Ma Thèse en 180 secondes : l’avis des encadrants

 
Publié le 12/01/2015 - Mis à jour le 10/05/2023
Jacques Felblinger et Dominique Macaire échangent autour d'un bureau.

Dominique Macaire, professeur au laboratoire ATILF (unité mixte UL-CNRS), dirige l’Ecole Doctorale Stanislas depuis trois ans. Jacques Felblinger dirige quant à lui l’unité Imagerie adaptative diagnostique et interventionnelle (IADI, unité mixte UL-INSERM). A l’occasion de l’ouverture du concours régional  « Ma Thèse en 180 secondes », nous leur avons demandé ce qu’ils pensaient de cet exercice de synthèse : présenter ses recherches de doctorat en trois minutes précises et convaincre un auditoire profane et diversifié.

« Voir au-delà du côté fun »

« Ma première réaction était négative, je trouvais ça un peu ridicule, un peu inutile de faire un sketch autour d’un travail scientifique » avoue d’emblée Dominique Macaire. Pourtant, autour d’elle plusieurs directeurs de laboratoires avaient des réactions enthousiastes. « Il s’agissait de collègues que j’estimais beaucoup, alors j’ai décidé d’y réfléchir et de voir au-delà du côté fun » poursuit-elle.

« J’ai découvert les Pecha Kucha nippones et j’ai appris que bien des universités allemandes avaient adopté cet exercice de présentation accéléré » : il s’agit d’une présentation orale d’un peu moins de 7 minutes, appuyée sur un diaporama défilant au rythme d’une diapositive toutes les 20 secondes. Jacques Felblinger renchérit : « un ingénieur de recherches de notre laboratoire nous a immédiatement parlé des présentations courtes qui sont effectuées au MIT ». Lorsqu’elle nous rejoint, Cécile Bertrand-Dagenbach, directrice adjointe de l’école doctorale Stanislas ajoute : « J’ai assisté à quelque chose d’analogue à Princeton : des chercheurs invités présentaient leurs travaux en cinq minutes dans la cafétaria, devant des mécènes soucieux de savoir ce qu’ils finançaient ».

Une excellente préparation aux entretiens professionnels

Tous les doctorants ne sont pas promis à une carrière universitaire, rappellent nos interlocuteurs. « La thèse ce n’est pas seulement écrire ce qu’on a sur le cœur, c’est aussi souvent faire le deuil de tout ça pour faire autre chose ensuite » observe Dominique Macaire. Pour elle, comme pour ses collègues directeurs de recherches, « Ma Thèse en 180 secondes » constitue une excellente préparation aux entretiens professionnels et aux situations d’expression en public que rencontrent les jeunes docteurs dans le monde du travail.

Les candidats de l’année passée se sont métamorphosés dans cet exercice : « bien des doctorants sont des étudiants brillants mais souvent réservés ou introvertis » observe Dominique Macaire, « le développement personnel est une réalité pour ceux qui choisissent de tenter l’aventure de ce concours ».

Objectif : développer les qualités de synthèse

Pour la chercheuse en sciences humaines, « nos doctorants doivent savoir démontrer que leurs compétences s’appliquent au-delà de leurs champs de recherche spécifiques ». Même constat pour Jacques Felblinger : « en sciences dures, les docteurs sont mis au défi de se positionner face aux ingénieurs ». Tous deux s’accordent à dire que l’exercice proposé par le concours aide à mieux se connaître pour briser la glace qui sépare souvent le monde des chercheurs de celui de la société civile. Dominique Macaire en est convaincue, « en sciences humaines, nous souffrons d’une trop forte valorisation de l’écrit. Il faut élargir l’éventail des modes d’accès au savoir et de sa diffusion, s’exercer par exemple à réaliser des posters ou à effectuer des exposés de quelques minutes ». Objectif : développer les qualités de synthèse, complémentaires de l’esprit d’analyse indispensable à la recherche scientifique.

Une aventure collective

Dans le laboratoire de Jacques Felblinger, « tout le labo a joué le jeu, on a fait répéter le candidat des dizaines de fois et presque tous les doctorants ont assisté à sa présentation ». Il faut dire qu’« en sciences dures, on ne peut pas accéder aux postes d’enseignants-chercheurs ou de chercheurs dans les EPST sans montrer qu’on a une activité de valorisation de la culture scientifique et technique » souligne-t-il. Dominique Macaire craint qu’il faille encore quelques années avant que les diverses disciplines de sciences humaines ne reconnaissent toutes ces qualités.  « Il est important que l’institution se mobilise et reconnaisse les efforts fournis par tous les doctorants en parallèle de la thèse », conclut-elle.