Julien Charreau, nouveau membre junior de l’Institut Universitaire de France

 
Publié le 10/09/2020 - Mis à jour le 2/05/2023

Chercheur au CRPG, Julien Charreau vient d'être nommé à l'IUF en tant que membre junior. Nous sommes revenus avec lui sur cette nomination, son parcours ainsi que les recherches qui lui ont permis d'obtenir cette distinction.

Factuel : Pouvez-vous présenter votre parcours ?

Julien Charreau : « Après un DEUG à l’Université de Poitiers j’ai réalisé une licence et une maîtrise à l'ENS de Paris dont six mois à l'université d'Otago. J’ai ensuite obtenu un Magistère à l’ENS de Paris et un DEA à l'Université de Nice Sophia Antipolis au laboratoire Géosciences Azur. Ensuite, j'ai réalisé un doctorat (2002-2005) à l'Institut des Sciences de la Terre d’Orléans et à l'Institut de Physique du Globe de Paris. Après deux années de recherche postdoctorale aux USA (Indiana University en 2007 et au California Institute of Technology en 2008), j’ai rejoint l’Université de Lorraine en tant que maître de conférences. J’enseigne à l’Ecole Nationale Supérieure de Géologie (ENSG) et j’effectue ma recherche au CRPG* . Au cours de ma carrière, mes recherches ont principalement eu pour objectif de mieux comprendre les interactions entre la tectonique, le climat et les processus de surface.
 

Factuel : Grâce à quel projet de recherche avez-vous été lauréat de l'IUF ?

Julien Charreau : "Le projet de recherche m’ayant permis d’être lauréat de l’IUF a pour objectif de reconstruire l’évolution de l’érosion en Afrique de l’ouest depuis 10 millions d’années. L’érosion des paysages est un paramètre-clé de la dynamique de la surface de la Terre. Elle contrôle le taux de production du sol, influence la formation des chaînes de montagne et joue également un rôle clé dans le bilan atmosphérique en CO2. Comprendre "comment, quand et où", les taux d’érosion réagissent aux changements climatiques et tectoniques naturels et, en retour, comment l’érosion affecte ces processus est l’un des défis les plus importants des sciences de la Terre de nos jours. La nature et l'ampleur des interactions entre la dénudation et le climat lors de l’installation des glaciations quaternaires il y a ~2Ma restent controversées. Pour traiter ce problème, une quantification de l’érosion est nécessaire dans les régions jamais englacées et non affectées par des mouvements tectoniques depuis 10 millions d’années.
L'objectif de mon projet est de quantifier les taux d’érosion actuels et passés en analysant diverses archives sédimentaires sur la marge occidentale de l’Afrique tropicale. Ces sédiments sont produits par l’érosion de cette région et certains des minéraux qui les constituent (ex :quartz) contiennent des éléments chimiques dit cosmogéniqes (Béryllium et Aluminium). Ces éléments sont produits dans les roches de surface par le rayonnement cosmique qui bobarde la Terre en permanence. Or, leur concentration est liée à la vitesse d’érosion que subissent les roches de surface. Analyser ces éléments dans les sédiments passés et issus de l’érosion des roches de surface permet donc de reconstruire l’évolution passée de cette érosion. 
Répondre à ces questions n’est pas simplement un enjeu scientifique mais représente également un enjeu sociétal. En effet, la dénudation impacte fortement les paysages qui nous entourent et donc notre milieu de vie. Elle conditionne l'évolution des sols et leur productivité. Elle influence la masse de sédiments transportés par les rivières et le déclenchement de glissements de terrain.
Comprendre comment la dénudation a évolué dans le passé en réponse à des changements climatiques majeurs, permettra, peut-être de mieux prévoir les conséquences du réchauffement climatique en cours sur notre milieu de vie."
 

Factuel : De quelle façon cette reconnaissance universitaire va-t-elle impacter vos projets actuels et à venir ?

Julien Charreau : "Cette nomination à l’IUF va surtout me permettre de libérer du temps pour la recherche et donc, j’espère, me permettre d’avancer plus vite et d’aller plus loin sur mes projets. Il y a tout d’abord la décharge en enseignement qui est conséquente (2/3) mais c’est surtout le financement 15K€ par an pendant 5 ans qui est pour moi le plus appréciable. Je serai libéré, pendant 5 ans, de la course chronophage et inefficace aux appels d’offres et financements. Cette nomination va aussi me permettre d’orienter mes recherches vers un nouveau chantier encore inconnu pour moi, l’Afrique tropicale occidentale. Jusqu’à aujourd’hui j’ai essentiellement étudié les interactions entre la tectonique, le climat et les processus d’érosion en Asie (Tianshan et Himalaya). L’IUF me permet donc de concrétiser un projet qui me tient à cœur et d’explorer de nouvelles régions."
 
* CRPG : Centre de Recherches Pétrographiques et Géochimiques (CNRS-Université de Lorraine)