Point de situation au 19 avril sur la loi ORE et les blocages à l'Université de Lorraine

 
Publié le 20/04/2018

Cher-e-s collègues, chères étudiantes et chers étudiants,

La loi Orientation et Réussite des Etudiants (ORE) fait l’objet de nombreux débats dans les instances de l’université et au-delà, ce dont nous pouvons nous réjouir. De nombreuses questions se posent en effet sur la manière dont elle s’applique, le calendrier dans lequel elle est déployée ou encore les dispositifs qu’elle active.

Ce dont nous ne pouvons pas nous réjouir, en revanche, ce sont les conséquences des modalités choisies par ceux qui souhaitent la combattre. Je pense ici en premier lieu aux semaines de cours qui feront défaut en ALL et SHS, aux sessions d’examen qui sont par endroit réalisées dans des conditions inhabituelles, aux locaux qui sont illégalement occupés, aux dégradations multiples qui ont été constatées.

Je sais que beaucoup d’entre vous souhaiteraient une information plus régulière en interne et je vous écris donc ce soir pour vous informer aussi précisément que possible sur :

  • Les modalités d’application de la loi ORE à l’Université de Lorraine
  • Les moyens venant en appui de cette loi, issus du Plan Etudiants
  • La situation actuelle sur nos campus

 

1.Application de la loi ORE à l’Université de Lorraine

L’Université de Lorraine a augmenté les capacités d’accueil de ses licences générales en tension et de la PACES et a fait globalement des efforts par rapport au nombre des inscrits dans chaque licence 1 à la rentrée 2017. Ces efforts sont accompagnés par des moyens supplémentaires alloués par l’État (Cf. ci-dessous). Près de 25000 lycéens sont actuellement inscrits en classe de terminale en Lorraine et environ 88% auront leur baccalauréat. Les années passées, environ 40% des jeunes bacheliers lorrains s’inscrivaient à la rentrée suivante dans notre université. Nous attendons donc près de 10000 néobacheliers lorrains, 500 de plus que l’année passée. Nous proposons 11000 places en 1ère année de licence générale et 3000 en 1ère année de DUT. Il est donc permis d’envisager relativement sereinement la rentrée 2018 à l’Université de Lorraine.

Sur les 62 choix possibles dans ParcourSup pour les premières années de licence générale de l’Université de Lorraine, y compris la PACES :

  • 44 proposeront un « OUI » immédiatement à tous les bacheliers lorrains. Pour ces formations, l’établissement s’engage à inscrire tous les candidats qui répondront favorablement à cette proposition, sans moyen supplémentaire de l’Etat en cas de dépassement des capacités d’accueil. Nous assumerons collectivement cet engagement.
  • 18 proposeront un « OUI » ou un « OUI en attente » à tous les bacheliers lorrains. La confirmation progressive des vœux doit ensuite permettre de débloquer les situations jour après jour.

Ces positions différenciées reflètent les choix des équipes pédagogiques dont nous tenons compte. Comme l’Université de Lorraine s’y est engagée, tous les bacheliers lorrains pourront trouver une place à l’Université de Lorraine au plus près de leurs vœux (certains d’entre eux ayant pu formuler des vœux sur des formations sélectives exclusivement – DUT, BTS ou CPGE par exemple).

Pour l’année universitaire 2018-2019, l’Université de Lorraine ne proposera pas de réponse « OUI SI » aux candidats aux licences générales dans ParcourSup. A la veille de la mise en place de notre nouvelle offre de formation 2018-2019, il nous semble nécessaire de prendre le temps de la réflexion et de disposer d’un minimum de recul sur la mise en place de la loi avant de préciser l’usage qui pourrait être fait de ce dispositif particulier. Je suis en effet convaincu que la loi offre de nouvelles possibilités pour mieux accompagner les étudiants dans leur entrée dans le supérieur car nous ne pouvons nous satisfaire des situations passées avec 30% de réussite en L1. À nous de conduire une réflexion apaisée et mesurée sur ces questions, dans l’intérêt des étudiants et au bénéfice de nos missions. Nous poursuivons tous le même objectif (mieux accompagner nos étudiants) mais sans forcément donner le même sens aux mots ni interpréter les textes de la même manière. Je suis certain que nous saurons trouver ensemble une voie d’application intelligente de la loi, dans l’intérêt de notre communauté, au respect de ses valeurs et surtout de la réussite de nos étudiants.

