Logo UL avec lien vers le site de l'Université de Lorraine

Sur la trace des mineurs de l’Antiquité : Un percuteur en pierre révèle les gestes du passé


Temps de lecture : 4 minutes

Découverte d’un artefact lithique aménagé sur galet dans les haldes des mines de « La Grande Montagne » (Commune de Haut-du-Them – Château-Lambert – Haute-Saône) Campagne de fouilles 2025 –

Dans le cadre des recherches archéologiques menées en 2025 sur le site minier de La Grande Montagne, localisé dans les Vosges méridionales sur le territoire de la commune de Haut-du-Them – Château-Lambert (Haute-Saône), en limite de la Franche Comté et de la Lorraine (Vosges), une pièce lithique atypique a été mise au jour dans un contexte de déblais miniers (haldes) associés au percement de l’ancienne galerie d’exhaure du travers-banc Saint-George.

Il s’agit d’un galet de forme ovoïde en diorite présentant une série de retouches bifaciales intentionnelles sur la partie proximale, accompagnées de traces d’utilisation périphériques. L’analyse techno fonctionnelle suggère un outil de percussion délibérément aménagé, utilisé dans les activités de fracturation de la roche pour en extraire la chalcopyrite (minerai de cuivre). La morphologie du galet, la préparation du tranchant ainsi que la nature des traces d’esquillements, indiquent une maîtrise gestuelle et une fonction spécialisée, compatible avec des actions de percussion lancée. Cet artefact, intégré à un niveau de haldes datées par le 14C entre le XVe siècle et le début du XVIe siècle, pourrait témoigner, selon toute hypothèse, d’un outil utilisé sur site dans le cadre de travaux miniers plus anciens. Au cours des dernières campagnes de fouilles, plusieurs percuteurs sur galet ont été mis au jour. Cette pièce n’est donc pas isolée dans le contexte.

Le site de La Grande Montagne est l’un des plus vastes complexes miniers anciens du Sud des Vosges, s’étendant sur plus de 1,2 km le long du versant sud-ouest. La zone de fouille est localisée dans les haldes de Saint-Georges, un ensemble stratifié de remblais miniers liés à cette exploitation. Ces haldes, en grande partie bouleversées au début du XXe siècle pour en extraire le molybdène, ont cependant conservé des niveaux en place qui témoignent de l’activité des ateliers de préparation mécanique des minerais de cuivre : concassage, tri (sheidage), lavage. Les vestiges miniers des travaux de Saint-George, où  cet artefact a été découvert, proviennent delon toute hypothèse d’une activité minière antérieure au percement des travaux modernes. La galerie, longue de 390 m, dont 180 m sur le filon, assurait alors le drainage des eaux d’exhaure pour l’exploitation. Les recherches actuelles visent à cartographier les zones de traitement du minerai, identifier les outils associés et préciser la chronologie des différentes phases d’occupation.

Cette nouvelle découverte s’inscrit dans une dynamique de réévaluation des techniques employées dans les chantiers miniers anciens du Massif vosgien. Elle met en évidence une forme d’outillage sur galets, encore peu documentée, et souligne l’intérêt de l’étude archéologique des haldes secondaires comme témoins d’activités de traitement primaire des minerais et de gestes techniques, proches des zones d’extraction. Des analyses complémentaires – études de macrotraces, analyse des micro-usures, pétrographie comparative, expérimentation in situ – sont en cours afin de confirmer la fonction exacte de ces outils et leur intégration dans la chaîne opératoire minière ancienne.

Les recherches bénéficient du soutien financier du Conseil Départemental de Haute-Saône et du Service Régional de l’Archéologie/Direction Régionale des Affaires Culturelles de Bourgogne Franche-Comté au titre du programme national P.25 (Histoire des techniques, de la Protohistoire au XVIIIe siècle et archéologie industrielle). Elles s’inscrivent dans le cadre d’un programme de recherche intitulé : Ressources minérales et territoires, de la Préhistoire au Moyen Âge, avec l’appui de l’Université de Lorraine.