Pourquoi les auteurs devraient garder les droits d'exploitation sur leurs écrits ?

 
Publié le 8/06/2023
Nicolas Fressengeas

Factuel est allé à la rencontre de Nicolas Fressengeas, Vice-président en charge du numérique, des données et de la science ouverte, pour en savoir plus sur la politique de l’établissement en matière de droits de publication. Entretien.

Pourquoi les auteurs devraient garder les droits d'exploitation sur leurs écrits ?

Nicolas Fressengeas : L’écriture d’un article de recherche est un long processus par lequel les auteurs échangent avec des relecteurs souvent par l’intermédiaire d’un éditeur qui organise le processus de relecture par les pairs. Dans le cas où la fin de ce processus est marquée par l’acceptation de l’article pour publication, l’éditeur demande souvent aux auteurs un transfert exclusif de ses droits d’exploitation afin de pouvoir procéder à la publication de l’article.

Ce faisant, les auteurs acceptent de respecter les termes du contrat qui leur est proposé et se défont donc de la possibilité qu’ils avaient d’utiliser leur propre production comme bon leur semblait. Le premier inconvénient de cette cession de leurs droits est l’impossibilité de réutiliser leurs propres travaux, comme les figures, pour d’autres usages, à moins d’en obtenir la permission explicite de l’éditeur. Un deuxième inconvénient est l’impossibilité de déposer immédiatement leurs travaux dans une Archive Ouverte comme HAL, comme le requièrent certaines agences de financement, en particulier l’Agence Nationale de la Recherche.

Sans en faire matière à obligation ou évaluation, l’Université de Lorraine conseille donc à ses chercheurs et chercheuses d’exercer leur droit d’auteur sans en céder l’exclusivité des droits d’exploitation à quiconque afin de garder la maîtrise et les droits d’exploitation de leurs propres productions.

On rappellera néanmoins que, y compris sans action de leur part, les auteurs français restent protégés par la Loi pour une République Numérique (2016), qui leur permet de déposer leurs travaux dans HAL ou toute autre Archive Ouverte, après un embargo de 6 mois pour les disciplines relevant des sciences techniques et médecine et 12 mois pour celle relevant des sciences humaines et sociales.

Comment peuvent-ils le faire en pratique ?

Le processus est assez simple : les auteurs peuvent choisir d’appliquer la licence de leur choix sur les différentes versions de l’article qu’ils soumettent à l’éditeur pendant le processus de relecture par les pairs. S’ils l’indiquent explicitement, cette licence est irrévocable. L’Université de Lorraine conseille à ses chercheurs l’utilisation d’une licence Creative Commons, et notamment celle de la licence Creative Commons Attribution (ou CC BY). Le choix de cette dernière est néanmoins obligatoire dans le cadre des projets soutenues par l’Agence Nationale de la Recherche.

En pratique, il suffit d’insérer un texte explicite dans l’article ou dans le courrier de soumission l’accompagnant, qui peut être aussi simple que « This work is licensed under a CC BY 4.0 license. (2023) ».

Ainsi, l’ensemble des versions de l’article ayant été réalisées et expertisées lors du processus de relecture par les pairs sera soumis à cette licence, y compris la version acceptée par l’éditeur. Par conséquent, lors du transfert des droits d’exploitation à l’éditeur, celui-ci ne s’appliquera qu’à la version mise en page par l’éditeur pour publication, les auteurs gardant la possibilité d’exploitation de leurs articles.

Comment l'établissement les accompagne-t-il ?

L’Université de Lorraine soutient tout d’abord ses chercheuses et chercheurs dans cette démarche à travers les votes unanimes en sa faveur de ses Conseils Scientifique et d’Administration.

D’un point de vue pratique et au-delà du présent article, l’Université de Lorraine propose, sur son site dédié, une fiche pratique pour mettre en œuvre cette stratégie en 4 étapes simples. Cette fiche s’inspire du guide intitulé « Mettre en œuvre la stratégie de non-cession des droits sur les publications scientifiques » qui a été publié par le Comité national pour la Science Ouverte.

En cas de questions restées en suspens, ou de difficultés rencontrées avec certains éditeurs lors de la soumission de manuscrits sous licence, les membres du Comité Opérationnel pour les Publications Ouvertes (copo-contact@univ-lorraine.fr), ainsi que le réseau des correspondants HAL (hal-contact@univ-lorraine.fr) peuvent être mobilisés pour apporter une aide personnalisée.

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