[Portrait] Marion auteure de "La gamification dans le cadre de la formation professionnelle"

 
Publié le 26/11/2020 - Mis à jour le 5/05/2023

Marion a 23 ans, elle est en Master 2 Audiovisuel Média Interactifs Numériques et Jeux  à l’ Université de Lorraine à Metz. Dans le cadre de son M1, elle a rédigé un mémoire sur la gamification dans le cadre de la formation professionnelle. Il est devenu une référence au point d’être publié en ligne sur les archives ouvertes HAL. 

Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?

Je m’appelle Marion Giacci et j’ai 23 ans. Après l’obtention de ma licence dans les Sciences de l’Information et de la Communication, je me suis orientée vers le Master AMINJ, parcours Conception de Dispositifs Ludiques. Je suis une personne polyvalente, curieuse et assez perfectionniste dans mon travail. Intéressée par le monde de l’art, du graphisme et du jeu vidéo, je dispose de savoir-faire dans la réalisation graphique, le développement de jeux vidéo et la gestion de projet. Je suis passionnée d’histoire et de littérature et j’apprécie également les voyages, pour découvrir de nouvelles cultures.

Pourquoi avoir choisi le parcours CDL ?

En troisième année de Licence Information-Communication, j’ai choisi le parcours « Jeux vidéo et médias interactifs ». Le Master AMINJ et plus précisément le parcours CDL s’inscrivait tout naturellement dans la continuité de mes études, notamment pour accroître les compétences que j’avais pu acquérir en licence. Pendant cette troisième année de licence, j’ai pu découvrir le moteur de jeu Unity 3D, et je me suis passionnée pour la création de contenus ludiques. De plus, j’ai appris un nouveau langage informatique, le C#. Ces nouvelles compétences ont été une révélation pour moi. En effet, aimant les jeux vidéo depuis toujours (j’ai joué sur de nombreux supports au fil du temps, que ce soit sur la Playstation, la Nintendo DS, la Wii, le PC ou encore la Switch), j’ai pu voir, grâce à mes études, l’envers du décor.

Lier mes connaissances en Sciences de l’Information et de la Communication avec cet univers vidéoludique a été également une motivation pour choisir ce parcours, à la frontière entre la théorie et la pratique.

Comment vous est venue l’idée du sujet ?

Mon stage de troisième année de Licence m’a donné une première expérience professionnelle en lien avec le jeu vidéo. J’ai réalisé un jeu vidéo en 2D sur le thème de l’écocitoyenneté et j’ai pu lier la dimension ludique avec une dimension plus sérieuse. En première année de Master, nous avons eu des cours liés à la gamification. C’est grâce à ce bagage théorique et à cette première expérience dans le monde professionnel que j’ai eu envie d’approfondir mes connaissances dans la gamification et plus précisément sur son utilisation dans le cadre de la formation professionnelle.

Comment avez-vous abordé cette épreuve tant redoutée des étudiants ?

La première année du Master étant très chargée - sans parler de la crise sanitaire et du confinement -, il a été très compliqué de trouver du temps pour avancer dans ce travail de recherche. Les rendez-vous avec mon directeur de mémoire ont été essentiels pour avoir un suivi régulier sur mon travail et pour avoir des conseils sur la rédaction de ce dernier.

Quels conseils donneriez-vous aux étudiants de M1 qui viennent de commencer leur travail de recherche ?

Le mémoire de recherche étant important et représentant un travail significatif sur du long terme, il est possible très rapidement de se sentir submergé(e). Dans mon cas, j’avais un stress paralysant par peur de faire un hors-sujet, de manquer de temps, de ne pas répondre aux attentes, etc. Pour me détacher au maximum de cette pression, j’ai essayé de voir l’exercice dans son ensemble : dans tous les cas, j’allais acquérir de nouvelles connaissances sur un domaine qui me plait et qui pourront être valorisées en entreprise, et c’est finalement ce qui est le plus important.

Pour des conseils plus généraux, il faut bien entendu commencer le plus tôt possible (notamment pour les différentes lectures), cadrer au maximum le sujet pour ne pas partir dans tous les sens, tenir informé son directeur de mémoire des avancées (pour ne pas faire de hors-sujet et avoir des retours réguliers sur le travail produit), se faire confiance et s’entourer de camarades qui vous soutienne.

