C’est une surprise pour Emmanuelle Simon, ingénieur de recherche au Centre de recherche sur les médiations (CREM) lorsque le rhumatologue Didier Poivret qui l’a sollicitée pour élaborer une évaluation du protocole SIOUX, lui annonce que leur étude est lauréate du prix de la recherche clinique du CHR Metz-Thionville. « Les trois autres finalistes étaient tous issus des sciences médicales » observe-t-elle. C’est pourtant le projet "COM-PATIENTS : Comprendre les comportements et les savoirs des patients dans le contexte du protocole SIOUX" qui a été choisi par le CHR Metz-Thionville, dans le cadre d’un financement destiné à encourager les collaborations entre les Centres hospitaliers régionaux (CHR) mosellans et le monde de la recherche.
Des traitements parfois négligés
Emmanuelle Simon a été sollicitée pour porter un regard anthropologique sur le problème de l’observance des prescriptions médicales par les patients qui souffrent d’ostéoporose. La demande provient d’un constat faits par les rhumatologues : « Les traitements de l’ostéoporose sont très efficaces : ils réduisent de 60% les risques de fractures à condition d’être associés à des comportements particuliers (alimentation, activité physique…). Mais après un an, lorsque les patients se sentent mieux, la prise des médicaments peut paraître inutile, alors qu’évidemment, elle ne l’est pas… » explique-t-elle.
Le protocole SIOUX entend apporter différentes réponses à ce problème :
- Un carnet de santé que le patient rempli lui-même à chaque consultation d’un professionnel de santé.
- L’instauration de rencontres pour favoriser la coopération entre médecin et pharmacien.
- Un cycle d’éducation thérapeutique sur la base de rendez-vous réguliers avec les patients.
Traduire la demande médicale pour les sciences humaines
Didier Poivret a jugé que l’évaluation classique de ce protocole n’était pas assez efficiente. C’est pourquoi il a contacté Emmanuelle Simon, découverte par le biais de la revue Anthropologie et Santé dont elle est membre du comité de rédaction. « Ma spécialité ce sont les médicaments en tant qu’objets techniques de santé. Cela m’intéresse beaucoup d’étudier si l’amélioration des processus de communication est un facteur déterminant dans l’observance d’un traitement » ajoute l’intéressée, qui compte travailler à partir d’entretiens répétés et d’observation de séances d’éducation thérapeutique.
Un étudiant de master sera bientôt recruté pour prendre en charge une partie des entretiens. Il aura fallu plusieurs mois avant de formaliser un tel projet : « la difficulté de tels projets pluridisciplinaires, c’est que la demande médicale doit être traduite pour les sciences humaines et sociales afin de parvenir à un protocole scientifique qui convienne à chacun ».