Zoom sur Pauline Pelissier, ambassadrice de la lutte contres les discriminations

 
Publié le 10/04/2017 - Mis à jour le 22/05/2023

Primée l’année dernière au concours de l’Observatoire de la vie étudiante (OVE) avec son mémoire portant sur le "harcèlement de rue", Pauline Pélissier a intégré la cellule mission égalité diversité de l'Université de Lorraine en tant qu’ambassadrice. Elle est volontaire-animatrice depuis le mois de janvier au sein du réseau DADIE (Diversité Anti-Discrimination, Inclusions et Egalité) et développe auprès des étudiants sur les campus nancéens et messins des actions de préventions et de lutte contre les discriminations. La jeune femme a 6 mois pour consolider et développer un réseau d’étudiants engagés.

Faisons un petit bilan mi-parcours de sa mission …

Comment définirais-tu ton expérience après ces quelques semaines passés au sein de la cellule ?

Pauline Pélissier : Je suis maintenant en poste depuis 3 mois à la mission Egalité-Diversité et c'est une expérience qui a été très enrichissante pour moi. J'ai appris beaucoup et rapidement, dans plusieurs domaines, et acquis de l'expérience supplémentaire dans d'autres (montage de projets, organisations d'événements, communication...). Cela m'a aussi permis de mettre en place des projets qui me tenaient à coeur comme l'exposition Paye Ta Fac qui est restée en place dans la Maison De l'Etudiant pendant une dizaine de jours, et a suscité beaucoup de réactions de la part des étudiants et des personnels.

Tu t’es occupé depuis ton arrivée de 2 grands évènements : la journée internationale de la femme en mars et la semaine d’éducation et d’actions contre le racisme et l’antisémitisme dernièrement. Les étudiants et le personnel universitaire te paraissent-ils réceptifs à ces questions de discrimination en général ?

PP : Ces événements n'ont pas eu le succès attendu puisque leur fréquentation a été assez faible. Je ne sais pas si cela signifie que les étudiants et les personnels ne sont pas intéressés par ces thématiques, mais d'une manière générale nous avons des difficultés pour attirer du monde lorsque nous organisons des manifestations. Elles ont plus de succès lorsque l'Université de Lorraine les co-organise avec des associations ou instances extérieures, ce qui mobilise différents réseaux. Néanmoins, les soirées de théâtre-forum organisées avec l'Afev et la compagnie de théâtre Questions d'Epoque durant la Semaine d'Education et d'Actions Contre le Racisme et l'Antisémitisme ont permis des débats passionnés entre les spectateurs. Nous devons donc trouver la bonne formule et la bonne communication pour attirer des personnes extérieures et pas uniquement celles qui sont déjà sensibilisées aux thématiques de lutte contre les discriminations.

Tu viens de publier dans factuel, un article à l’occasion de la Semaine Internationale de Lutte Contre le Harcèlement de Rue.

D’après toi, la lutte contre les discriminations passe-t-elle obligatoirement par une rééducation de nos comportements ?

PP : Oui je pense que c'est le point le plus important dans la lutte contre les discriminations. Sanctionner, mettre en place des lois etc, c'est nécessaire, mais ça ne fait pas forcément changer les comportements dans les faits. Informer, prévenir, communiquer sur ces sujets, sensibiliser les gens, c'est la priorité selon moi. Il faut déjà faire prendre conscience aux personnes qui ne sont pas touchées par ces discriminations, et qui les véhiculent parfois même inconsciemment, qu'elles existent. Très souvent, si une personne ne vit par une situation, elle a l'impression qu'elle n'existe pas. C'est le cas avec le harcèlement de rue, qui est encore (trop) souvent nié, on accuse les victimes qui témoignent de mentir, etc. Parce que ces personnes qui nient ces expériences de harcèlement de rue, n'y sont pas confrontées, elles ne se sont peut-être même jamais questionnées là-dessus. C'est important d'essayer d'objectiver sa propre position, et de ne pas dénigrer ce que vit notre voisin(e). On peut tout simplement commencer par en parler autour de soi, et écouter. Sur le harcèlement de rue, les femmes de votre entourage ont probablement toutes une expérience à raconter. Et puis on communique tellement dessus actuellement, il y a énormément de supports simples, rapides et ludiques pour s'informer, comme les tumblr Paye Ta Schnek ou le Projet Crocodiles pour n'en citer que deux. Et c'est valable pour toutes les formes de discriminations.

Quels sont d’après toi les actes discriminants les plus courants que nous commettons parfois/souvent sans nous en rendre compte ?

PP : La première chose à laquelle cela me fait penser, c'est le tumblr Paye Ta Fac, dont je parlais toute à l'heure. Au départ, ça a simplement l'air de quelques remarques, anodines, qui ne sont "pas méchantes" et puis on se rend compte que mis bout à bout, toutes ces "petites" remarques contribuent à véhiculer des clichés sexistes, à inférioriser un sexe. Parfois ces phrases dites par des enseignants, des étudiants ou personnels, regroupent plusieurs critères de discriminations, par exemple le sexe et l'origine ou la religion. Pour autant, les auteurs n'ont parfois même pas conscience de la portée de leurs propos et ne comprennent pas que l'on puisse s'en offusquer. On ne peut pas se cacher derrière l'humour, à partir du moment où cela blesse une personne ou un groupe. Il faut commencer par faire attention à ce que l'on dit, on véhicule tous des propos discriminants rien que dans nos discours.

Indépendamment de la mission égalité diversité, les étudiants au sein de notre établissement, sont-ils mobilisés ? Existent-ils des associations étudiantes qui œuvrent dans toute l’année sur ces questions ? 

PP : En dehors de la mission, il n'existe plus d'association étudiante qui travaille spécifiquement sur les thématiques de la lutte contre les discriminations, du moins pas à ma connaissance depuis qu'Unef n'est plus là. Néanmoins, toutes les associations étudiantes participent plus ou moins à cette lutte puisqu'elles favorisent la création de lien social, entre les étudiants, les personnels et les personnes extérieures à l'UL. Elles ont vocation à inclure et à rassembler, à échanger et à créer du vivre ensemble. Je les rencontre régulièrement grâce à la vie culturelle et étudiante de la MDE.

La lutte contre les discriminations englobe les questions sur l'égalité des sexes, les races, les religions, le handicap, les orientations sexuelles. Y a-t-il un combat qui te tient plus particulièrement à cœur ?

PP : Comme on peut s'y attendre oui, l'égalité des sexes est la thématique qui me tient le plus à coeur. Bien sûr je travaille sur chacune d'entre elles, mais je suis sensibilisée à cette cause plus particulièrement et je baigne dedans depuis des années déjà. J'ai écrit un mémoire de recherche sur le harcèlement de rue chez les étudiantes messines en 2015, c'est donc le sujet qui me touche de plus près, auquel je me suis le plus intéressée et sur lequel j'ai toujours énormément envie de travailler.

Quels seront tes prochaines actions ?

PP : Pour les prochaines actions, c'est un peu difficile à dire puisque l'année universitaire se termine, les étudiants vont bientôt déserter l'UL et donc c'est compliqué d'organiser quelque chose pour eux et avec eux. Néanmoins, la mission Egalité-Diversité travaille sur un projet pour la journée de lutte contre l'homophobie (17 mai), et sur la création d'une base de données qui recenserait les travaux de chercheurs lorrains sur les thématiques de lutte contre les discriminations. Une affaire à suivre donc.