[Rencontre] Alexandre Markoff, en résidence à l'Espace Bernard-Marie Koltès

 
Publié le 13/11/2019 - Mis à jour le 10/05/2023

Après le premier stage théâtre animé par Alexandre Markoff,auteur et metteur en scène, et ses comédiens du Grand Colossal Théâtre, qui a eu lieu à l'Espace Bernard-Marie Koltès du 7 au 10 octobre 2019 dans le cadre de la résidence de création d'écriture à l'Espace Bernard-Marie Koltès, l'auteur nous parle du processus d'écriture de ce texte en création Enterre-moi partout.

 

Factuel – Comment est née l’envie d’écrire ce texte ?

Alexandre Markoff – En 2015 la compagnie avait été accueillie en résidence au Théâtre 13 à Paris pour créer et présenter une série théâtrale intitulée La Chienlit. Tout au long des cinq épisodes nous racontions l'histoire d'une ville en proie à une grève des éboueurs et basculant progressivement dans le chaos. On y voyait un maire et son équipe s'enfoncer dans la crise en essayant de trouver des solutions à la crise, l'équipe des éboueurs à l'origine de la grève dépassée par les événements et les membres d'une résidence fermée sombrer dans la paranoïa. Enterre-moi partout est une sorte d'appendice à cette saga (qui bout à bout représentait près de six heures de spectacle) que je souhaiterai installer dans l'espace public. Le spectacle sera une déambulation, c'est à dire qu'il emmènera le public hors du théâtre et se servira de la rue et des passants pour créer sa scénographie.

Factuel – A l'origine, quelles œuvres ont pu inspirer ou traverser l'écriture de ce texte ?

AM – Avec le spectacle Batman Contre Robespierre (spectacle sans décors ni accessoires) notre compagnie a beaucoup tourné dans le réseau du théâtre de rue. Avant ce spectacle je n'avais aucune idée de ce qu'étaient les arts de la rue et puis d'un festival l'autre j'ai découvert l'incroyable vitalité de ce monde. On y trouve aussi bien de gigantesques scénographies (Royal de Luxe) que des spectacles intimistes adressés au coin d'une rue pour quelques spectateurs. J'ai été surtout frappé par l'immense variété des formes que peut prendre l'expression théâtrale. Déambulation, cirque, danse, installation, performance, ici toutes les disciplines se rencontrent, communiquent. En découvrant cet univers, j'ai eu envie de sortir du rapport frontal entre le public et les spectateurs où nous ramène la salle de théâtre.

Factuel – Quels sont les thèmes principaux que vous souhaitez aborder dans ce projet ?

AM – Je me rends compte au fils des spectacles que j'écris que la question de la hiérarchie dans les rapports sociaux revient toujours sous une forme ou sous une autre. Je crois que je supporte de moins en moins les rapports de domination et je ne comprends pas pourquoi ils nous sont toujours présentés comme un mal nécessaire. Je suis un anarchiste prosélyte et le théâtre est peut-être le seul moyen que j'ai trouvé pour me faire entendre sans écraser personne.

Factuel – Quelles sont les principales difficultés que vous rencontrez au cours de l’écriture ?

AM – La forme déambulatoire est complexe parce qu'elle place le public à l'intérieur de l'espace de la représentation. Il faut tenir compte de sa présence et de ses déplacements dès le stade de l'écriture. Je souhaiterai par ailleurs diviser le public en plusieurs groupes tout au long du spectacle pour offrir à chacun une vue parcellaire du récit. Cela demande d'écrire plusieurs partitions qui seront jouées simultanément et qui devront par la suite se rejoindre, se compléter et se répondre.