 

2.Point sur les moyens du Plan Etudiants

Les moyens du Plan Etudiants, alloués par le ministère en lien avec le Rectorat de l’Académie de Nancy-Metz, se répartissent en plusieurs enveloppes. Nous avons reçu la notification 2018 pour la plupart d’entre elles. Leur affectation est conditionnée au respect par l’Université de Lorraine de ses engagements vis-à-vis de l’État pour l’ouverture de places supplémentaires.

La première enveloppe est une dotation en masse salariale récurrente. Elle permet l’ouverture de 9 nouveaux postes à la rentrée 2018, avec recrutement possible de titulaires dans le cadre de la campagne d’emploi suivante. Sur la base d’un examen des situations (formation en tension, taux de couverture par composante des besoins en formation par les services des enseignants), ces postes sont affectés de la manière suivante : 3 postes en STAPS (2 à Metz, 1 à Nancy), 3 postes en DEG-LMI (2 à Metz, 1 à Nancy), 2 postes pour les enseignements de langues vivantes en ALL-SHS-DEG (2 postes à Metz), 1 poste en IUT.

La deuxième enveloppe est constituée de masse salariale mais peut également être utilisée en fonctionnement. Pour 2018, c’est un apport qui se situera entre 400 000 € (dotation notifiée) et 700 000 € (échanges en cours avec le rectorat), avec poursuite du financement en 2019. Le conseil d’administration du 10 avril a approuvé le fléchage principal de ces moyens sur le développement des moyens d’accompagnement des étudiants dans leur formation (tests d’auto-positionnement, modules de taille variable pour la remédiation concernant les compétences transversales et disciplinaires) qui pourraient intervenir à l’appui de la future réponse « OUI SI ».

La troisième enveloppe est en cours d’instruction par le ministère. Elle correspond à des projets d’investissement sur plusieurs années. L’établissement a déposé dans le cadre de cette enveloppe des projets d’équipements (notamment numériques) et de travaux (aménagement d’espace –Mut@camp2) avec les priorités suivantes :

  • Augmentation des capacités d’accueil et amélioration des conditions d’études en L1
  • Maintien des capacités d’accueil et amélioration globale des conditions d’études en 1er cycle
  • Transformation des pratiques pédagogiques
  • Remédiation ouverte au plus grand nombre

Pour cette troisième enveloppe, l’Université de Lorraine a demandé au ministère un apport de financement de 3 millions d’euros pour un montant total des projets évalués à 7 millions d’euros (2018-2022), le financement de la part « investissement » des projets étant prévu par un prélèvement sur le fond de roulement.

Cette première affectation de moyens fléchés sur la formation doit produire des résultats visibles dans les prochains mois et nous aider à faire évoluer nos pratiques de formation en 1er cycle au bénéfice des étudiants et des équipes pédagogiques. L’Université de Lorraine a fait le choix d’engager les premières actions sans attendre les crédits de paiement.

Une enveloppe nationale à hauteur de 100 millions d’euros par an est assurée par notre ministère pour les quatre prochaines années.

3.Situation sur les campus de l’université

Situation à Metz

A Metz, sur le campus du Saulcy, les 3 bâtiments des UFR ALL-Metz (depuis le 6 avril) et SHS-Metz (depuis le 11 avril) ont été fermés suite au vote de leur blocage par des assemblées générales. Les étudiants ont installé des barricades sur les entrées principales des bâtiments, empêchant de fait l’accueil du public et la poursuite des activités de formation et de recherche. Une demande du comité de mobilisation était de pouvoir occuper le rez-de-chaussée du bâtiment SHS-Metz, y compris la partie qui abrite les services administratifs de l’UFR, ce qui aurait empêché leur fonctionnement et donc l’organisation des examens de fin d’année, notamment. Nous avons proposé en retour au comité de mobilisation la mise à disposition de locaux en journée mais nous ne pouvons pas accepter une occupation permanente, donc y compris la nuit, de ceux-ci.

En fin de semaine dernière, 2 effractions ont été constatées, 1 en SHS par des auteurs non identifiés et l’autre également en SHS par des étudiants du comité qui ont accepté de quitter les lieux sans intervention de la police.

Comme conséquence de l’ensemble de ces éléments, j’ai décidé la sécurisation du campus 24h/24 en faisant appel à une société de vigiles privée, à la fois pour veiller sur les bâtiments et protéger les étudiants.

