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Réduire les médicaments pour mieux soigner les résident.es d’EHPAD


Temps de lecture : 4 minutes

Ce 29 août 2025, l’étude RETREAT-FRAIL, coordonnée par le Pr Athanase Benetos, professeur de médecine interne et de gériatrie au CHRU de Nancy au laboratoire DCAC* (CHRU de Nancy, Inserm, Université de Lorraine), paraît dans le prestigieux New England Journal of Medicine. Elle montre qu’il est possible de réduire les traitements antihypertenseurs chez les résidents d’EHPAD notamment chez les patients les plus fragiles, sans augmenter la mortalité ni les effets indésirables, chez les patients très fragiles.

Une première mondiale sur la déprescription chez les personnes âgées

RETREAT-FRAIL est le premier essai clinique randomisé au niveau international à évaluer l’intérêt d’une réduction progressive des traitements antihypertenseurs chez des personnes très âgées, souvent polymédiquées, vivant en EHPAD. Son objectif : répondre à une question clinique essentielle dans un contexte de prévention de la surmédication.

Une étude rigoureuse menée auprès de plus de 1 000 résidents

L’étude a inclus 1 048 résidents âgés de 80 ans ou plus, traités par au moins deux antihypertenseurs et ayant une pression artérielle systolique inférieure à 130 mmHg. Ils ont été répartis après randomisation en deux groupes : – un groupe interventionnel, avec une réduction progressive des traitements selon un protocole standardisé, – un groupe témoin, poursuivant les soins habituels. Le suivi médian a été de 38,4 mois. Le critère principal était la mortalité toutes causes confondues. D’autres paramètres ont été suivis : événements cardiovasculaires, qualité de vie, état fonctionnel, polymédication, décès non cardiovasculaires et liés au COVID-19.

Des résultats rassurants et sans risque pour les patients

Au cours du suivi moyen de 38,4 mois, le nombre moyen de médicaments antihypertenseurs dans le groupe de la réduction thérapeutique est passé de 2,6 à 1,5 ce qui a entrainé une légère hausse de la pression artérielle (+4,1 mmHg en moyenne), sans impact sur la mortalité. La stratégie de réduction du traitement n’a pas eu d’effet négatif sur les événements cardiovasculaires, la qualité de vie, les chutes ou les effets indésirables graves. Un signal encourageant a été relevé chez les patients les plus fragiles, qui pourraient tirer un bénéfice particulier de cette stratégie. De plus, le nombre de décès liés au COVID-19 était plus faible dans le groupe ayant bénéficié de la déprescription.

Une avancée pour une médecine plus individualisée en EHPAD

L’étude n’a certes pas montré que la déprescription améliorait la mortalité (objectif initial) mais l’analyse des résultats sur plus de 1000 patients montre que la réduction du nombre des traitements antihypertenseurs chez des personnes âgées fragiles lorsqu’elle est faite selon des règles précises peut être envisagée sans soulever de problèmes de sécurité. Ainsi, les résultats de cette étude contribuent à la lutte contre la polymédication qui constitue un problème majeur chez les personnes âgées, fragiles.

Une étude 100 % française, saluée à l’international

L’étude a été conçue et coordonnée par l’équipe de Gériatrie du CHRU de Nancy dirigée par le Pr Athanase Benetos (premier auteur), avec le soutien du laboratoire lorrain Décompensation Cardiaque Aigue et Chronique – DCAC (CHRU de Nancy, Inserm et Université de Lorraine) et de la Fédération Hospitalo-Universitaire sur le vieillissement cardiovasculaire – FHU CARTAGE (CHRU de Nancy et Université de Lorraine). 14 équipes hospitalo-universitaires françaises et 110 EHPAD ont au total participé à cette étude RETREAT-FRAIL a été entièrement financée par des fonds publics (Programme Hospitalier de Recherche Clinique national, Programme RHU Fight Heart Failure, ARS Grand Est). L’étude a été soutenue par le Centre d’Investigation Clinique-P du CHRU de Nancy et par le réseau de recherche clinique FCRIN INI-CRCT (coordinateur Pr. Patrick Rossignol, dernier auteur).

Un suivi à long terme toujours en cours

Un suivi post-randomisation est actuellement mené sous la direction du Dr Sylvie Gautier (CHRU de Nancy), afin d’évaluer les effets à long terme de la stratégie de déprescription. Ce suivi repose sur des contacts réguliers avec les soignants des EHPAD où les patients de l’étude RETREAT-FRAIL résident.

*Laboratoire DCAC : Défaillance cardiovasculaire aigüe et chronique (ChRU de Nancy, Inserm, Université de Lorraine)