Portrait de Véronique Lemoine-Bresson, didacticienne

 
Publié le 12/11/2018 - Mis à jour le 11/05/2023
© L. Gobert | ATILF
"Depuis l’âge de 8 ans, j’ai toujours voulu être maîtresse !"

© L. Gobert com ATILF

Originaire de Lorraine, Véronique Lemoine-Bresson est née en 1966. Après 17 ans à Metz, elle s’est dirigée vers le bassin minier de Lens et surtout quelques décennies à Lille, jusqu’en 2015. Après ses études initiales en allemand Littérature et Civilisation, option espagnol et hongrois, elle a travaillé deux ans en Allemagne à Augsburg en Bavière à la Bundespost. C’est en 1988 qu’elle a passé le concours d’Instituteur, par vocation.

Admise dans l’Académie et Lille et dans l’Académie de Rouen, elle a choisi de rester dans le Nord pour suivre les deux années de formation à l’École normale de garçons de Douai. D’abord, enseignante en école primaire, elle a consacré une douzaine d’années de sa carrière aux élèves de secteurs dits défavorisés, en Zone d’Éducation Prioritaire (ZEP) à Roubaix dans le quartier du Cul-de-Four. Chaque année, Véronique Lemoine-Bresson prenait plaisir à "tester" un autre niveau de classe ou à s’investir dans les niveaux multiples dont personne ne voulait ! Au bout du compte, elle a enseigné dans tous les niveaux de classes … sauf le CP.

> Dolto, tout un roman

Très fan de Françoise Dolto, elle a lu tous ses ouvrages qui l’ont beaucoup inspirée dans son rapport aux élèves de ses classes. Dans son livre sur l’échec scolaire en 1990, elle avait bien noté que "l’être humain n’est pas un objet à conformer au désir d’autrui".

Ces années d’enseignement ont aussi été marquées par la conduite de nombreux projets avec des partenaires sociaux et éducatifs à Roubaix et à Mönchengladbach en Rhénanie du Nord-Westphalie. Ensuite, pendant une quinzaine d’années, Véronique Lemoine-Bresson a été conseillère pédagogique, d’abord généraliste à Roubaix (toutes disciplines scolaires), puis spécialisée langues vivantes à la Direction des services départementaux de l’éducation nationale à Lille. Ce temps lui a permis de mieux comprendre en quoi consistait la politique des langues dans une académie de très grande taille géographique et de fortement collaborer avec les collègues IA-IPR* du second degré, notamment dans la création d’un protocole d’évaluation du niveau A1 du CECRL* pour les élèves de l’académie de Lille. Pendant cette période, elle a été également formatrice associée en formation initiale d’enseignants, d’abord à l’IUFM devenue ESPÉ* Lille Nord de France.

Vers le chemin de la thèse

Cette association l’a poussée naturellement à reprendre des études en 2008 à l’université de Lille 3, avec une entrée en Master 2 par une VAP*. Elle a validé dans un premier temps un Master 2 professionnel en didactique professionnelle qui lui a permis d’interroger les notions de conseil, d’accompagnement et de médiation en formation de formateurs. À l’époque, il lui importait essentiellement de se sentir légitime d’un point de vue académique vis-à-vis des formés à l’ESPÉ, à savoir avoir un BAC +5 et compléter ses savoirs d’expérience.

Puis, sollicitée par Bertrand Daunay, son directeur de mémoire, à une poursuite en thèse de doctorat, Véronique Lemoine-Bresson a embrayé sur un Master 2 recherche en didactiques au laboratoire CIREL-Théodile à Lille 3 axe "Enseignements Apprentissages Didactiques". En juillet 2014, elle soutenu s thèse intitulée "Diversités franco-allemandes : pratiques interculturelles et autonomisantes en didactique des langues" sous la direction de Bertrand Daunay et Fred Dervin. Ces années resteront pour elle ce qu’elle appelle dans son discours de soutenance "une révolution intellectuelle".

Maître de conférences, une nouvelle aventure

Après une qualification en sciences de l’éducation par le Conseil national des universités, Véronique Lemoine-Bresson a été recrutée en tant que maitre de conférences par l’université de Lorraine notamment l’ESPÉ en 2015. Au regard de la première et longue partie de sa carrière "côté ’employeur éducation nationale", s’investir pleinement à l’ESPÉ lui convenait parfaitement. Aujourd’hui encore elle reste très attachée à l’enseignement et en même temps, elle est passionnée par ses objets de recherche qui touchent aux problématiques interculturelles en éducation.

Elle est particulièrement intéressée par les mises en scène de soi, pour reprendre un terme de E. Goffman*, par les discours des personnes pour se dire, pour dire la rencontre de soi et de l’autre, par l’usage d’éléments culturels pour expliquer, se défausser, s’excuser voire séduire l’autre, par le rapport aux contenus culturels prescrits et enseignés en classe.

