[Prix] Maxime Durand récompensé

 
Publié le 3/06/2020 - Mis à jour le 4/06/2020

La Société française de biologie végétale (SFBV) et l'Académie d'agriculture de France (AAF) décernent conjointement, chaque année, un prix pour récompenser une thèse d'excellence dans le domaine de la biologie végétale. Pour l'édition 2020, le prix a été décerné à Maxime Durand qui a soutenu ses travaux de thèse le 5 septembre 2019.

Sa thèse a été réalisée au sein de l’UMR Silva sous la direction de Didier Le Thiec (directeur de thèse) et Oliver Brendel (co-directeur de thèse). Maxime a reçu un financement de la Région Grand-Est et du département EFPA d’INRAe. Une partie du travail de thèse a également été effectué en collaboration avec l’Université de Western Sydney (Australie) à l’occasion d’un séjour de 6 semaines au Hawkesbury Institute. Les expérimentations ont reçu notamment le soutien financier du projet européen Watbio et du projet UP-Trans (labex Arbre).

Le changement climatique implique un changement notable dans les conditions d'alimentation en eau des peupleraies, avec un risque accru de baisse de la production de bois, voire une impossibilité de cultiver le peuplier sur les stations les plus marginales du point de vue de l'alimentation en eau. Optimiser son utilisation en eau pour la production de biomasse permettrait aux plantes de limiter les effets d'une réduction de disponibilité en eau. L'efficience d'utilisation de l'eau (WUE) correspond au rapport entre la quantité de carbone fixée dans la biomasse et la quantité d'eau transpirée par la plante, pour une période de temps donnée. Ces flux se produisent au travers de pores dans l’épiderme des feuilles, les stomates, qui ont la remarquable capacité de faire varier leur degré d’ouverture. Les travaux que nous menons depuis 2003 visent à caractériser la diversité clonale de WUE dans la formule hybride P. deltoides x nigra (peupliers euraméricains) et à étudier les relations possibles entre WUE et productivité. Nous avons, au cours de trois thèses  en collaboration avec l’Université d’Orléans (Monclus, 2006; Fichot, 2010; Rasheed, 2012), approfondi le déterminisme de cette variabilité génotypique en étudiant les traits physiologiques et anatomiques contribuant à WUE chez les peupliers euraméricains. Nous avons pu mettre en lumière le rôle prépondérant des stomates sur WUE et sa diversité. Une des étapes que nous devions franchir était de valider ces résultats sur d’autres espèces de peupliers et en conditions naturelles. 

Les travaux de thèse de Maxime Durand se sont inscrits dans cette lignée. Les travaux effectués jusqu’à peu s’attardaient à comprendre les réponses à l’équilibre des stomates à des facteurs externes (lumière, humidité de l’air, température etc.) ou internes à la plante (concentration en ABA, ...). Mais depuis, des travaux récents ont suggéré qu’une partie de la compréhension de la variabilité de l’efficience d’utilisation en eau des plantes entre des espèces ou des génotypes pouvait trouver son explication dans des dynamiques de fermeture et d’ouverture. Ainsi, les objectifs de la thèse était de caractériser la réponse de quatre génotypes de peuplier à la sécheresse et aux variations atmosphériques environnementales en terme d'efficience d'utilisation de l'eau et qui abordait la notion de changement d'échelle (feuille/arbre). Afin de caractériser les mécanismes en jeu et de les valider dans des conditions naturelles, la thèse devait répondre aux questions suivantes :

  1. Les différences de comportement stomatique entre génotypes de peupliers évoluent-elles quand on passe de conditions de culture contrôlées à des études en plein champ ? Sont-elles dues à certaines variables environnementales (comme l'intensité et la qualité lumineuse, l’humidité de l’air, la température des feuilles et la teneur en eau du sol) ?
  2. De quelle façon ces éléments influent sur l'efficience d'utilisation de l'eau aux échelles foliaire et plante entière et ceci à différentes périodes d'intégration (jour/saison) ?
  3. Quels traits influent sur les caractéristiques de fermeture et d'ouverture stomatique (vitesse et amplitude des réponses) aux niveaux morphologique et moléculaire ?

Maxime a pu montrer pour la première fois le rôle de la dynamique temporelle des stomates sur la transpiration de la plante entière. De plus, l’étude au niveau des cellules stomatiques a révélé des motifs d’expression génique en liens étroits avec la conductance stomatique. Ces traits physiologiques, anatomiques et génétiques pourraient être utilisés comme critères de sélection par les populiculteurs et gestionnaires forestiers. En outre, un caractère particulièrement innovant des travaux est que les résultats obtenus en serre sur l’efficience d’utilisation de l’eau ont été validés en conditions naturelles, offrant la possibilité de cribler à la fois plantations et peuplements naturels à partir de ces traits afin de sélectionner des espèces mieux adaptées à la sécheresse. Cette thèse a ainsi mis en œuvre une démarche de biologie intégrative (du gène à la plante et à la culture) illustrant le rôle clé de l’écophysiologie dans cette démarche intégrative, permettant ainsi de tisser les liens entre les échelles plus fines (physiologie cellulaire) et plus intégratrices (agronomie, sylviculture). 

La thèse s’est traduite par la publication de cinq articles à comité de lecture à fort impact facteur (total de 28) et de deux communications internationales.

Durand M, Brendel O, Buré C, Le Thiec D. 2020. Changes in irradiance and vapour-pressure deficit under drought induce distinct stomatal dynamics between glasshouse and field-grown poplars. New Phytologist https://doi: 10.1111/nph.16525

Durand M, Brendel O, Buré C, Courtois P, Lily JB, Granier A, Le Thiec D. 2020. Impacts of a partial rainfall exclusion in the field on growth and transpiration: consequences for leaf-level and whole-plant water-use efficiency compared to controlled conditions. Agricultural and Forest Meteorology. 282-283 : https://doi.org/10.1016/j.agrformet.2019.107873

Durand M,  Cohen D, Aubry N, Buré C, Tomaskova I, Hummel I, Brendel O, Le Thiec D. 2019. Element content and expression of genes of interest in guard cells are connected to spatiotemporal variations in stomatal conductance. Plant, Cell and Environment 43: 87-102.https://doi.org/10.1111/pce.13644

Bogeat-Triboulot MB, Buré C, Gerardin T, Chuste PA, , Le Thiec D, Hummel I, Durand M, Wildhagen H, Douthe C, Molins A, Galmés J, Smith HK, Flexas J, Polle A, Taylor G, Brendel O. 2019. Additive effects of high growth rate and low transpiration rate drive differences in whole plant transpiration efficiency among black poplar genotypes. Environmental and Experimental Botany 166 : https://doi.org/10.1016/j.envexpbot.2019.05.021

Durand M, Brendel O, Buré C, Le Thiec D. 2019. Altered stomatal dynamics induced by changes in irradiance and vapour-pressure deficit under drought: impacts on the whole plant transpiration efficiency of poplar genotypes. New Phytologist 222 : 1789-1802. https://doi.org/10.1111/nph.15710

Maxime sera invité à présenter ses travaux au congrès de la SFBV en 2021 qui se tiendra à Montpellier et recevra un prix de 500 € lors de la séance solennelle de rentrée de l'Académie d'agriculture de France qui devrait normalement se tenir en automne (si les conditions le permettent).