chaque action humaine a des conséquences connues et inconnues sur le Tout. Cultiver une vision globale et maximiser la diversité à tous les niveaux pourraient permettre de rétablir nos écosystèmes sans lesquels nos sociétés s’effondrent (Luc Abbadie).
  • la transition n’est pas qu’une question énergétique, elle est aussi une question démocratique et éthique. La socio-écologie est l’avenir, la croissance non. Les maîtres-mots pour réussir individuellement et collectivement la transition sont : sobriété-efficacité-renouvelables (Julien Bueb, directeur de transition bas carbone à Saint-Dizier où il essaie, avec une équipe, de mettre en œuvre une stratégie de sobriété et travaille sur un récit fédérateur et inclusif).
  • la transition renvoie à des enjeux d’adaptation (certaines activités sur nos territoires vont disparaître, conséquence du dérèglement climatique et de la pression exercée par l’humain sur l’environnement) et à des enjeux d’atténuation (à quoi allons-nous devoir renoncer pour maintenir une forme de viabilité sur terre ?). (Alexandre Monnin). »

Sophie Béreau-Gnabo, Faculté de droit, sciences économiques et de gestion de Nancy (économie)

« Cette formation, au-delà de ses contenus (alternant habilement sciences expérimentales et formelles et sciences humaines et sociales dans une logique de complémentarité où enjeux environnementaux sont interdépendants de questionnements sociétaux), a été l’occasion d’interroger nos enseignements actuels, de réfléchir, au travers d’ateliers pratico-pratiques, à comment, même sur des thématiques très éloignées, il est possible et nécessaire d’introduire des éléments propres à la TE . Nous avons également réfléchi et mis en pratique des approches d’enseignement collaboratif extrêmement intéressantes. Nous ressortons de là galvanisés, gonflés à blocs, avec des envies et des projets plein la tête pour accompagner au mieux nos étudiants vers ce futur désirable qui reste en grande partie à construire collectivement. »


Debout, de gauche à droite : Gilles Halin, Helmut Meiss, Yann Gunzburger, Hakim Boudaoud, Cédric Laurent, Philippe Oudin, Valérie Lelièvre, Xavier Henry, Emmanuelle Simon, Viviane Vaillard, Khadija Mnasri-Mazek, Aurélie Pirat, Sophie Béreau-Gnabo, Annick Thimon, Corinne Guingamp, Aramis Marin, Carole Wernert, Tom Renault (l’organisateur). Accroupis, de gauche à droite : Manon Valtier (la stagiaire), Guillain Mauviel, Vincent Huault, Laurence Mansuy-Huault