Une nouvelle hypothèse qui explique la prompte transmission du nouveau coronavirus SARS-CoV-2 dans le monde a vu le jour dans une revue médicale américaine spécialisée en virologie. Jaouad Bouayed, chercheur au laboratoire LCOMS, en collaboration avec Torsten Bohn, chercheur au Luxembourg Institute of Health, soutiennent que le nouveau coronavirus SARS-CoV-2 altère le comportement social chez une minorité des patients Covid-19, en particulier chez les super-contaminateurs, afin qu’il favorise sa propre transmission. En effet, pour assurer leur dissémination vers de nouveaux hôtes, certains virus, et par extension certains parasites, mettent en place une stratégie de survie qui consiste à modifier le comportement de l’hôte en leur avantage. Une hypothèse qui pourrait nous aider à endiguer la propagation de la Covid-19 puisque la compréhension de la transmission d’un virus est la clef pour le contenir et s’en prévenir dans le futur.
[Covid-19] Et si on s’intéressait au comportement des super-propagateurs ?
Jaouad Bouayed : « Au cours d’une infection virale, il se produit une interaction hôte-virus, ce qui peut induire chez l’hôte un comportement défensif : un comportement en désavantage du virus qui limite par conséquent sa transmission. Au contraire, l’hôte peut développer un comportement en faveur de la transmission de l’infection : un comportement propagateur du virus. L’infection au nouveau coronavirus provoque chez la majorité des patients Covid-19 un comportement défensif y compris le respect des gestes barrières tels que le lavage des mains, le port du masque, la distance physique et l’auto-confinement. Cela pourra expliquer en partie pourquoi la majorité des patients ne contaminent pas en réalité. Le comportement responsable de ces patients même s’ils sont majoritaires ne permet pas de briser la chaîne de transmission de l’infection. En effet, la propagation impressionnante de la Covid-19 est intimement liée au comportement irresponsable d’une fraction de patients Covid-19 en particulier les super-propagateurs qu’on appelle aussi les super-contaminateurs ou encore les super-infecteurs ».
Jaouad Bouayed : «Les super-propagateurs sont ceux qui infectent plus de personnes que la moyenne qu’un patient Covid-19 devrait théoriquement contaminer. Avec la maladie contagieuse de la Covid-19, dans certaines situations de super-propagation, certains super-contaminateurs ont infecté des centaines d’individus sans parler des cas contacts comptés en milliers. Il est estimé que 10% des porteurs sont responsables de 80 % de la propagation d’où leur nom les super-contaminateurs ou les super-propagateurs. Les super-propagateurs, même s’ils sont minoritaires, constituent le principal maillon de la chaine de la transmission du virus. Le pouvoir de super-contamination serait lié à leur pouvoir de super-émetteur du virus du fait que leur charge virale est très élevée (100 fois plus élevée) par rapport aux autres patients Covid-19. En plus de ces éléments importants pour la transmission, notre hypothèse donne au comportement une place importante dans la chaîne de contagion par la Covid-19. »
Jaouad Bouayed : «Cette nouvelle hypothèse ouvre de nombreuses perspectives scientifiques pour comprendre les multi-facettes de changement de comportement qui peuvent être induites par le nouveau coronavirus. Cela soulève par exemple la question suivante : La charge virale est-elle en lien avec la capacité du SARS-CoV-2 à déclencher un comportement propagateur ?
Ou cela serait-il plutôt lié à des prédispositions telles qu’aux traits de certaines personnalités y compris les personnes impulsives et agressives ? »