L’écoconstruction : entre bon sens et exigences normatives …Retour sur le brunch du 20 février

 
Publié le 26/03/2018 - Mis à jour le 10/05/2023
On parle de construction durable ou d’écoconstruction pour qualifier un ensemble d’éléments qui participent à valoriser les économies d’énergie et la protection de l’environnement, dans le cadre du bâtiment. L’objectif final étant d’atteindre une haute performance énergétique (moins dépenser de ressources énergétiques et favoriser les solutions naturelles), d’optimiser le confort (isolation phonique) et la santé des occupants des bâtiments, mais aussi de privilégier des matériaux de qualité, en misant sur leur exemplarité sanitaire et environnementale. Depuis de nombreuses années, et toujours avec de belles perspectives d’amélioration, le bâtiment s’oriente vers des démarches et des pratiques plus écologiques, liées à la construction.

La réglementation, nationale comme européenne, impose le respect d’un cahier des charges particulièrement strict, en matière de choix de matériaux, d’étiquetage, de solutions thermiques, mais aussi de procédures à respecter lors de la construction ou de la rénovation, procédures qui permettront l’obtention de labels…

Jean-Paul DAUL, président de la Chambre des Métiers et de l’Artisanat pour la Meurthe-et-Moselle, a accueilli les participants au Brunch organisé le mardi 20 février dernier, au sein du CNIDEP à Laxou, autour de la thématique de l’écoconstruction. Cette manifestation coordonnée conjointement par la Direction des Partenariats et le Service Universitaire d’Ingénierie et d’Innovation Pédagogique (SU2IP) de l’Université de Lorraine a placé le développement durable et plus particulièrement l’écoconstruction sur le devant de la scène.
Le choix du lieu n’a pas été fait au hasard. Bâtiment HQE (Haute Qualité Environnementale) inauguré en 2010, le CNIDEP est incontestablement une formidable vitrine de l’écoconstruction. S’adressant à la jeunesse, il insiste sur le fait que les bâtiments d’aujourd’hui et de demain permettront de vivre plus confortablement, avec des coûts de fonctionnement mieux maîtrisés.

Puis, Jérôme EMONOT, sous-directeur des Partenariats à l’Université de Lorraine et animateur de cette manifestation, présente les 4 intervenants de la Table Ronde, qui proposeront leurs visions respectives d’un bâtiment écoconstruit, et favorise les échanges avec le public.

C’est Philippe MUCCHIELLI, directeur du CNIDEP, qui débute en précisant que l’établissement constitue une forme de bâtiment de démonstration, pour faire bénéficier aux entreprises artisanales de l’Est des apports relatifs aux éco-matériaux. Le choix des entreprises fut cornélien et l’architecte a été confronté à des exigences particulières, inhabituelles à l’époque.
« Ce bâtiment est compact, avec des ouvertures au sud uniquement, structure en bois des Vosges, entièrement isolé (sol, plafond et murs). Sur les parois extérieures, nous avons des ouates de cellulose, triple vitrage et sol isolé avec du liège (performance acoustique). Pour chauffer ce bâtiment, nous utilisons la géothermie ultra performante, ballon thermique isolé, solaire thermique, double flux. L’ensemble est naturel, copeaux de bois compressé, peinture minérale. Enfin, le directeur précise que le bâtiment est entièrement démontable et recyclable ».
Le coût de construction de ce type d’édifice reste plus élevé d’environ 20% comparativement aux tarifs traditionnels. Pour autant, le résultat en terme de performance énergétique s’avère probant. En effet, le coût de fonctionnement du CNIDEP dans ce domaine n’est que de 41 € par mois. Parmi ses nombreux atouts, nous citerons l’absence de COV (composés organiques volatils), la très faible présence d’ondes…

Puis, Mohamed EL GANAOUI, enseignant-chercheur à l’IUT de Longwy, au département « Génie Thermique & Énergétique » explique que la passerelle entre le « mesurable » et le « non mesurable » constitue le défi des éco-matériaux et des matériaux bio-sourcés. Il précise qu’il y a encore beaucoup de définitions approximatives et même contradictoires, car ce sont des notions encore nouvelles. Le professeur indique qu’il s’agit de s’orienter désormais vers une pédagogie innovante tout en revenant parfois en arrière sur la manière d’apprendre… « Pourquoi ces équations, d’où viennent-elles, pour quelle raison et surtout dans quel but ? ». Enfin, il fait référence à une nouvelle approche en plein essor, le Building Information Modeling (BIM), une maquette numérique qui permet notamment de mieux comprendre les phénomènes, les mesurer, les quantifier et les contrôler.

Christophe GABRIEL, ingénieur d’études au SU2IP évoque les travaux menés actuellement, sur la filière Énergie-écoconstruction, en matière de transformation pédagogique des diplômes, dans le cadre de la Formation Tout au Long de la Vie (formations initiale et continue). L’objectif principal est de renforcer le niveau d’employabilité des personnes formées, en renforçant l’approche théorique par des activités intégratrices, en s’appuyant également sur la formation à distance. Cette modularisation des diplômes aboutira à la création de blocs de compétences, répondant aux exigences propres à ces métiers émergents. Un point essentiel à pas occulter est que 80% du marché du bâtiment, dans les années à venir, concernera la rénovation et la réhabilitation de maisons, résidences, locaux professionnels, bâtiments publics…

Marie-Odile GERARDIN de la société Gérardin Connecteur d’Énergies et Présidente de la Chambre Syndicale des installateurs électriciens de Meurthe & Moselle souligne les mutations des métiers avec l’intégration des exigences de la COP21 en terme de diminution des émissions de CO2, l’impact de la Réglementation Thermique 2012 exigeant la formation impérative des électriciens et la montée en compétences générale de ces métiers. Elle insiste sur l’émergence de la notion de « Lean Management ». Elle conclut avec pragmatisme : « Ces contraintes, il faut en faire un atout au sein de nos entreprises. » Tout en précisant : « Si on revient sur du bon sens, on aura tout gagné. »

Francis SIGRIST, spécialiste du Feng Shui (eau & terre en chinois), insiste sur l’importance de faire preuve d’un bon sens « paysan » pour essayer de compenser le poids de normes qui ont une véritable utilité, mais qui ne doivent pas devenir trop lourdes, ni trop présentes... « Il faut savoir regarder et ressentir les choses. » Sa méthode repose essentiellement sur la décoration et la mise en place d’initiatives pour permettre à l’usager d’un bâtiment de se sentir plus à son aise.

Vincent HUAULT, Vice-Président délégué à l’immobilier et à la transition énergétique à l’Université de Lorraine, précise qu’il est important de former les utilisateurs d’un bâtiment, sans quoi les meilleurs équipements ne serviraient à rien.

En conclusion, au-delà des labels, la réussite d’un bâtiment éco-construit réside dans une approche harmonieuse, réfléchie et partagée par de multiples acteurs (professionnels du bâtiment, de l’architecte au chef de chantier, en concertation avec les usagers) pour aboutir à un mariage harmonieux entre plus de pertinence et plus de performance.

Pour tout renseignement complémentaire ou recevoir le calendrier des prochains Brunchs, envoyez un e-mail à l'adresse suivante : lebrunch-contact@univ-lorraine.fr

Article rédigé par Christophe GABRIEL, ingénieur d’études au SU2IP.
Dessins réalisés par Catherine CRÉHANGE, Illustratrice de propos. Photos prises par Morgane STEFAN, Assistante Brunch