[Rencontre] avec Guillain Mauviel, nouveau vice-président Transition écologique

 
Publié le 9/09/2022 - Mis à jour le 21/09/2022
Guillain Mauviel

Factuel est allé à la rencontre de Guillain Mauviel, nouveau vice-président Transition écologique à l'Université de Lorraine, afin d'en savoir plus sur son rôle et de découvrir les grands enjeux de la nouvelle vice-présidence.

Pouvez-vous présenter en quelques mots votre vice-présidence pour Factuel ?

C’est évidemment une vice-présidence dont l’existence même et sa dénomination donnent un signal politique fort pour les cinq prochaines années. Il s’agit d’impulser et d’accélérer la transition écologique à tous les niveaux ! La sécheresse historique de ces derniers mois contribue à une meilleure prise de conscience de l’urgence climatique et permettra, je l’espère, une large mobilisation.

Ceci dit, on ne part pas d’une feuille blanche. De nombreuses personnes et entités de l’UL réalisent d’ores et déjà des actions dans différents domaines : Alimentation durable (ex : produits locaux en vente directe), Biodiversité (ex : fauchage tardif), Energie (pavés LED pour l’éclairage), Numérique (empreinte écologique des équipements), Déchets (réduction & tri, repair cafés, clean walks), Mobilité (bourses aux vélos, covoiturage), Formation (Fresques du Climat, enseignements sur l’énergie ou l’environnement…) et Recherche évidemment. Ces actions doivent être partagées, soutenues et mises en avant, ce qui fera partie de mes missions.

Quels sont les grands enjeux (et/ou le calendrier) à venir pour votre vice-présidence ?

Depuis plus de 30 ans, nous savons que le changement climatique est un problème nuisible à l’humanité. Il en est de même de la perte considérable de biodiversité. Malgré ces connaissances, nous avons du mal à agir en conséquence, probablement car la résolution de ces problèmes environnementaux touche aux fondements de nos sociétés modernes (la surconsommation en particulier). Depuis 2018, les dérèglements du climat deviennent nettement perceptibles pour les européens, tandis que l’on comprend à quel point nos modes de vie dépendent de ressources énergétiques qui s’amenuisent. Il n’est donc plus seulement question d’éthique vis-à-vis des autres espèces ou des générations futures : la transition écologique apparaît de plus en plus comme une nécessité vitale et urgente. Elle induit des évolutions technologiques, mais aussi et surtout une véritable sobriété tant sur l’énergie que sur nos biens de consommation.

En effet, l’indispensable transition vers des énergies bas carbone ne pourra se faire que si l’humanité réduit ses consommations d’énergie. Si nous les maintenons à un niveau élevé, nous allons augmenter les tensions et les pollutions liées à l’exploitation des métaux nécessaires à cette transition. Par ailleurs, nous devons aussi diminuer la consommation excessive de différents aliments et de certains biens neufs : digital, immobilier, voitures, textiles… Leur niveau de production actuel conduit à la destruction des écosystèmes qui nous procurent pourtant des bienfaits immatériels, mais aussi des ressources essentielles : eau, bois, molécules bioactives… Toutes choses que l’humanité doit préserver. Cette sobriété n’est pas évidente, mais elle pourrait être choisie si elle devient équitable et normale sur le plan social. Une économie circulaire et collaborative pourrait la faciliter. Quel que soit le chemin suivi, il y aura des impacts importants sur les emplois et donc sur l’enseignement supérieur.

Côté formation, le chantier est donc vaste. Il semble en particulier nécessaire de mettre en place des enseignements qui permettent à tous les étudiants de mieux appréhender les enjeux liés à l’environnement (biodiversité, climat, énergie, eau, alimentation, santé…). C’est sur cette base commune qu’il est alors possible d’examiner et d’imaginer les moyens techniques, juridiques et sociaux pour atténuer les dommages sur l’environnement, mais aussi pour s’adapter à ses dérèglements et à la diminution des ressources. Ce sont des sujets complexes qu’il s’agit d’explorer de manière systémique en croisant de nombreuses disciplines - ce qui est une force de notre université. Une partie de ces enseignements sera commune à l'ensemble des étudiant-e-s de licence, ce qui représente un grand défi (cf. rapport Jouzel). Le projet ExcellenceS « LUE-E&T » récemment obtenu contribuera à la réalisation de cet objectif. Il faudra également construire des formations pour les personnels et pour les extérieurs, car nous devons toutes et tous devenir conscients et acteurs de la transition écologique. En ce sens, il sera intéressant d’intensifier nos actions « Sciences avec et pour la Société » sur ces sujets, tout particulièrement auprès des lorrains.

