Dossier : Brexit, pourquoi une chorégraphie impossible ?

 
Publié le 17/05/2019 - Mis à jour le 14/04/2023

Le 23 juin 2016, le Royaume Uni vote pour sortir de l'Union européenne. Le pays a alors jusqu'au 29 mars 2019 pour trouver un accord de sortie avec l'Union Européenne. Suite à un interminable enchainement de rebondissements, la date du Brexit est repoussée au 31 octobre 2019 afin de trouver une solution à la crise politique et institutionnelle que traverse le pays sur fond de rumeurs de retours aux urnes.
Comment en est-on arrivé là ? Avec Yves Petit, chercheur à l'IRENEE, retour sur des années de négociations explicant l'impasse actuelle.

Depuis bientôt trois ans, le Brexit (British exit) fait souvent la une de l’actualité européenne ! En effet, le gouvernement conservateur dirigé par le Premier Ministre David Cameron a pris la décision d’organiser un référendum sur le maintien du Royaume-Uni dans l’Union européenne (UE) le 23 juin 2016. Le « Leave » l’ayant emporté, l’UE et le Royaume-Uni ont donc été contraints de mettre en œuvre pour la première fois l’article 50 du traité sur l’UE permettant le retrait d’un Etat membre de l’Union.

Il a fallu attendre le 29 mars 2017 pour que la Première Ministre Theresa May – David Cameron ayant démissionné – notifie l’intention du Royaume-Uni de se retirer de l’UE. La procédure de négociations menée par le gouvernement britannique et par l’ancien Commissaire européen Michel Barnier, au nom de l’UE, a alors pu débuter fin juin 2017. Elle a permis l’adoption d’un accord de retrait et d’une Déclaration politique sur les relations futures entre l’UE et le Royaume-Uni le 25 novembre 2018. Cet accord, destiné à permettre un retrait ordonné de l’UE, était censé entrer en vigueur – comme le précise l’article 50 – deux ans après la notification du retrait, soit le 29 mars 2019.

Depuis le début de l’année 2019, après plusieurs votes négatifs à la Chambre des Communes rejetant cet accord, et en dépit de garanties supplémentaires obtenues de la part de l’UE, portant notamment sur la question du désormais célèbre « backstop » destiné à éviter le retour d’une frontière « dure » entre la République d’Irlande et l’Irlande du Nord, il n’en est rien ! Comme le permet l’article 50, le Conseil européen a accepté à deux reprises de prolonger ce délai de deux ans. Une première fois avec un retrait prenant effet le 22 mai 2019, veille des élections européennes. Toutefois, du fait de la non-approbation de l’accord par les Communes, la Première Ministre britannique a dû se résigner à solliciter le 5 avril 2019 un second report, à nouveau jusqu’au 30 juin 2019. Le Conseil européen du 10 avril 2019 a prorogé une nouvelle fois – et plus longuement – le délai prévu à l’article 50 jusqu’au 31 octobre 2019, la presse britannique s’étant empressée d’évoquer alors un « Halloween Brexit ».

L’incapacité de la classe politique britannique à trouver une solution à un problème qu’elle a créé n’est pas sans conséquences. Le Brexit paraît sans issue ! Il est néfaste à l’Union et à l’intégration européennes. Alors que tout a été fait afin que les élections européennes des 23-26 juin 2019 se déroulent sans la participation des citoyens britanniques, aussi paradoxal que cela puisse paraître, il est plus que probable que des députés britanniques siègeront dans le nouveau Parlement européen. A l’évidence, le Brexit pollue et contamine l’Union européenne, qui s’en trouve fragilisée, voire même bloquée. Deux issues de secours existent cependant. La première serait que le Royaume-Uni revienne sur son intention de se retirer, ce qu’autorise un arrêt de la Cour de justice de l’UE du 10 décembre 2018. La seconde – quoique contestée malgré son caractère démocratique – serait l’organisation d’un second référendum qui approuverait ou rejetterait l’accord de retrait. Malheureusement, la classe politique britannique est divisée sur le sujet et, de surcroît, à nouveau incapable de prendre une décision !

Yves PETIT, Professeur de droit public à l’Université de Lorraine
Institut de Recherche sur l’Evolution de la Nation Et de l’Etat, IRENEE, EA 7303
Directeur du Centre européen universitaire de Nancy

 

Liste des articles de M. Petit publié sur The Conversation convernant le Brexit :