Ce projet est-il en lien avec votre projet professionnel ?

Je ne sais pas encore vers quoi je vais me diriger professionnellement parlant, mais mon expérience en création de dispositifs ludiques et mes recherches concernant l’utilisation de ces mêmes dispositifs au sein de la sphère professionnelle peuvent être valorisés lors de ma recherche d’emploi.

Pouvez-vous nous expliquer en quelques mots ce qu'est la gamification ?

La gamification c’est « l’utilisation d’éléments de conception de jeu (game design), dans des contextes non liés au jeu. » (Deterding et al., 2011) [“Gamification is the use of game design elements in non-game contexts”].

Pendant longtemps, le jeu a été considéré uniquement comme un loisir, une source de divertissement, en occultant toute autre dimension. Depuis 2010, la gamification est utilisée dans de nombreux domaines comme le management, la publicité, la formation ou le marketing et elle permettrait de développer une forme d'engagement chez les joueurs pour les motiver dans des tâches qui, à l'origine, ne semblent pas ludiques.

En quoi la gamification peut-elle contribuer à la formation en entreprise ?

C’est toute la question de ce mémoire où on questionne justement la place et l’efficacité de la gamification dans le cadre de la formation professionnelle et la possibilité d’acquérir et de développer des compétences à travers le biais de ces dispositifs. La gamification peut contribuer à la formation en entreprise, mais à certaines conditions.

Pour répondre simplement et exposer les résultats de ce travail de recherche, nous avons pu dans un premier temps confirmer que la gamification permet la création d'un objet frontière (entre deux mondes sociaux) avec une forme de coordination entre les différents acteurs et c’est la gamification fait le lien entre eux. Cependant, l'utilisation de la gamification est importante : elle ne doit pas toujours être considérée comme un moteur donnant du sens à une activité. Nous avons pu mettre en avant également la présence d'une négociation entre l'appareil et l'utilisateur, par le biais de la gamification. En effet, l'association d'une structure narrative avec un gameplay mouvant engage et motive l'utilisateur. Enfin, l'expérience de jeu permet le développement de compétences en action : il y a une appropriation du joueur qui devient acteur de sa propre formation. Cependant, il est important de garder à l'esprit qu'il est possible de sortir très rapidement de ce cadre d'expérience. La structure ludique n'engendre pas nécessairement une attitude ludique chez l'utilisateur, car il n'y a pas de déterminisme ludique. Il existe de nombreuses limites didactiques : les mécanismes connus (systèmes de récompense, badges, points) ne permettent pas d'engager le joueur sur le long terme et peuvent bloquer l'apprentissage. De plus, la gamification a des usages abusifs tels que les systèmes d'évaluation ou de compétition. Enfin, le fait que l'utilisateur sache qu'il joue dans la sphère professionnelle peut être une limite bloquante à l'apprentissage, car il n'adoptera pas une attitude ludique.

En fin de compte, il est particulièrement important de prendre en compte la multitude d'utilisations de ces dispositifs. Il y a une appropriation de la part de l'utilisateur et le respect d'un usage prédéfini peut conduire à une rupture, replaçant l'apprenant au cœur de l'apprentissage traditionnel. Pour activer l'acquisition et le développement des compétences, il faut permettre à l'utilisateur d'adopter une attitude ludique afin d’être confronté à des dispositifs plus efficaces dans le cadre de la formation professionnelle.

Avez-vous des exemples concrets ?

Il existe de nombreuses entreprises qui se tournent vers la gamification pour former leurs employés : Renault, McDonald’s, BNP Paribas et bien d’autres.

Avez-vous des personnes à remercier en particulier ?

Oui,  mes camarades de promotion, notamment Priscilla, Anthony et Pierre. Mais je veux surtout remercier mon encadrant de mémoire, Pierre Morelli, qui a su m’aiguiller et apporter son expertise tout au long de mon travail d’étude et de recherche. Merci également à Laurent Di Filippo, notre responsable de Master 1, pour sa bienveillance tout au long de cette année.

Vous pouvez consulter son mémoire sur la page HAL qui héberge les meilleurs mémoires du Master AMINJ : https://hal.univ-lorraine.fr/MASTER-AMINJ