Optimisation et nouvelles technologies : le nouveau visage de l’usine du futur

 
Publié le 27/07/2018 - Mis à jour le 27/11/2018
Notre mode de vie et nos comportements en tant que consommateurs se traduisent par une consommation de ressources naturelles trente fois plus importante que dans les autres pays, pour un impact sur l'environnement dix fois supérieur. Le défi auquel nous devons faire face devient alors de parvenir à trouver un équilibre acceptable, qui permette à la fois d'utiliser moins de ressources naturelles, mais en améliorant les propriétés des matériaux obtenus. Dans le domaine de la construction, la recherche sur les matériaux, sur leur cycle de vie, sur leur sécurité d'emploi, sur leur impact global, devient, de ce fait, un véritable enjeu de société.

Le 14 juin dernier, l’Université de Lorraine a rassemblé au cours d’un Brunch plus de 50 personnes pour débattre de la thématique « Matériaux, Design et usine du futur : les innovations d’hier et les défis de demain ». La table‑ronde et les interventions du public ont ainsi permis de rappeler cet élément essentiel : le choix d'un matériau ne peut plus seulement être guidé par des considérations techniques, esthétiques ou économiques, mais doit également intégrer sa dimension environnementale.

Notre hôte, Odile LASSERE, est parti d’un constat simple : l’innovation de demain est en marche ! La conservatrice en chef du patrimoine insiste d’ailleurs sur le fait que les idées ne naissent plus dans un cercle restreint, dans un laboratoire ou de la seule volonté d’une direction industrielle mais répondent d’abord à un vrai besoin client. Les innovations sont le fruit de collaboration entre chercheurs, entrepreneurs, commerciaux, usagers. Tous doivent être mobilisés pour qu’elle soit raisonnée.

Ce rendez-vous gourmand a été l’occasion pour Thierry BELMONTE, directeur de l’Institut Jean Lamour, de souligner que l’industrie 4.0 aura besoin de matériaux adaptés aux nouvelles fonctions requises par l’évolution des méthodes et des procédés. L’utilisation de nombreux capteurs sur les lignes de fabrication nécessitera de développer des solutions peu coûteuses en énergie, basées sur de nouvelles solutions matériaux. L’utilisation d’exosquelettes pour soulager les ouvriers dans des tâches difficiles se développera si les alliages nécessaires à leur conception sont assez légers tout en conservant des propriétés mécaniques suffisantes. C'est une problématique que l'on retrouve dans le domaine du transport notamment.

De nombreux défis sont à relever dans le secteur de la fabrication additive qui permet la conception rapide de pièces en 3D. Depuis peu, il est possible de concevoir des pièces capables de se déformer sous l’effet d’un apport d’énergie externe.

Les matériaux de demain devront présenter des propriétés optimisées. D’une part grâce à la modélisation puisqu’elle joue un rôle déterminant dans la compréhension des phénomènes qui contrôlent le comportement des matériaux. Et d’autre part grâce à la caractérisation de ces matériaux à toutes les échelles, depuis l'atome jusqu'à la pièce finie. La transition entre travaux de recherche et industrie devra s'appuyer sur des structures de transfert ad hoc permettant de conserver des activités de recherche fondamentales au meilleur niveau international tout en facilitant un passage rapide vers l'industrie

Christian BOUIGEON, directeur général adjoint en charge de la France de Saint-Gobain PAM, observe également que la dynamique de progrès est lancée. Un produit sur quatre vendu par Saint-Gobain n’existait pas il y a cinq ans. Les matériaux du futur sont également ceux d’hier car ils sont en perpétuelle évolution. En plus d’inventer, l’enjeu est bien de se réinventer pour être plus performant. Dans cette dynamique, le digital est une composante essentielle pour développer les services, améliorer les outils de production comme la supply chain, ou encore mieux gérer les procédures administratives. Le digital offre des perspectives de produits et services nouveaux mais aussi d’optimisation de l’existant, à la condition de bien veiller à la sécurité informatique.

Guillaume TRAP, directeur scientifique du Science Center de Luxembourg, rappelle qu’il est essentiel que chacun, jeunes et moins jeunes, puisse se familiariser avec les propriétés physiques et chimiques fascinantes des matières qui nous entourent. Dans ce centre de découverte, les matériaux représentent un thème transversal qui se décline sur trois espaces : la synthèse des matériaux en salle de chimie (Comment naissent les matériaux à partir de matières premières ?), la mise en forme des matériaux dans un atelier dédié (Comment les machines-outils sculptent les matériaux ?), et enfin la résistance des matériaux (Comment cassent les matériaux en fin de vie ?).

Par ailleurs, l’usine du futur dans le domaine des matériaux sera très certainement plus robotisée qu’aujourd’hui et donc plus déshumanisée. Les musées et science centers joueront alors un rôle important de « concentré de réalité » dans lequel les visiteurs pourront collectivement observer, s’enthousiasmer et comprendre des phénomènes industriels de plus en plus éloignés du grand public.

François WERNER, vice-président délégué à la coordination des politiques européennes, à l'enseignement supérieur et à la recherche à la Région Grand Est, a insisté sur l’importance que jouent les matériaux dans notre économie territoriale.

Enfin, Pascal RAGGI, directeur scientifique du Musée et maître de conférences en histoire contemporaine à l’Université de Lorraine conclue en tant qu’animateur que ce moment d’échanges a mis en relation quatre types d’acteurs impliqués dans l’évolution et l’application des innovations. Précisément, le Brunch a fait dialoguer un industriel, un chercheur, un médiateur scientifique et un représentant politique en montrant comment les secteurs qu’ils représentent sont imbriqués.

Les débats ont mis en évidence deux éléments qui contribuent à la transformation de l’industrie. D’un côté, l’ancrage des technologies dans notre quotidien présent et à venir. De l’autre les savoir-faire scientifiques et techniques entretenus en son sein. Par là-même, nous devons accompagner cette mutation notamment par la formation : les architectes de demain doivent être préparés à relever ce défi.

Pour tout renseignement complémentaire ou recevoir le calendrier des prochains Brunchs, envoyez un e-mail à l'adresse suivante : lebrunch-contact@univ-lorraine.fr

Article rédigé à plusieurs mains. Dessins réalisés par Catherine CRÉHANGE, Illustratrice de propos. Photos prises par Morgane STEFAN, Assistante Brunch