À l’ESPÉ, elle apprécie particulièrement l’implication des étudiants dans ces thématiques et leur engagement pour mener ensemble un parcours réflexif et critique autour de la notion d’interculturalité. Innovante pour rompre la monotonie du cours magistral, elle aime beaucoup travailler à partir du court métrage French Touch de Xiaoxing Cheng | 20’ | 2015 | Line Up Film. Elle ose ! elle teste !

D’ailleurs, en cours, quand les étudiants utilisent (trop) fréquemment des expressions comme "le choc des cultures", "la rencontre des cultures" qui sont souvent des "coquilles vides", Véronique Lemoine-Bresson prend plaisir à leur souffler "Cultures don’t meet. People do"* qui est sa base pour construire le cadrage théorique de l’interculturalité, que ce soit pour ses enseignements ou ses recherches.

Côté Recherche

Elle travaille étroitement avec Stéphanie Lerat, aussi maître de conférence à l’ATILF rattachée à l’équipe Didactique des langues et sociolinguistique et Virginie Trémion, maître de conférences à Paris. Elles mènent depuis deux années un projet autour du développement des compétences interculturelles des étudiants niveau Licence et de Master à l’issue de cours à et par l’interculturalité, projet DIPERLANG*. Elles sont accompagnées par Marie-José Gremmo, professeure émérite anciennement en poste à l’UL, rattachée au LISEC.

Elle a également encore ouvert ses horizons de recherche en 2017 par l’entrée dans un projet franco-brésilien conduit par Sophie Bailly et Juliana Assis, une collègue de l’université à Belo Horizonte. Ce projet (CAPES-COFECUB) touche aux questions de littéracies. C’est un sujet pas vraiment fortuit dans la mesure où elle avait bénéficié d’une initiation aux thématiques de l’écriture de recherche dans son ancienne équipe à Lille 3 (travaux de Delcambre, Daunay, Lahanier-Reuter, Reuter).

Elle avait également été engagée dans un projet avec le Brésil en 2014-2015 (Consortium IBrasil). Dans ces deux cas de collaboration professionnelles, elle apprécie particulièrement les échanges constructifs et la facilité d’avancer dans un projet avec Stéphanie Lerat, la générosité de Sophie Bailly, chercheure-experte et son accompagnement dans des tâches nouvelles pour elle comme l’actuelle coordination de la revue RIPES*. Ces recherches sont très intéressantes tant scientifiquement qu’humainement. Il y a exactement un an elle s’apprêtait à aller travailler avec les collègues brésiliens avec d’une part Cynthia Neves à Campinas et d’autre part avec Juliana Assis et toute son équipe à Belo Horizonte. Elle avait pour mission de faire deux conférences. Elle a proposé un premier travail rétrospectif et projectif à partir de l’étude menée dans le cadre de I.Brasil alors qu’elle était doctorante au laboratoire Cirel-Théodile à Lille 3. Le second travail touchait aux questions de l’entrée en recherche pour les étudiant.e.s de Master MEEF à partir d’une réflexion sur la Self Identity des étudiant.e.s et les trois identités sociales en interconnection qui font leur contexte d’écriture du mémoire. Le projet avec le Brésil touche à sa fin. Sophie Bailly clôturera les travaux au Brésil en décembre 2018. Pendant ce temps-là, avec Guillaume Nassau, elle accueillera trois collègues brésiliennes : Juliana Alves qui co-pilote le projet avec Sophie Bailly, Fabiana Komesu et Inês Signorini.

Une rencontre-conférences est projetée dans les cours dispensé à l’ESPÉ ... avec les mêmes étudiant.e.s qui participent aux premiers ateliers de conversation impulsés par le centre de documentation Michel Dinet du laboratoire.

=> Lire l’article dédié à l’atelier de conversation sur Factuel, sur le site de l'ATILF

=> Consulter sa page personnelle

Portrait corédigé par V. Lemoine-Bresson et D. Barbier-Jacquemin

Dernière mise à jour et © : 12/11/2018 | communication ATILF


Nbp par ordre alphabétique :

*CECRL : cadre européen commun de référence pour les langues

*"Cultures don’t meet. People do" : Citation issue des travaux de Unni Wikan, professeure d’anthropologie sociale à l’université d’Oslo.

*DIPERLANG : Diversité des personnes et des langues

*ESPÉ : école supérieure du professorat et de l’éducation

*IA-IPR : inspecteur académique - inspecteur pédagogique régional

*RIPES : Revue internationale de pédagogie de l’enseignement supérieur

*VAP : validation des acquis professionnels

*Erving Goffman est sociologue américain (1922-1982) qui a enseigné à Berkeley. Il a consacré ses recherches aux questions de l’interaction en face à face. Ses travaux sur la face, l’image de soi, c’est-à-dire l’identité que soi et l’autre revendiquent dans une situation donnée et un contexte spécifique sont intéressants pour interroger les problématiques interculturelles.

Véronique Lemoine-Bresson, didacticenne