Côté recherche, nous pouvons être fiers que l’UL contribue à des innovations qui sont et seront utiles pour mener la transition. On peut par exemple citer nos implications dans plusieurs Programmes et Equipements Prioritaires de Recherche (Numérique frugal, agile et durable, Matériaux émergents, Hydrogène décarboné, Recyclage, Décarbonation de l’industrie, Risques, Sous-Sol…), ou encore le rôle structurant de l’initiative Lorraine Université d’Excellence qui vise à développer de grands programmes interdisciplinaires autour de six défis sociétaux. A mon sens, nous devrions poursuivre et accentuer notre orientation vers des innovations écoresponsables et véritablement en phase avec les besoins communs de tous les humains. Ainsi, il me semblerait intéressant que l’UL puisse proposer, à chaque chercheur et chercheuse qui le souhaite, un dispositif d’accompagnement qui lui permette de jauger et d’orienter les impacts potentiels de ses travaux sur la société et l’environnement. Cela pourrait être utile lors de la préparation d’une HDR, d’une conversion thématique ou d’un recrutement.

La formation, la recherche et l’innovation à l’UL ont donc un rôle déterminant à jouer. Cependant cela ne suffit pas : nous devons également participer radicalement à l’effort de sobriété. Il doit porter non seulement sur nos consommations de chaleur, d’eau et d’électricité, mais aussi sur notre mobilité professionnelle, nos déplacements domicile-campus, nos achats de matériels et de produits. Certaines actions sont relativement indolores (éteindre les appareils électriques, réduire le gaspillage alimentaire). D’autres initiatives représentent un effort plus notable : partager un équipement, renoncer à un déplacement en avion, franchir le pas du co-voiturage ou du vélo... Cette responsabilité ne doit pas incomber uniquement aux personnels et aux étudiant-e-s : les instances de l'UL auront par exemple à investir plus encore dans la rénovation énergétique des bâtiments ou dans des aménagements pour la mobilité douce. L’UL peut également inciter et aider à la mutualisation des espaces et des équipements. Elle peut finalement modifier certaines règles et les rendre faciles à appliquer. Tous ces efforts doivent permettre de réduire les dommages à l’environnement et de réaliser des économies pour maintenir notre capacité à recruter, à investir, à soutenir.

Comment comptez-vous lancer ce chantier aux multiples facettes ?

Mon rôle sera dans un premier temps de co-construire, avec les différents conseils, une feuille de route sur la Transition Ecologique à l’UL. Elle devra inclure des objectifs à atteindre - en termes de réduction d’émissions de CO2 par exemple - ainsi qu’une planification des actions à réaliser. Mon rôle sera ensuite de porter politiquement la réalisation de ces actions, en collaboration avec un comité lié au Conseil de la Vie Universitaire ainsi que l’ensemble des conseils. Je serai soutenu en cela par la Présidente, par la déléguée Responsabilité Sociétale, par les directions et par différents réseaux. Il en existe déjà un premier : la communauté Développement Durable de l’UL qui doit être renforcée pour faire rayonner notre expertise et soutenir les acteurs lorrains dans leur dynamique de transition. Il y a également deux réseaux internes qu’il me semble important de structurer : l’un sera dédié à la transition de nos campus, l’autre portera sur la formation aux enjeux socio-environnementaux.

En résumé, la mission de ma vice-présidence sera de promouvoir et de proclamer les efforts de l’UL face à l’objectif majeur des décennies à venir : réaliser une transition écologique profonde de notre société en distinguant ce qui doit devenir exceptionnel de ce qui reste essentiel.

Au plaisir d'en discuter et de mener des changements avec l’ensemble des personnes et des partenaires de l’UL !

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