Dans une étude publiée dans Science, une équipe internationale de chercheurs dresse un état des lieux des avancées récentes sur les catalyseurs utilisés pour transformer le CO₂ en méthanol. Ils analysent les facteurs clés influençant leur performance, les pistes pour améliorer leur stabilité, et les défis restant à relever. L'article couvre aussi les bases historiques et les mécanismes de cette réaction chimique.
Et si on pouvait transformer un gaz polluant en carburant propre ? C’est exactement ce que promet la recherche sur l’hydrogénation du CO₂ : un procédé chimique qui convertit ce gaz à effet de serre en carburants et produits chimiques utiles, comme le méthanol ou le méthane.
« Nous devons repenser notre relation avec le dioxyde de carbone », souligne Robert Wojcieszak (CNRS, L2CM). « Au lieu de le considérer comme un déchet, utilisons-le comme une précieuse ressource. » En combinant le CO₂ capté à de l’hydrogène issu d’énergies renouvelables (solaire, éolien), ce processus devient même écologiquement avantageux, comme l'explique Nils Thonemann (Université de Leiden).
Au cœur de cette magie : les catalyseurs, ces matériaux qui facilitent la réaction. Ils permettent au CO₂ et à l’hydrogène de se recombiner pour créer du méthanol, un carburant potentiel pour l’aviation, la marine ou l’industrie chimique. Le catalyseur industriel le plus utilisé, le CuZnAl (CZA), fonctionne bien, mais a ses limites. « Il préfère une autre réaction que celle qu’on veut », déplore Andrew Beale (University College London). Et avec le temps, il s’use. « Les catalyseurs les plus actifs s’abîment aussi le plus vite », ajoute Nikolaos Dimitratos (Université de Bologne).
Bonne nouvelle : de nouveaux catalyseurs arrivent. Ceux à base d’oxyde d’indium sont particulièrement prometteurs. « La production de méthanol s’améliore constamment », se réjouit Jingyun Je (Université Duquesne). L’un des plus efficaces aujourd’hui contient un mélange de cuivre, d’oxyde de zinc, d’oxyde de manganèse et un support spécial. Il fonctionne à basse température, ce qui est idéal.
Mais les chercheurs voient plus loin. « Le but n’est pas seulement de produire du méthanol, mais de construire un avenir durable grâce à de nombreux produits issus du CO₂ », affirme Liane Rossi (Université de São Paulo). Il faut pour cela créer des catalyseurs plus stables, efficaces et durables, tout en maîtrisant leur fabrication à grande échelle.
D’autres pistes sont explorées, comme les catalyseurs palladium-indium, mais leur coût reste élevé. Comprendre comment et pourquoi les catalyseurs se dégradent est aussi un enjeu majeur. Pour y arriver, l’intelligence artificielle et l’informatique quantique pourraient jouer un rôle clé dans la simulation des réactions.
En résumé, l’hydrogénation du CO₂ ne sauvera pas le climat à elle seule, mais elle offre une solution concrète pour réduire la dépendance aux énergies fossiles dans les secteurs où l’électrification est difficile, comme l’aviation ou la navigation.
« Concevoir de nouveaux catalyseurs reste un défi », conclut Robert Wojcieszak, chercheur CNRS au L2CM (CNRS-Université de Lorraine). « Mais avec de meilleures données, des modèles plus précis et des outils plus puissants, nous pourrons transformer le CO₂ en une ressource précieuse pour un avenir plus propre. »
Reference: J. Ye et al. Science, 2025, 387, adn9388, https://doi.org/10.1126/science.adn9388
Notes:
- Department of Chemistry and Biochemistry, Duquesne University, Pittsburgh, Pennsylvania 15282, United States of America
- Dipartimento di Chimica Industriale “Toso Montanari”, Alma Mater Studiorum Università di Bologna, Viale Risorgimento 4, 40126 Bologna, Italy
- Departamento de Química Fundamental, Instituto de Química, Universidade de São Paulo, Av. Prof. Lineu Prestes 748, São Paulo 05508-000, SP, Brazil
- Institute of Environmental Sciences (CML), Leiden University, 2300 RA Leiden, The Netherlands
- Department of Chemistry, University College London, London WC1H 0AJ
- Université de Lorraine, CNRS, L2CM UMR 7053, F-54000 Nancy, France