[Hommage] Alain Jacques, chercheur à l’Institut Jean Lamour

 
Publié le 17/01/2022
Alain Jacques

Alain Jacques, directeur de recherche CNRS à l’Institut Jean Lamour (IJL), nous a quittés le 30 décembre 2021. Son équipe et ses collègues du laboratoire lui rendent ici hommage.

L’IJL et son équipe Physique, Mécanique et Plasticité ont perdu un chercheur et, comme vous le savez, "un seul être vous manque et tout est dépeuplé". Alain Jacques était un collègue et un ami avant tout.

Alain devient ingénieur de l'ESSTIN (Polytech Nancy) en 1981. Après un DEA en Science des Matériaux à Nancy, il décroche une bourse de thèse au LMPSM, le Laboratoire de Métallurgie Physique et Sciences des Matériaux et, en juin 1984, il obtient le titre de Docteur Ingénieur de l'Institut National Polytechnique de Lorraine. Il intègre, en octobre de la même année, la section 7 du CNRS en tant que chargé de recherche, avant de passer ensuite en section 5. Il se voit décerner 5 ans plus tard la Médaille de Bronze du CNRS pour la qualité de ses travaux de recherche. En 1992, il part travailler un an au Department of Materials de l'Université d'Oxford. En 2003, il obtient son habilitation à diriger des recherches et est promu directeur de recherche la même année.

Avec l’intégration en 2009 à l’Institut Jean Lamour du Laboratoire de Physique des Matériaux, dans lequel Alain œuvrait, il devient le responsable de l’équipe Physique, Mécanique et Plasticité, de 2011 à 2013. Alain s’engage à ce moment-là dans HERMeS, un projet de grande envergure de la Mission Métallurgie : la construction d’une ligne de lumière haute énergie à l’ESRF (European Synchrotron Radiation Facility) à Grenoble, dédiée aux études métallurgiques in situ pour les équipes de recherche françaises (une vingtaine de laboratoires) et européennes. Ce projet devrait finalement voir le jour sous une forme assez différente à travers DIADEM (Développer des matériaux innovants, performants, durables et issus de matières premières non critiques et non toxiques), financé par le 4e Programme d’Investissements d’Avenir (PIA4).

Alain développe alors ses travaux autour de 2 axes majeurs :

  • Caractériser la plasticité à haute température des alliages métalliques par diffraction de rayons X in situ au synchrotron (avec une priorité sur les superalliages monocristallins et la modélisation par FFT des variations de la position et la forme des pics de diffraction).
  • Corréler l’évolution des pics de diffraction à l’évolution de la microstructure, telle que la densité de dislocations : autrement dit, faire le lien entre plasticité et diffraction.

Ces deux aspects vont l’occuper jusqu’à la fin. Il s’impliquera dans la vie du Laboratoire d’Excellence DAMAS (Design des Alliages Métalliques pour l’Allègement des Structures) dont il était membre du conseil scientifique.

Passionné par les monocristaux, il était un spécialiste mondialement reconnu de la plasticité. Il ne se pliait guère aux modes et se voulait libre : libre penseur, libre acteur de ses choix, profondément passionné. Il a largement contribué à l’étude de la plasticité inter-granulaire, puis de la fatigue oligo-cyclique du silicium et de la fatigue uniaxiale des superalliages monograins, avec, en fil rouge, un intérêt toujours affûté pour tous les aspects de la déformation dominée par les dislocations. A la base de plusieurs développements techniques majeurs pour des expériences de déformation in situ au synchrotron de Grenoble, il avait, à 62 ans, gardé une passion intacte pour son métier de chercheur, illustré par ces nombreux projets naissants ou encore en cours.

Alain était un homme avec lequel on s’entendait bien car, dès que l’on était avec lui, on en arrivait vite à s’interroger sur le fond des choses, mais aussi ensuite à en rire, car il était doté d’une bonne dose d’humour. Il savait poser un regard critique sur le monde autour de lui. Tous ceux qui le connaissaient avaient appris à apprécier la personne qu’il était, ce qui explique à quel point il va désormais manquer à tous ceux qui l’ont côtoyé.

Alain était un chercheur hors pair. Il était original dans le sens où il posait toujours les bonnes questions, tout en plantant son regard profond dans nos yeux quand nous faisions des séminaires. Il avait une vivacité d’esprit et s’intéressait à tous les sujets. Doté d’un franc-parler bien à lui, nous avons toujours eu avec lui des discussions scientifiques pointues, enrichissantes et passionnées. Alain s’était toujours montré arrangeant, de bonne composition, réfléchi, humain, aidant. Même sous un jour un peu fermé et très discret, nous savions qu’un grand cœur se cachait. Nous garderons également en souvenir tous les bons moments conviviaux passés ensemble, qu’il ne manquait jamais et auquel il aimait participer.

Cher Alain, tu as tiré ta révérence bien trop tôt et tu vas laisser un grand vide derrière toi. Nous te disons tous au revoir et te regrettons déjà, mais nous garderons un excellent souvenir de toi. Nous continuerons à avoir de nombreuses discussions scientifiques en pensant à toi, car nous savons que c’est ce que tu voudrais que nous fassions.

Alain, même si tu laisses une équipe, un département, un institut et ta communauté scientifique en deuil et, même si nous aurons du mal à surmonter ton départ prématuré, tu es parti heureux et la tête pleine de projets. Nous garderons dans nos cœurs cette belle image de toi.

Alain, repose en paix.