Factuel est allé à la rencontre de Camille Diou, nouveau vice-président en charge du pilotage, des finances et du Sénat Académique à l'Université de Lorraine, afin d'en savoir plus sur son rôle et de découvrir les grands enjeux de la nouvelle vice-présidence.
Pouvez-vous présenter en quelques mots votre vice-présidence pour Factuel ?
Cette vice-présidence est en charge de la stratégie de l’établissement. À ce titre, ses actions portent sur trois temporalités différentes :
Penser le long terme, par un travail d’analyse prospective et comparative, pour éclairer nos instances dans leur analyse stratégique. Le Sénat académique doit pouvoir s’emparer de cette question prospective, afin de donner un horizon à viser pour notre établissement ; il s’agit ici d’anticiper et de penser l’Université de Lorraine sur un temps long : identifier les menaces, corriger nos faiblesses, et exploiter nos forces pour créer de nouvelles opportunités.
Bâtir le moyen terme, sur le plan pluriannuel, par la construction du projet d’établissement, en lien étroit avec l’ensemble de l’équipe politique, et donc l’ensemble des conseils centraux, pour tracer un chemin à suivre ; cela implique également de revoir notre modèle économique, pour rendre à l’université l’agilité nécessaire dans un contexte instable.
Mettre en œuvre le court terme, de manière annuelle, politiquement avec les collégiums et les pôles scientifiques, en lien avec les vice-présidents de conseils, et opérationnellement avec l’ensemble des directions opérationnelles de l’établissement, la direction générale des services et la direction du budget et des finances, pour progresser sur le chemin tracé ; cette mise en œuvre se traduit également dans la négociation avec l’État, dans le dialogue avec le rectorat de région, et dans la construction des budgets annuels et les arbitrages éventuels.
Quels sont les grands enjeux (et/ou le calendrier) à venir pour votre vice-présidence ?
Le premier enjeu sera de consolider la trajectoire financière de l’université. Le débat d’orientation budgétaire a mis en exergue le défi essentiel pour les années à venir : dégager une marge de manœuvre suffisante pour garantir l’investissement tout en maîtrisant notre masse salariale et en préservant l’emploi titulaire, et ce dans un contexte économique de crise qui va peser lourdement sur les dépenses de fonctionnement. Pour redonner de la visibilité au budget pluriannuel de l’Université de Lorraine, il nous faut définir un cadre programmatique pour les investissements lourds. Cela implique une mise en synergie de tous les acteurs, avec un même objectif, celui de notre bénéfice commun.
Le second enjeu sera de permettre cette synergie, entre les disciplines, les territoires, ou les collègues, pour faire en sorte que toutes et tous se sentent concernés et impliqués dans cette œuvre commune qu’est l’Université de Lorraine. Cela passe par un pilotage qui privilégie le dialogue entre les différentes instances et avec le central, et par les travaux du Sénat académique, lesquels doivent conduire à la définition d’un schéma directeur commun. Le pilotage conduit souvent à l’arbitrage, parfois source de frustrations : par ce dialogue, par la pédagogie, par une totale transparence sur les choix politiques effectués et le respect des engagements, cette synergie décloisonnée pourra se déployer pleinement.
En ce qui concerne le calendrier, il y a deux urgences : continuer de structurer les différents organes fonctionnels de mise en œuvre de cette politique, et préparer le budget 2023.
La structuration des organes fonctionnels pose deux échéances, dès la rentrée universitaire :
- la première sera de réunir le groupe de travail « GT Sénat », pour d’une part définir la composition du futur Bureau du Sénat, et d’autre part poser les objectifs et le rôle que l’on souhaite confier au Sénat au cours de cette mandature ;
- la seconde sera de mettre en place la Commission des moyens de l’Université de Lorraine qui doit contribuer à refonder notre modèle économique et à proposer des lignes directrices de répartition budgétaire.
Ces deux organes devront être pleinement opérationnels fin 2022.
Concernant le budget, après une première allocation partielle prudentielle (80 %) sur la base du modèle 2022, l’objectif est de finaliser cette allocation, au travers des dialogues de gestion, avec comme horizon un budget consolidé proposé aux pôles scientifiques, collégiums, et directions opérationnelles au printemps 2023. En même temps que le budget initial 2023, nous devrons également préparer le budget rectificatif 2022, avec les ajustements habituels augmentés cette année de corrections nécessaires dues à la crise énergétique. Ces points sont programmés pour le conseil d’administration de décembre.
Très rapidement, le projet de contractualisation avec l’État pour 2024-2028 devra ensuite être finalisé, selon un modèle qui peut être amené à évoluer, dans un contexte économique plus qu’incertain à ce jour. L’Université de Lorraine devra alors être se montrer particulièrement proactive, et pas seulement réactive, pour se donner les moyens de ses ambitions.
Sur ce sujet, et c’est sans doute l’enjeu fondamental, une telle vice-présidence ne peut pas être abordée sous l’angle de sujets thématiques circonscrits, dans l’espace ou dans le temps, indépendamment des autres problématiques. Pour mettre en œuvre le projet porté par la présidente, il sera nécessaire d’articuler entre elles l’ensemble des propositions soumises au suffrage d’avril et enrichies des propositions portées dans les conseils. Pour illustrer le propos, les thématiques sociétales de la transition écologique ou de l’égalité-diversion-inclusion, pour ne citer qu’elles, ne peuvent pas se limiter à être des « objets » de la politique mise en œuvre, mais doivent constituer des « éléments structurants » de cette politique. Il s’agit donc de travailler, avec les vice-présidences concernées et l’ensemble de l’équipe politique, sur la construction du contrat d’établissement en imbriquant étroitement l’ensemble des sujets dans la politique de l’université, afin de poser un projet cohérent et lisible.
Pour parvenir à cette articulation, il est nécessaire de développer le dialogue et la connaissance mutuelle de tous les acteurs de l’université, ce qui rejoint la problématique de la synergie déjà évoquée. Cette meilleure connaissance mutuelle doit nous permettre d’accroître la cohérence de notre politique en matière de recherche et formation, de vie universitaire et de lien avec la société, de réduire les redondances et les concurrences internes qui conduisent in fine à la dispersion de nos ressources et de notre potentiel.
L’Université de Lorraine est un tout complexe. Appréhender son pilotage sous un seul angle, qu’il soit budgétaire, scientifique, ou pédagogique, ne peut pas conduire à une mise en œuvre optimale de notre réelle capacité à innover et à nous développer. En étant curieux des autres, en développant les interactions entre les disciplines, les territoires, les composantes, en faisant en sorte que chacune et chacun participe « un peu du tout », plutôt que « totalement d’une partie », nous pourrons développer une « culture UL » qui nous enrichira toutes et tous. Il est là, le véritable enjeu.