Portrait de Lorenzo Vianello, doctorant au CRAN (CNRS et Université de Lorraine) et dans l'équipe Larsen du Loria (CNRS, Inria et Université de Lorraine) afin d'en savoir plus sur les enjeux de sa thèse née dans le terreau interdisciplinaire du projet C-SHIFT et d’aborder la question de la transférabilité de cette recherche en milieu industriel.
Factuel : Pouvez-vous présenter le sujet de votre thèse et son articulation avec le consortium C- Shift ?
La thèse est née dans le contexte du projet C shift. L'idée était d'évoluer dans l'industrie du futur, et en particulier, nous nous sommes intéressés à la manière dont les robots collaboratifs pouvaient améliorer la performance et la qualité du travail. La particularité de ce type de robot est de permettre des interactions physiques entre le robot et l’humain dans la perspective d'un travail collaboratif. Pour ce faire, plusieurs aspects doivent être pris en considération. Tout d'abord, le point de vue de l’humain : nous devons observer et enregistrer ce que fait l'humain pour avoir une visualisation en ligne et aussi une évaluation des mouvements humains et de la qualité de ces mouvements. Par exemple, pour l'évaluation ergonomique, nous avons essayé de nous concentrer sur l'effort que fait l'homme. D'un autre côté, nous devons gérer le comportement du robot. Cela se fait généralement en contrôlant le robot de manière à ce qu'il prenne en compte ce que fait l’opérateur humain. Et pendant ce temps, alors que nous considérons les deux agents individuellement, nous devons également observer quand il y a une interaction physique et pour ce faire nous explorons les concepts de coopération et de collaboration.
Factuel : Qui est le leader ? Peut-être l'homme ou la machine, et à côté de cela, quelles sont les implications en termes d'ergonomie et de sécurité ?
C'est une bonne question et nous avons pris ces questions en considération. Traditionnellement dans l'industrie, l'homme dirigeait les opérations et le robot se contentait de les suivre afin de préserver l'homme et d'éviter tout contact dangereux. Aujourd'hui, ce que nous essayons de faire, c'est de donner un peu plus de « pouvoir » au robot. Cela peut être très intéressant pour les mouvements que l'homme exécute d'une manière qui peut lui nuire. C'est particulièrement vrai pour les mouvements répétitifs qui peuvent entraîner des troubles musculosquelettiques. Les robots ont le pouvoir de les corriger en imposant, pendant l'interaction physique, des trajectoires moins dangereuses pour l'homme. Pour y parvenir, le robot doit être informé des mouvements humains et doit avoir un rôle plus prédominant dans la collaboration.
Factuel : Qu'en est-il de la transférabilité de vos recherches et du bénéfice pour l'homme ?
Pendant ma thèse, nous avons surtout travaillé en laboratoire, il est donc difficile d'évaluer comment les cadres théoriques que nous avons proposés pourraient être directement utilisés dans un contexte industriel, mais nous avons essayé de concevoir des algorithmes très généraux. Par exemple, nous avons travaillé sur la prédiction de la posture humaine et nous avons conçu des mouvements et trajectoires qui sont inspirés de configurations industrielles. Et nous procédons de la même manière lorsque nous essayons d'évaluer la posture du corps humain, puisque pour contrôler le robot, nous comparons des mouvements qui sont assez courants dans le milieu industriel : une tâche de précision et un mouvement dynamique répétitif. Nous avons essayé de rester très général dans la mise en œuvre de telle sorte qu'un jour tous les produits que nous concevons pourraient être directement appliqués dans le domaine industriel. De plus, nous avons essayé de formuler une implémentation qui ne nécessite pas de programmer le mouvement du robot à chaque fois. Nous pensons qu'il s'agit là d'un autre aspect important des robots collaboratifs qui permet aux non-experts de les utiliser.
Factuel : Pensez-vous que votre thèse et le projet C-SHIFT vous ont donné de nouvelles opportunités en termes de recherche et de projet professionnel ?
Je pense que oui, bien sûr, car j'ai appris beaucoup de choses provenant de personnes dans différents domaines y compris sur des questions qui n’étaient pas directement liées à mes études. Cela m'a permis d'élargir mon champ d'intérêt à des sujets tels que l'ergonomie, l'Industrie du Futur et la psychologie humaine. Je comprends mieux maintenant ce que je veux faire à l'avenir. Je me suis intéressé aux robots pour la rééducation, mais j'ai également développé un intérêt pour les robots utilisés dans l'industrie et l'agriculture en contact étroit avec les travailleurs.
Le projet C-Shift est un projet pluridisciplinaire soutenu par Lorraine Université d'Excellence et France 2030 réunissant l'expertise de plusieurs structures : AIP-PRIMECA, le Cerefige, le CRAN, ErgoSim, le Devah, le LGIPM, le Loria, PeRseuS, GHM Eclatec, l'INRS, Thyssenkrupp.