Des chemins de "Traverses" avec le Théâtre Universitaire de Nancy

 
Publié le 10/04/2019 - Mis à jour le 11/04/2019
spectacle Théâtre Universitaire de Nancy

Rencontre avec Caroline Bornemann – chargée de développement et  Antoine Perrin – président étudiant du Théâtre Universitaire de Nancy, qui évoquent pour nous les activités du théâtre et la programmation du festival Traverses 2019.

Quels sont vos rôles respectifs au sein du TUN ?

AP : Je suis doctorant en sociologie en 4eme année et ATER à l’IUT de Sarreguemines. Je suis le plus souvent à Nancy. J’ai commencé à faire partie du TUN à l’occasion de ma reprise d’études en master de sociologie, en formation continue. Au départ j’étais acteur, ensuite je me suis intéressé au comité d’administration, je suis devenu secrétaire puis président.

CB : Je suis chargée du développement au TUN depuis 2000. Je m’occupe à la fois du travail administratif, pour assurer la pérennité de l’association, et en même temps je mène des ateliers de théâtre avec les étudiants au cours de l’année. Je travaille en collaboration avec Denis Milos qui est le directeur artistique du TUN depuis sa refondation en 1991.

Historiquement il y a eu le théâtre universitaire créé par Jack Lang en 1957, qui est à l’origine du festival mondial du Théâtre de Nancy entre 1963 et 1983. C’est en 1991 que Denis Milos, arrivant à Nancy, refonde ce théâtre universitaire, avec Nicole Granger, en proposant des activités réunies autour de trois axes : la Formation, la Création et la Diffusion avec et pour les étudiants.

Quelles sont les spécificités du théâtre universitaire ? Est-ce qu’on peut parler de compagnie ?

CB : C’est une association étudiante, car elle est composée à plus de 90% d’étudiants. L’objectif de l’association est de permettre aux étudiants de découvrir et pratiquer le théâtre. Elle est composée d’un bureau qui est étudiant dont la présidence est double avec un président étudiant et un président enseignant, Régis Latouche. Ce Bureau est soutenu par des professionnels. Moi je suis secrétaire de l’association avec un poste permanent.

Cette année, nous comptons 185 adhérents, venus de tous les campus de Nancy (et même de Metz !). Nous sommes présents sur le campus toute l’année pour permettre aux étudiants de pratiquer le théâtre, mais aussi d’en voir et d’en organiser, avec par exemple les « Mercredis du TUN » ou le festival Traverses.

Nous avons accueilli, dans le cadre de notre « Fête du Théâtre de rentrée » le spectacle Comment Va le monde ? de Marc Favreau en lien avec L’Espace BMK et le service culture de l’Université.

Nous fonctionnons avec une Troupe qui présente au cours de l’année des lectures, des spectacles, notamment aux festivals Neue Stücke ou La Mousson d’Hiver proposés par le Théâtre de la Manufacture CDN Nancy-Lorraine. C’est elle qui ouvrira le festival Traverses avec le spectacle  F/M [ Devil is alive and well] de l’auteure catalane Helena Tornero, le 23/04 à 20h30 à l’Amphi. Déléage, le nouveau projet de Formation des étudiants par la Création et la Formation (FCD). On essaie d’être présent au niveau de la formation, de la création et de la diffusion pour les étudiants sur le campus.

Pouvez-vous nous parler du festival Traverses ?

CB : Il en est à sa 23e édition.

Le but est d’explorer les pratiques théâtrales …

CB : Au départ, en Europe de l’Est puis le festival s’est étendu à toute l’Europe. Au commencement c’était en collaboration avec le festival Passages quand il se passait à Nancy. On était focalisé sur les productions alternatives et étudiantes dans les Pays de l’Est.

En Europe de l’Est, il y a une tradition du théâtre qui est très forte et les niveaux sont élevés, les spectacles d’une qualité remarquable. On a accueilli de nombreux spectacles d’écoles venus de Slovaquie, Pologne, Roumanie, Hongrie … et plus tard de Belgique et même de Russie.

Ce festival est une rencontre d’étudiants européens autour du théâtre et nous proposons également des stages aux étudiants du TUN. L’idée est de montrer comment on pratique le théâtre dans les différentes écoles de formation en Europe en invitant un professeur de l’Ecole à diriger un stage avec les étudiants  L’année dernière c’était l’école nationale de Théâtre de Varsovie, il y a deux ans, celle de Cracovie. Les étudiants invités sont des futurs professionnels dont le niveau de pratique est déjà très développé. Une culture théâtrale leur est transmise dès l’enfance.

Cette année, le festival se tourne vers le Japon. C’est l’actrice et metteure en scène japonaise, Sayuri Nakamura, qui viendra donner une formation aux étudiants nancéiens au théâtre de Mon Désert. Ce stage est destiné à des étudiants qui ont déjà participé à l’atelier d’Expression au cours de l’année, car il faut avoir un minimum de pratique pour le suivre.

