Par 100 mètres de fond...Les mines d'argent oubliées de la Cité d'Athènes

 
Publié le 8/12/2016 - Mis à jour le 14/12/2016
Ari (Grèce) Mission 2016 - Chantiers antiques : dépilages verticaux dans les marbres minéralisés en cours d’exploration (Photographie : D. Morin)

Dans le cadre de la mission scientifique franco-allemande 2016, les archéologues ont réussi à atteindre pour la première fois des travaux miniers antiques d’une amplitude inégalée à une profondeur proche du niveau de la mer…

C’est à proximité d’Ari, un village situé au sud d’Athènes, au nord-ouest du massif de la Lauréatique que les archéologues ont réussi à pénétrer au cœur de ces labyrinthes multiformes, creusés par les mineurs esclaves de la cité d’Athènes. Cette mission, préparée de longue date avec l’Université de Bochum en Allemagne, a permis de découvrir et d’explorer de vastes réseaux souterrains conduits sur plusieurs niveaux. Sur les parois des chantiers et des dépilages sont imprimées les traces des pointerolles et des lampes à huile. Les travaux sont encore accessibles à partir de puits verticaux impressionnants par leur verticalité et par des galeries au jour, mais aussi à partir des exploitations modernes menées par la Compagnie Française des Mines du Laurion au XIXe siècle.

Les mines d’argent du Laurion sont parmi les plus emblématiques du monde antique. Le rôle fondamental qu’elles ont joué dans l’économie de la Cité Etat d’Athènes est illustré par les auteurs anciens (Hérodote, Thucydide, Aristote, Xénophon) et par l’épigraphie, surtout celle du IVe siècle. En surface, les vestiges s’étendent sur près de 150 kilomètres carrés. Le programme Ari porte sur l’exploration et l’étude de réseaux souterrains proches d’un secteur stratégique composé d’ateliers de traitement des minerais d’argent : laverie, aire de concassage/broyage, habitat,… fouillés par l’Université de Bochum sous l’égide de l’Éphorie de l’Attique.

Á la surface de ce plateau, battu par les vents, le sol de marbre est littéralement criblé de fissures et de cavités. Un canyon aux parois verticales, bordé de haldes, témoigne de cette intense activité minière. Au fur et à mesure des prospections, ce que les chercheurs ont découvert sous leurs pieds, c’est un paysage minier lunaire, ruiniforme, omniprésent et d’une extraordinaire diversité. Sous la direction conjointe des Dr. Hans Lohman et Denis Morin, les archéologues ont réussi à explorer des réseaux souterrains dont l’ampleur des travaux s’avère considérable. Cartographier la géologie de ces gisements complexes, caractériser leur composition telle sont également les objectifs de cette mission, sous la direction du Dr. Adonis Photiadès, Géologue et Directeur du département de cartographie géologique de Grèce (IGME - Institute of Geology and Mineral Exploration).

Des progrès conséquents ont été réalisés dans l’exploration et l’étude des réseaux souterrains miniers anciens grâce en particulier aux techniques de progression souterraine (spéléologie alpine). Les techniques utilisées sont celles qui sont employées dans l'exploration des grandes verticales : amarrages de haute résistance, cordes statiques et techniques, descente au descendeur mécanique et remontée asymétrique aux bloqueurs, équipe légère rompue aux techniques de progression en milieu souterrain et comportant de multiples compétences. L’équipe française d’exploration forte d’une dizaine de spécialistes en archéologie minière, confirmés et entraînés, intervient actuellement en Europe dans l’exploration et l’étude des réseaux souterrains miniers complexes et profonds. Elle a d’ores et déjà commencé à lever la topographie de ces inextricables chantiers, témoins d’une activité minière hors norme il y a près de 500 ans avant notre Ère.

Mission ARI 2016 - Composition de l’équipe

Dr. Denis Morin, Archéologue – Université de Lorraine (France), HISCANT-MA, ERMINA* ; Dr. Hans Lohmann, Archéologue, Université de Bochum (Allemagne) ; Dr. Adonis Photiadès, Géologue - Institute of Geology and Mineral Exploration (Grèce); Serge Delpech, archéologue minier, topographe responsable des levés souterrains (France), ERMINA* ; Maryse Delpech, archéologue minier (France), ERMINA* ; Jacques Klosset, spéléologue minier (France), ERMINA* ; Mikaël Atton, archéologue minier (France), ERMINA*. ERMINA : Equipe Interdisciplinaire d’Etudes et de Recherches Archéologiques sur les Mines Anciennes et le patrimoine Industriel

En images

Ari (Grèce) Mission 2016 - Topographie de surface et vue générale du site d’Ari (Photographie : J. Klosset)
Ari (Grèce) Mission 2016 - Montage. Chantiers antiques en veine suivant le pendage (Photographie : D. Morin) -80m
Ari (Grèce) Mission 2016 - Galerie antique recoupée par les travaux modernes. Les traces d’outils sont parfaitement visibles sur les parois (pointerolles) (Photographie : D. Morin)
Ari (Grèce) Mission 2016 - Descente de puits antique au jour. Préparatif d’équipement. L'équipement des puits est réalisé directement sur paroi à l'aide de chevilles expansives auto-foreuses en respectant les normes de fractionnement, L'utilisation de détecteur CO CO2 et d’un oxymètre est systématiquement de mise lors de chaque exploration afin de détecter d'éventuelles anomalies. (Photographie : D. Morin)
Ari (Grèce) Mission 2016 - Puits antique taillé dans les schistes de l’Attique – (Puits Damianos. Profondeur -70 m) (Photographie : J. Klosset)