Des géologues font appel à des mécaniciens pour créer des séismes sur éprouvette

 
Publié le 10/12/2014 - Mis à jour le 19/12/2014

Dès 2003, Sylvain Bourlange, maître de conférences au laboratoire GéoRessources, a soutenu une thèse liée au forage océanique dans le prisme d’accrétion de Nankai, une zone sismique très surveillée au large du Japon. Il poursuit sa collaboration avec les équipes de recherche engagées depuis plus de 8 ans dans une campagne de forage qui devrait aboutir à un puit de 5km de profondeur. C’est là que se trouvent les roches qui intéressent Sylvain Bourlange.

La grande majorité des tremblements de terre trouvent leur origine à des profondeurs  comprises entre 5 et 15 km. au niveau de la zone sismogénique difficilement accessible à l’observation directe. On a beaucoup étudié la faille de San Andreas en Californie, mais à Nankai c’est la première fois que l’on pourra atteindre la zone sismogénique de la faille en contexte marin.

Jusqu’à présent la profondeur maximale atteinte par un  puit de forage océanique était de 2 km : pas assez pour atteindre la zone sismogénique. Le puit foré à Nankai a déjà atteint 3 km de profondeur. Ce qui intéresse Sylvain Bourlange, ce sont les paramètres du frottement lors des séismes au niveau de la faille qui sépare les deux plaques tectoniques. En attendant de disposer d’échantillons issus du prisme d’accrétion de Nankai, le chercheur élabore la méthodologie expérimentale à laquelle il souhaiterait les soumettre.

Nous voulons réaliser des tremblements de terre sur éprouvette de roche

L’objectif est à la fois d’étudier les conditions de frottement et les conséquences de ces frottements : la formation dans la roche de nouvelles microstructures. Jusqu’alors, des chercheurs japonais ont étudié des frottements à grande vitesse entre des cylindres rocheux en rotation. Bien que l’amplitude du mouvement soit comparable à celle du mouvement d’une plaque terrestre lors de la naissance d’un séisme, la pression exercée était dix fois inférieure à celle que subissent les matériaux au niveau de la zone sismogénique. C’est pourquoi Sylvain Bourlange s’est mis en quête de collaborateurs à même de produire des conditions expérimentales plus proches des conditions réelles.

Le géologue et géophysicien lorrain a rapidement identifié des collègues au Laboratoire d'Etude des Microstructures et de Mécanique des Matériaux (LEM3) et au Laboratoire de Mécanique, biomécanique, polymère, structures (LABPS) : Laurent Faure et Sylvain Philippon. Les chercheurs en mécanique ont saisi l’occasion de confronter leurs techniques et leurs instruments à d’autres matériaux que les matériaux de l’industrie aéronautique. Avec leur aide, Sylvain Bourlange compte bien élucider l’évolution des propriétés de frottement à l’œuvre lorsque des roches subissent des déplacements rapides les unes contre les autres.

Après avoir subi le séisme artificiel, les échantillons seront débités en  lames minces afin d’en observer la structure. A partir des données recueillies, Luc Scholtès, lui aussi maître de conférences à GéoRessources, développera  une modélisation numérique des processus observés.

Baptisé SISMIRA, le projet est lauréat de l'appel Projets Exploratoires Premier Soutien (PEPS Mirabelle 2014) organisé par l'Université de Lorraine et le CNRS.