Les votes réalisés dans les assemblées générales organisées par les étudiants sur le campus du Saulcy donnent des résultats relativement peu tranchés, souvent à quelques voix près, en faveur ou en défaveur du blocage, avec une participation en net recul cette semaine. Les tensions entre partisans des blocages et opposants à cette modalité sont très importantes sur le campus. J’ai donc décidé d’organiser une consultation électronique ce jour, auprès des étudiants des UFR du Saulcy (ALL, DEA et SHS) qui sont directement concernés par les perturbations possibles affectant le calendrier de leurs examens. 78% des étudiants se sont exprimés contre le blocage de leurs bâtiments et pour la tenue des examens dans le respect du calendrier universitaire prévu.

Situation à Nancy

Les cours sont annulés depuis le 22 mars au Campus Lettres et Sciences Humaines de Nancy (ALL et SHS). Le comité de mobilisation occupe le site de jour comme de nuit et a bloqué l’accès au public pour les bâtiments A, B et J. Les personnels administratifs peuvent néanmoins accéder à leur poste de travail (deux interventions ont été nécessaires pour maintenir cet accès).

L’occupation de locaux, de jour comme de nuit, n’a pas été autorisée et ne saurait être davantage tolérée. La présence de personnes étrangères à l’université a été constatée à de multiples reprises. Parmi ces personnes, toutes ne sont pas animées de bonnes intentions : un incident à la BU Lettres a nécessité l’intervention des forces de l’ordre pour sécuriser les personnels et les étudiants présents.

Outre les dégradations quotidiennement constatées, il faut signaler que les locaux qui sont occupés de nuit ne sont pas équipés pour cela. Des personnes présentes ne respectent pas les consignes de sécurité. La présence de matériaux inflammables à l’intérieur leur fait courir un risque important, dont je porte la responsabilité.

Compte tenu de ces éléments, j’ai décidé la présence de vigiles 24h/24 depuis le début de l’occupation et ordonné la fermeture des services de documentation, d’orientation et de vie universitaire depuis le début de cette semaine. Les personnels de ces services sont actuellement en soutien sur les autres sites de l’université pour accroître la capacité des autres localisations à apporter une aide aux étudiants qui le demandent.

Malgré la consultation des étudiants qui ont exprimé leur refus des blocages (70%), les auteurs de ceux-ci n’entendent pas renoncer à cette modalité d’action, privant les étudiants de leurs enseignements et faisant peser des menaces sur la session d’examens.

L’IECA a été victime à deux reprises de tentatives de blocages par des chaînes. La seconde fois, les personnels de l’institut ont été enfermés à l’intérieur du bâtiment. Les services techniques de la présidence sont intervenus pour enlever les chaînes.

Situation générale

Les examens du département ERUDI de l’UFR ALL-Nancy concernant des étudiants à distance en langues qui se rendent à Nancy deux fois par an pour leurs examens, ont pu se dérouler dans des lieux sécurisés. Les autres sites de l’établissement ne sont en effet pas touchés par des blocages et la solidarité entre les composantes de l’université a permis d’accueillir les examens anticipés des UFR ALL, LANSAD et SHS qui étaient auparavant programmés dans des bâtiments bloqués. Qu’il me soit ici permis d’exprimer toute ma reconnaissance à tous les personnels qui déploient une énorme énergie pour que les examens puissent se dérouler dans des conditions aussi bonnes que possible. Qu’il me soit également permis de dire ma reconnaissance à toute la communauté qui a apporté ces dernières semaines des témoignages de solidarité, d’entraide, qui affirment aujourd’hui plus que jamais la force de l’Université de Lorraine.

J’ai entendu certaines voix s’exprimer pour dire qu’il y a largement le temps d’organiser les examens. Ce n’est pas le cas. Outre le nombre important d’épreuves, le respect des délais de convocation impose de débuter les examens le 7 mai pour pouvoir achever la seconde session au 30 juin et donc permettre aux étudiants de libérer leur logement et de travailler pendant l’été s’ils le souhaitent. Les échéances approchent très vite.

J’ai entendu certaines voix appeler à une validation aveugle, automatique, des semestres. Quelle que soit l’appellation que l’on utilise pour enjoliver ces pratiques, elles sont inacceptables.

J’ai entendu certaines voix m’appelant à ne rien faire pour mettre fin aux occupations et blocages. Je prendrai mes responsabilités en tant que président, pour défendre l’intérêt de tous les membres de la communauté universitaire.

J’appelle solennellement à un retour à la raison permettant la tenue de débats dans des conditions respectueuses de ce qu’est l’université. J’ai toujours été ouvert aux discussions, pour autant qu’elles puissent se dérouler dans des conditions permettant un échange serein, mutuellement respectueux, et sur la base de demandes qui ne mettent pas en cause le bon fonctionnement de l’établissement.

Pierre Mutzenhardt, président de l'Université de Lorraine