[Publication] Comment découvrir de nouveaux gisements de métaux

 
Publié le 2/06/2020 - Mis à jour le 3/06/2020
Les métaux sont partout autour de nous : voiture, ordinateurs, infrastructures, … Le plomb par exemple est un métal indispensable, utilisé majoritairement dans les batteries de voitures. La demande en métaux augmente sans cesse et il est donc capital de trouver de nouvelles mines. Mais les métaux se situent parfois à des centaines de mètres sous la surface, alors comment savoir où chercher ? Pour avoir une idée des zones riches ou pauvres en métaux, les géologues doivent comprendre d’où viennent les métaux et pourquoi ils se sont concentrés dans un endroit précis. Pour répondre à ces questions, il est nécessaire de déterminer leur âge.
Les processus de formation des gisements se sont passés il y a des centaines de millions d’années, quand la seule forme de vie sur Terre consistait en des microorganismes. Il faut donc trouver des témoins de cette histoire très ancienne. Le carbone 14  permet par exemple de dater des squelettes d’hommes préhistoriques. Mais les roches sont trop vieilles pour utiliser cette méthode. Plutôt que d’étudier le carbone, les scientifiques dosent donc des atomes de plomb de masses différentes, contenues en très faibles concentration s, et peuvent ensuite déterminer à quel moment le minéral contenant le plomb s’est formé en appliquant des formules mathématiques . 
Il existe des machines capables de détecter des concentrations minuscules, comme la « Sonde Ionique » installée au laboratoire CRPG (Université de Lorraine – CNRS) à Vandœuvre-lès-Nancy. L’échantillon est poli, étudié avec différents microscopes et photographié afin de sélectionner les zones pour les analyses. Il est ensuite placé dans le vide, bombardé par des ions, et des atomes de la roche sont propulsés dans la sonde. Les atomes arrivent sur des détecteurs qui mesurent leur concentration en fonction de leur masse. Cette technique de pointe permet de voir des variations de concentration des atomes au sein d’un même cristal (de la taille d’un grain de sable) avec une précision  inédite.
Des chercheurs du laboratoire GeoRessources (Université de Lorraine – CNRS) ont analysé à la sonde ionique des minéraux contenant du plomb provenant de la mine de McArthur River située dans le nord de l’Australie. Il s’agit d’une des plus grandes mines pour le plomb et le zinc au monde, avec une zone riche en métaux couvrant 2 km² pour une épaisseur de 55 m. Elle produit 50 000 tonnes de plomb par an, soit 1 % de la production mondiale ! Les chercheurs ont pu déterminer que lorsque le plomb s’est accumulé dans la mine il y a 1640 millions d’années, environ la moitié du plomb était en fait encore plus ancienne (1850 millions d’années). Cela indique qu’une partie du plomb de la mine de McArthur provient initialement de zones gigantesques qui étaient à la fois plus anciennes et plus profondes que ce qui était généralement admis. Le plomb de ces roches a été dissout puis redéposé au niveau de la mine par des eaux souterraines il y a 1640 millions d’années. 
Il s’agit donc d’une avancée majeure dans la compréhension des processus qui peut impacter fortement les stratégies d’exploration dans les provinces métallifères et donner de nouvelles pistes d’exploration aux géologues !
 
>> Voir l'article publié par l'INSU-CNRS
 
Une publication est parue dans la revue Geology, dont le premier auteur est une jeune chercheuse nancéienne, membre du laboratoire GeoRessources : Joséphine GIGON.

Après avoir passé 4 ans en tant que géologue cartographe au Québec, Joséphine GIGON a soutenu sa thèse en 2019 au laboratoire GeoRessources à Nancy, ce qui lui a permis de se spécialiser en métallogénie. Son domaine d’expertise est la formation des gisements et des ressources métalliques.

 


Références de la publication :

Tracing metal sources for the giant McArthur River Zn-Pb deposit (Australia) using lead isotopes

Auteurs : Joséphine Gigon, Etienne Deloule, Julien Mercadier, David L. Huston, Antonin Richard, Irvine R. Annesley, Andrew S. Wygralak, Roger G. Skirrow, Terrence P. Mernagh and Kristian Masterman

Revue : Geology

doi.org/10.1130/G47001.1