Ce colloque marquera l’aboutissement d’un projet de recherche sur deux ans (2017-2018 et 2018‑2019) faisant l’objet d’une collaboration franco-américaine et dirigé par Rowan Dorin (Université de Stanford) et Christine Barralis (Université de Lorraine).
Projet financé par le Thomas Jefferson Fund de la FACE Foundation, les universités de Stanford et de Lorraine, le Centre France-Stanford d’études interdisciplinaires.
Enjeux et objectifs scientifiques
L’objet de ce colloque est d’étudier les transferts, créations, transformations et résiliences de normes au sein des législations ecclésiastiques locales entre 1215 et 1500. Le projet de recherche dont est issu cette rencontre est centré sur la France médiévale et les territoires proches (France actuelle, Flandres, Suisse, Italie du Nord), mais le colloque pourra être l’occasion d’ouvrir le champ géographique à l’ensemble de l’Europe catholique, dans une optique comparatiste. Un intérêt particulier sera porté à la porosité ou l’imperméabilité des frontières juridictionnelles diocésaines et provinciales, dans un questionnement sur la création et l’éventuelle uniformisation des droits locaux.
Alors que la question de la diffusion, au sein des statuts synodaux et provinciaux, du droit émanant des pontifes et conciles généraux a déjà fait l’objet d’un certain nombre d’études [Foreville, 1976 ; Pixton, 1995; Unger, 2004 …], la question des transferts de législations entre diocèses (et entre diocèses et provinces), des modalités et des limites de ces transferts, a surtout été abordée via la constitution de quelques grands livres synodaux du XIIIe siècle [Avril, Pontal, Cheney]. Il s’agit donc d’un champ d’études encore largement en friche concernant de larges espaces (sud et est du royaume de France notamment) et les XIVe-XVe siècles.
C’est pourtant une question fondamentale en raison d’un triple contexte : de 1215 (concile de Latran IV) à 1500, l’Église occidentale est marquée par une fort développement du droit canonique, par la centralisation de l’administration de l’Église et par le développement des synodes diocésains et conciles provinciaux, lieux d’expression des normes. Il importe donc de se demander dans quelle mesure ce contexte nouveau a eu un impact sur la création et la standardisation éventuelle des législations locales. En questionnant le processus et les limites de ces transferts entre des diocèses, de diocèses au niveau provincial et inversement, nous questionnons les limites de la centralisation, la subsistance de spécificités et d’identités locales au sein de l’Église, la dynamique des pouvoirs locaux qui s’emparent ou non des législations générales, leur résistent, les transforment, et qui mettent en place de nouvelles pratiques et normes dans des processus bottom-up, et non pas seulement top-down, de création des législations. Dans un champ scientifique qui s’est longtemps focalisé sur la production législative initiée par la papauté, nous entendons donc porter l’attention sur le dynamisme des productions législatives locales. Celles-ci étant largement liées aux contextes locaux, leur étude nous permettra également de jeter un nouvel éclairage sur l’évolution des pratiques religieuses et sociales à la fin du Moyen Âge et la manière dont ces normes contribuent à maintenir ou construire des identités régionales propres.
Contact : christine.barralis@univ-lorraine.fr