Le système immunitaire des astronautes au coeur du projet lorrain retenu par l'Agence Spatiale Européenne

 
Publié le 7/12/2020 - Mis à jour le 3/10/2022

Le laboratoire Simpa fait partie des trois projets retenus par l’ESA, l’European Space Agency et qui obtiendra un financement européen. Ce projet porte sur l’étude du système immunitaire des astronautes et son affaiblissement lié à la gravité, pendant des vols spatiaux. Le financement prendra en charge la réalisation de l'expérience à bord de la station spatiale internationale (ISS) et les analyses de données.

Factuel : Sur quoi porte le projet ?

Jean-Pol Frippiat : "L’affaiblissement du système immunitaire humain pendant les vols spatiaux représente un problème majeur pour les missions spatiales de longue durée. Il est donc nécessaire de mener des recherches afin d’acquérir les informations requises pour permettre une gestion intégrée et appropriée des risques encourus. Cette étude a pour but de déterminer comment la réduction d’une force mécanique, la gravité (nous sommes tous soumis à la force gravitaire de 1g sur Terre), est transmise au sein d’une cellule immunitaire et comment la transmission de cette information via le cytosquelette (le squelette d’une cellule) régule l'expression des gènes en ouvrant ou en fermant la chromatine (la chromatine est la structure au sein de laquelle l'ADN se trouve empaqueté et compacté dans le volume limité du noyau des cellules eucaryotes) et en réorganisant les positions des chromosomes. Cette étude sera réalisée sur des macrophages humains car ils participent à la première ligne de défense contre les infections. Ces cellules sont importantes pour lutter contre les agents pathogènes et déterminent l'issue d’une infection. Nous chercherons donc à comprendre les mécanismes de transduction de la force gravitationnelle dans le noyau de ces cellules et leurs rôles dans la régulation de l’expression des gènes. Pour cela, les différents éléments intervenants dans la chaîne de transduction des forces cellulaires seront marqués avec des molécules fluorescentes dans les macrophages. Ainsi, grâce un système d’imagerie à haute résolution de cellules vivantes qui sera bientôt installé à bord de l’ISS, et l’application de forces gravitationnelles différentes (gravité terrestre, martienne, lunaire et microgravité), nous pourrons identifier les changements rapides de la chromatine et des réarrangements chromosomiques ainsi que les réactions d'adaptation et de réadaptation en fonction de la force gravitationnelle appliquée. Ce projet récemment sélectionné par l’Agence Spatiale Européenne fait appel à trois laboratoires : un situé en Suisse qui coordonne le projet, un laboratoire américain et notre laboratoire."
 

Factuel : L'ESA est donc un partenaire de votre laboratoire. Comment collaborez-vous ?

Jean-Pol Frippiat : "Le soutien de l’ESA est crucial pour mener à bien ce projet car c’est elle qui va gérer l’envoi des échantillons à bord de l’ISS, et la récupération des données collectées en vol. De plus, c’est elle qui nous permettra d’accéder au système d’imagerie haute résolution développé par l’agence spatiale allemande (DLR). Ce projet sera développé également avec le laboratoire du Prof Oliver ULLRICH de Zurich (ce prof est coordinateur du projet) et des collègues de la NASA (Kennedy Space Center, Cape Canaveral)."
 

Factuel : Quelles ambitions envisagez-vous pour ce projet ?

Jean-Pol Frippiat : "Le but est de comprendre i) comment des modifications de la force gravitaire sont perçues par des cellules du système immunitaire, ii) de comprendre quelles réactions cellulaires en découlent et iii) comment ces réactions se mettent en place. Répondre à ces questions contribuera à savoir pourquoi/comment le système immunitaire est affaibli en vol. Sans cette compréhension, il sera difficile de développer des moyens efficaces pour contrecarrer cet affaiblissement."