Dans ce festival, les étudiants participent aussi bien à l’organisation qu’aux spectacles

CB : Absolument. Ils ont d’ailleurs réalisé une procession théâtrale début avril sur le campus Lettres pour diffuser le programme du festival et y inviter les étudiants. Ils accueilleront le public au cours des soirées. Nous comptons aussi parmi nos forces vives un volontaire du service civique chargé de la médiation culturelle.

Le festival a lieu au théâtre Mon Désert et à l’amphi Déléage, et nous le réalisons, une année sur deux, en partenariat avec le festival Ring du Théâtre de la Manufacture CDN Nancy Lorraine. L’année dernière nous avons joué à La Fabrique du Théâtre de la Manufacture. Traverses est le fruit de notre collaboration avec l’Université de Lorraine et le Crous Lorraine.

La compagnie Omotenashi qui est au programme du festival, a été récompensée au concours national de théâtre étudiant en 2018. Nous sommes partenaires de ce concours proposé par le CROUS Lorraine. Denis Milos a souhaité réinviter cette compagnie afin qu’elle présente à Nancy son nouveau spectacle (OMOTENASHI VI) et pour que l’artiste japonaise puisse transmettre son savoir aux étudiants au cours d’un stage.

Le concours national de théâtre a lieu quand ? Vous avez déjà effectué une pré-sélection ?

Il est organisé au mois de mai. Le jury et son Président, Denis Milos, se réuniront pour une présélection sur vidéo le 02 mai.  Quatre spectacles parmi la vingtaine reçus seront sélectionnés et invités à se produire à Nancy devant le public les 23 et 24 mai (à 18h au Théâtre de Mon Désert et à 21h à l’Amphi Déléage, l’entrée est libre). Ensuite le lauréat désigné par le jury recevra le premier prix, c’est-à-dire 2 000 euros et une représentation au festival IN d’Avignon.

Ce sont uniquement des spectacles étudiants ?

Alors, il y a des règles mais la collaboration d’étudiants avec des professionnels est autorisée. Le concours souhaite ne pas dévaloriser cette rencontre entre professionnels et étudiants, quand cela se présente.

Quand on va au TUN, est-ce qu’il y a une volonté de se professionnaliser ou c’est pour pratiquer une passion ?

AP : J’ai dû choisir entre ma pratique du théâtre et la thèse, et j’ai choisi la thèse. Mais c’est un univers qui continue à m’intéresser en tant que spectateur.

CB : Il y a aussi une dimension citoyenne dans le théâtre qui t’intéresse je crois, non ?  On peut réfléchir et entendre des auteurs penser notre monde, notamment à l’occasion du festival ATC (Autour du Théâtre Contemporain) où un auteur est invité à écrire sur un thème. En 2019, le thème était « Penser » avec l’auteur flamand Pieter de Buysser, en 2018, c’était « Réinventer » avec l’auteure Nathalie Papin…  et ça suscite toujours des débats.

Ca complète bien la formation universitaire

Oui, on parle des « élèves » du TUN, on considère qu’ils ont une vraie formation. Il y a ce côté convivial, ouvert à tous et il y a aussi un aspect professionnel, on essaie de transmettre les règles du théâtre. C’est ce que Denis Milos m’a transmis et c’est ce que nous défendons. Nous sommes reconnus comme un lieu de formation théâtrale. C’est vrai qu’aujourd’hui, il vaut mieux passer par une Ecole de théâtre pour devenir un acteur professionnel, mais il existe des chemins de traverses qui permettent d’approcher le théâtre de façon conviviale tout en y étant pleinement confronté.

AP : Pleins de gens qui sont passés par le TUN ont ensuite décidé de s’investir dans le théâtre professionnellement, ils ont fait le conservatoire à Nancy ou à Paris et en écriture, certains sont entrés à l’ENSATT à Lyon, comme Guillaume Cayet.

CB : Oui, c’est un peu mon histoire. Quand je suis entrée à l’Université, je ne connaissais pas le théâtre. Ça a été une révélation et aujourd’hui j’ai le diplôme d’état de Professeur de théâtre. Le TUN a aussi cette fonction : on peut y rencontrer le théâtre, notamment au sein de l’atelier d’Expression qui a lieu tous les mardis soirs à l’Amphi. Déléage et qui est ouvert à tous, débutants ou avancés.

AP : Je suis entré au TUN à 27 ans :  on y rencontre des gens dont le théâtre est leur vie et on se fait facilement embarquer…

CB : C’est important que ces chemins de traverses existent, l’université est un lieu de culture, de savoir et de transmission. Le TUN et le festival Traverses sont là pour ça.

Retrouvrez tout le programme du festival Traverses 2019 en cliquant ici